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À l'origine, les points d'information...

Portrait de Didier Vanoni
© Laurent Cipriani

Texte de Didier VANONI

La vocation principale des Points Information Médiation Multi Services (Pimms) est de faciliter l’accès aux services publics des populations fragiles. Nés il y a vingt ans à Lyon, ils visaient déjà à adapter les services publics.

Texte écrit pour la revue M3 n°8

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Date : 30/11/2014

Initiative lyonnaise qui tend à essaimer sur le territoire national, les Pimms sont nés en 1995, dans le quartier des États-Unis à Lyon, de la volonté et de la réflexion communes de cadres d’entreprises de service public (EDF-GDF, France Telecom-Orange, La Poste, SNCF, Keolis et Véolia Eau). Constatant la dégradation des liens entre leurs services et une partie de leur clientèle, ils ont souhaité créer une structure de proximité, destinée à améliorer les services rendus et les relations avec la population. Pour ces entreprises, soumises à une obligation de service public, il s’agissait de véhiculer une image d’entreprise socialement responsable tout en s’inscrivant dans un mouvement plus large d’amélioration de la qualité de service et d’adaptation des moyens affectés aux territoires prioritaires selon la politique de la Ville. C’est ainsi que, parallèlement aux Pimms, d’autres formes de structures de proximité ont pu se développer sous le nom générique de Maisons de services publics.

 

Continuité, égalité, neutralité

Le mouvement continu de privatisation des entreprises publiques a profondément modifié leur rapport à la clientèle avec un abandon de l’accueil physique du client, jugé trop coûteux, progressivement remplacé par la relation à distance. Afin d’éviter une rupture avec toute une partie de leur clientèle et de faire face à certaines difficultés — impossibilité d’échanger et de mettre en place des propositions d’échelonnement de paiement, par exemple —, les entreprises ont trouvé dans les Pimms un moyen de développer les relais de proximité avec les publics en difficulté. En ce sens, les Pimms permettent la continuité, l’adaptation aux progrès techniques et à l’évolution de la demande sociale, l’égalité de traitement pour tous et la neutralité. Ils préservent quelques-uns des principes fondamentaux du service public.

Au-delà de l’activité tournée vers les entreprises, qui représente un peu moins de la moitié des motifs d’accueil enregistrés, les Pimms sont conçus comme des lieux d’accueil ouverts à tous, destinés à faciliter l’accès aux services en développant un accueil généraliste et polyvalent. Cette proximité est aussi bien géographique, par une implantation des Pimms là où vivent les publics défavorisés, que sociale, grâce à l’écoute et à l’empathie.

 

Bien plus que de la médiation

Il existe ainsi une gamme d’activités proposées par les Pimms en dehors des entreprises, qui se développe autour de différents services. Elle comprend l’information, le conseil et l’orientation pour tout type de demandes ; le rôle d’écrivain public ; la médiation directe par téléphone entre l’usager et le service ; la médiation par Internet (pointage Assedic, extrait de naissance, Caf ). En outre, certains Pimms se sont vu confier, par les services de la préfecture, un accompagnement dans le montage des dossiers de naturalisation.

L’ensemble de ces tâches et fonctions indique que l’utilité de ce service de proximité ne se limite pas à la médiation réalisée auprès des usagers et à l’aide qui leur est apportée. Les Pimms déchargent réellement les services publics et les entreprises d’une partie de leurs tâches d’accueil et de traitement des réclamations. Sans se substituer aux services existants, mais en leur permettant de se recentrer sur leur cœur d’activité, ils favorisent ainsi la productivité des services publics.

Cette proximité a permis également de mieux connaître les publics en difficulté et a conduit les entreprises à mieux cibler leurs interventions en développant la médiation sortante, qui consiste à « aller vers » le client en se rendant directement à son domicile. Cette mission permet à l’entreprise de recouvrer ses impayés et de mettre en place un accompagnement social en renouant des liens avec des personnes isolées, fragilisées et parfois inconnues des services. La médiation sociale dans les Pimms a, de fait, une vocation générale, d’amélioration de l’accès aux droits sociaux, qui peut limiter les phénomènes de « non-recours ».

 

Un risque de dépendance des bénéficiaires

À force de pousser l’adaptation du service aux caractéristiques du public, les Pimms pourraient avoir comme effet négatif de maintenir les personnes en difficulté dans leur statut d’exclus. Les agents médiateurs des Pimms se heurtent, dans la pratique, à la difficile responsabilisation de personnes qui peinent à s’émanciper des repères pris dans leur quartier. Les promoteurs des Pimms lyonnais avaient cependant, dès l’origine, anticipé les risques réels de dépendance vis-à-vis de ce service, et de spécialisation de ses bénéficiaires. Ce que veulent contrebalancer la neutralité des lieux d’accueil, dont la conception se voulait non stigmatisante — ni guichets ni administrations, mais « lieux ouverts » —, et des implantations si possible à l’extérieur des quartiers et dans des zones de flux. Par ailleurs, le caractère généraliste de l’accueil et l’activité tournée vers les entreprises contribuent au brassage des publics et permettent de considérer que les Pimms participent au désenclavement social des quartiers. Cependant, il est évident que cette volonté de désenclavement portée par les seuls Pimms reste insuffisante du fait de leur vocation à ne proposer qu’un premier accueil, des aides diverses et une orientation. Il reviendrait à l’ensemble des parties prenantes de la ville servicielle de prendre la mesure de la dimension « inclusive » que doivent intégrer leurs relations aux usagers, a fortiori si ceux-ci sont socialement défavorisés