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Eau/9 - Les différentes fonctions de l’eau

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© Céline Ollivier Peyrin - Métropole de Lyon

Étude

Le rôle que joue l’eau dans la vie et sa place dans notre quotidien influencent les représentations que nous en avons.

Mais il est souvent difficile de trouver les bons repères pour parler de ce sujet : entre eaux « bleue », « verte » et « grise », on ne parle pas de la même « ressource », et la façon de raisonner dépend de l’échelle à laquelle nous nous plaçons (petit cycle de l’eau domestique ou grand cycle naturel).

Alors, pour mieux étayer un débat public sur l’eau, quelles sont les informations scientifiques à notre disposition ?
Que sait-on de la situation sur le territoire de la métropole de Lyon aujourd’hui et des prévisions dans le futur ?

Cette fiche revient sur les besoins vitaux de l’eau pour le vivant et les humains, mais aussi sur les autres fonctions qu’on lui attribue : production, cadre de vie, activités récréatives.

Cette fiche est la neuvième sur une série de neuf. Retrouvez l’intégralité de la fiche dans l’article ci-dessous et également en téléchargement sur cette page.

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Date : 30/09/2021

«Le plus important, c’est l’eau pour boire et pour se nourrir » ?

 

Comment les habitants se posent-ils cette question ?

En 2020, les Français considéraient que la préservation de la biodiversité aquatique était le deuxième enjeu lié à l’eau, derrière la réduction des pollutions (SDES, 2020). Cela signifie que les Français se préoccupent de plus en plus de la nature qui les entoure et de l’environnement.

Toutefois, les Français accordent d’autres valeurs à l’eau. La moitié des Français se rend régulièrement près d’un cours d’eau et la promenade à pied est de loin (environ 90 %) la principale source de fréquentation de ces lieux (SMNVC, 2009). Viennent ensuite très loin derrière la fréquentation à vélo (15 % des Français), le pique-nique (14 %), la pêche (12 %) puis plus marginalement les loisirs aquatiques comme le canoë ou la baignade. Les cours d’eau les plus appréciés sont ceux dont les abords sont jugés agréables.

 

Ce qu’il faut retenir

L’eau est vitale pour satisfaire nos besoins élémentaires, comme boire et manger. Mais elle est aussi essentielle pour les espèces vivantes autres que les humains : l’eau permet de réguler le climat et les écosystèmes, ce qui lui donne une valeur éthique majeure. D’un point de vue plus utilitariste, l’eau façonne aussi les paysages, améliore notre cadre de vie et permet de nombreuses activités récréatives.

 

3 types de services sont rendus par les milieux naturels

On peut apprécier l’eau et la nature pour leur valeur intrinsèque. Dans cette optique, il importe que les activités humaines ne se fassent pas au détriment du vivant. Une autre façon d’appréhender l’importance des espèces est de les considérer pour les services qu’elles rendent à l’humanité. C’est généralement l’approche privilégiée par les économistes, qui distinguent volontiers 3 types de services rendus par la nature : des services d’approvisionnement en ressources, des services de régulation des écosystèmes, et enfin des services culturels et récréatifs. L’eau n’est donc pas seulement une ressource indispensable pour boire, se laver ou produire notre alimentation (services d’approvisionnement). C’est également un élément indispensable au fonctionnement du climat et des écosystèmes (services de régulation). Et c’est enfin un élément qui façonne les paysages et sert de support à de nombreuses activités culturelles ou de loisir.

 

Exemples de services écosystémiques d’approvisionnement, de régulation et culturels© Locatelli et al., 2017

 

8 % seulement de la valeur économique d’une aire de captage est liée à ses services d’approvisionnement

Même si l’eau est indispensable à la vie, ce n’est pas forcément cette dimension vitale qui est la mieux valorisée dans notre système économique. Une étude menée sur une aire de captage d’eau potable située dans le Sud de la France, sur les contreforts nord de la Sainte-Baume, a permis d’estimer la valeur monétaire fournie par cet espace naturel pour chacun de ces services (Hérivaux & Grémont, 2015). On notera que l’exercice est difficile et critiquable, car tous les services écosystémiques ne sont pas monétisables. Par ailleurs, ce qui est valable pour la Sainte-Baume ne le sera pas de manière identique partout ailleurs. Mais cela permet de fixer quelques ordres de grandeur.

L’eau peut être utilisée comme ressource pour différents services d’approvisionnement : l’alimentation en eau potable, l’irrigation des cultures ou encore la production forestière et industrielle. C’est en général cet usage qui nous semble le plus indispensable. Pourtant, dans le cas de l’aire de captage de la Sainte-Baume, ces services ne représentaient qu’environ 8 % de la valeur économique des services rendus par cet espace.

Ce territoire naturel fournit en effet d’autres fonctions de régulation très importantes : il permet de fixer et stocker du carbone, de réguler le cycle de l’eau ou encore de protéger d’autres zones des inondations, et ces différentes fonctions représenteraient environ 23 % de la valeur économique rendue par le territoire.

