Oui, parce que si l’on prend l’exemple d’Ikea, le fait qu’ils aient des prix aussi attractifs leur a permis d’optimiser leur approche de standardisation de manière assez extraordinaire. On a le même nom de produit dans tous les pays et on retrouve les mêmes meubles un peu partout. Or, au lieu de cette standardisation extrême, on peut avoir, demain, des unités de production beaucoup plus réduites, parce qu’on fabriquera des produits unitaires. Alors peut-être qu’on fabriquera en plus grande quantité parce que les gens auront accès au produit qui leur va bien alors qu’aujourd’hui ils ne le trouvent pas encore sur le marché. Cela contredit un peu ce que j’ai dit tout à l’heure. Disons que dans certaines situations, on pourrait voir une augmentation de la production de produits correspondant à un besoin particulier, avec des unités de production qui seront certainement amenées à changer puisque la production de masse sera moins adaptée. Là où l’on a déjà commencé à optimiser les cycles de production avec des productions « juste à temps », par exemple dans l’industrie automobile, dans les unités de production de PSA, Mercedes ou ailleurs dont la cadence est de 10 ou 20 véhicules de telle référence, les sous-traitants sont capables de lancer sous 24-48 heures la production de 10 sièges pour tel modèle, 10 sièges pour tel autre, sans stock. On produit très exactement les sièges qui vont correspondre aux véhicules qui sont sur la chaîne de production. Dans un avenir plus ou moins proche, on peut donc avoir des ateliers de production encore plus flexibles, ayant la capacité de produire le produit unique pour la personne ou le marché qui le demande. Une production plus durable, on peut l’imaginer en effet, car si l’on met en œuvre moins de matière et moins d’énergie pour fabriquer la pièce, donc in fine moins d’énergie également pour la recycler, on est dans un contexte de développement durable plus abouti. On produit mieux en limitant l’énergie et la matière nécessaires à la fabrication. Au niveau de l’utilisation, le recyclage est lui aussi amélioré. Et puis la quantité d’énergie nécessaire à cet usage est également limitée. Si l’on prend l’exemple de l’avion, Airbus annonce des économies de kérosène assez importantes après avoir mis en œuvre le design génératif, […] ce qui signifie moins de rejet de CO2 dans l’atmosphère. On ne peut pas obtenir, pour autant, une industrie sans déchet. Les matériaux utilisés pour la fabrication additive, pas forcément le plastique mais par exemple les matériaux métalliques qui sont souvent en poudre pour être ensuite fusionnés lors de la phase de fabrication de la pièce, génèrent tout de même un surplus de poudre qui ne peut pas être remis dans la machine afin de relancer un cycle de production. Il y a des contraintes, d’hygrométrie par exemple, liées aux propriétés physiques, pour atteindre l’objectif de fabrication. […] Ceci dit, si l’on compare avec la fabrication soustractive ou à de l’usinage traditionnel lorsque vous partez d’un « brut », d’un bloc de matière, qui est usiné à 80 % afin d’obtenir la pièce voulue, on a certainement une consommation de matière et d’énergie beaucoup plus importante que si vous recourez d’emblée à la fabrication additive. Même si l’on a aujourd’hui des procédés de fabrication additive qui nécessitent un peu d’usinage, autrement dit même si vous avez des traitements de surface, dans la fabrication additive, qui ne permettent pas d’obtenir des surfaces aussi lisses, d’une qualité aussi élevée, que celles obtenues par l’usinage. Même si vous concevez votre pièce en une fois et assez rapidement, sans les contraintes déjà évoquées, il faut passer par une étape d’usinage pour réaliser le traitement de la surface nécessaire. Il y a toutefois un vrai bouillonnement dans ce domaine. Assurément, on va vers quelque chose de plus durable, de plus économique et de plus écologique.