L’eau est enfin un élément structurant du cadre de vie et permet de nombreuses activités culturelles ou de loisir. Dans le cas de la Sainte-Baume, ce sont ces services culturels et récréatifs, comme la pêche, la chasse ou encore la promenade, qui représentaient de loin la valeur économique la plus importante du territoire (69 %).

L’eau est un bien commun qui crée une communauté de destin entre les différentes activités humaines mais aussi avec d’autres espèces. Tout l’enjeu est de prendre en compte les différentes fonctions (biodiversité, eau potable, agriculture, cadre de vie, activités privés) des ressources en eau et des milieux aquatiques et de les penser de manière systémique.

 

Et demain ?

À proximité des métropoles, les aires de captage d’eau potable sont souvent menacées par l’urbanisation ou l’agriculture intensive, qui représentent un intérêt économique à court terme. De nombreuses études économiques comparant les coûts et les bénéfices ont pourtant permis de démontrer l’intérêt qu’il y avait à préserver des aires de captage d’eau potable face à l’urbanisation. La prise en compte plus systématique des nombreux services fournis par ces écosystèmes pourrait à l’avenir convaincre les décideurs de mieux protéger ces milieux.

La qualité du cadre de vie est par ailleurs en train de devenir un critère parmi les plus importants dans les choix de résidence. La crise sanitaire du Covid-19 ainsi que le changement climatique ont encore renforcé l’intérêt des citoyens pour la présence de l’eau dans leur cadre de vie direct (espaces verts, lieux de fraîcheur, etc.).

L’augmentation des risques d’inondation du fait du changement climatique renforce également l’intérêt des zones humides permettant d’amortir l’expansion des crues des cours d’eau.

Mieux prendre en compte dans les décisions d’aménagement toutes les fonctions des milieux humides et naturels est donc primordial pour préparer l’avenir.

 

Et dans le Grand Lyon ?

→ Le secteur de Miribel-Jonage est un exemple symptomatique des différentes fonctions des milieux naturels humides. Du 19e  siècle aux années 1970, ce sont les fonctions d’approvisionnement qui ont dominé dans les décisions d’aménagement, avec la création de l’usine hydroélectrique de Cusset, l’extraction de granulat dans le lit du Rhône et la mise en exploitation des nappes des champs captant de Charmy et Crépieux pour la production d’eau potable.

→ Cette dernière fonction va imposer la protection de cette zone de l’urbanisation et, dans la foulée, d’autres fonctions vont être reconnues et mises en valeur, comme l’amortissement de l’expansion des crues du Rhône, mais aussi la fonction de loisirs avec la création du parc qui deviendra un lieu privilégié de baignade, de promenade et d’activités nautiques pour les habitants de la métropole.

→ Enfin, dans les années 1990, des fonctions moins utilitaristes sont reconnues : le parc s’impose alors comme un site naturel qu’il convient de protéger, avec un classement qui vise à préserver le secteur contre la pression urbaine et promeut une valorisation de ses espèces animales et végétales (Boutaud, 2011).

 

Pour en savoir +

•  Boutaud A., 2011, La biodiversité en question(s).

•  Capital, 2020, Immobilier à Lyon : la carte des prix 2020.

•  Duport-Levanti A., 2021, Immobilier de luxe : la vue fait exploser les prix.

•  Hérivaux C., Grémont M., 2015, Caractérisation des bénéfices économiques de la préservation des eaux souterraines.

•  Locatelli B. et al., 2017, Analyser des services écosystémiques pour gérer des territoires.

•  SDES, 2020, Eau et milieux aquatiques. Les chiffres clés, Édition 2020.

•  SMNVC, 2009, Enquête de population sur la perception de l’eau et des milieux aquatiques. Syndicat Mixte des Nappes Vistrenque et Costière.

 

 

Retrouvez toutes les fiches Eau :

Sujet n°1 – La disponibilité de la ressource en eau douce « La planète bleue ne peut pas manquer d’eau » ?

Sujet n°2 – Les consommations visibles… et invisibles « J’ai un comportement responsable, je fais attention à l’eau que je consomme au robinet » ?

Sujet n°3 – La responsabilité individuelle « La lutte contre le gâchis d’eau, c’est d’abord l’affaire des agriculteurs et des industriels » ?

Sujet n°4 – Les marges de manœuvre individuelles « Pour réduire ses consommations d’eau potable, il suffit de prendre des douches à la place des bains » ?

Sujet n°5 – La quantité d’eau douce disponible « Il y aura toujours assez d’eau dans le Rhône et la Saône » ?

Sujet n°6 – La qualité de l’eau potable « On trouvera toujours le moyen de rendre l’eau potable » ?

Sujet n°7 – Les nombreux effets du changement climatique « Avec le changement climatique, c’est surtout le littoral qui sera touché par la montée des eaux » ?

Sujet n°8Le prix et le coût de l’eau « L’eau devrait être gratuite » ?

Sujet n°9 – Les différentes fonctions de l’eau « Le plus important, c’est l’eau pour boire et pour se nourrir » ?

 

 

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Pour tout savoir sur la démarche Eau futurE et ses suites, rendez-vous sur jeparticipe.grandlyon.com.

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