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Bonvena : coworking et pédagogie alternative pour tous

Interview de Héléna Hugot et Cécile Daboust

Fondatrice et régisseuse

<< Notre credo, c’est la coéducation entre les éducateurs à l’école et les éducateurs à la maison >>.

L’association Les Petits plus s’est engagée dans la création de lieux éducatifs ouverts associant école, espace de coworking et accompagnement à la parentalité, tout en ambitionnant de réinventer le modèle économique des écoles privées hors-contrat pour permettre une réelle mixité sociale.

Au moment de l’entretien (fin 2016), l’équipe travaille sur l’ouverture de l’école Bonvena (Lyon 7) et d’une seconde à Vaise. Actuellement, l’école Bonvena accueille 17 enfants tandis que le projet de Vaise a été arrêté suite à la découverte d’une cuve de fioul enterrée sur le site de la future école. La réalisation des tests de contamination représentait un coût trop important pour la survie du projet.

Dans cet entretien, Héléna Hugot et Cécile Dabuost nous expliquent pourquoi et comment Les Petits plus se mobilise pour développer une autre vision de l’éducation, plus apte à répondre aux enjeux sociaux contemporains.

 

 

Date : 10/02/2018

Quel est la spécificité de votre projet d’école ?

Notre projet est de créer des lieux éducatifs ouverts associant crèche et/ou école, espace de coworking et ateliers parents-enfants, tout en réinventant le modèle économique des écoles privées hors-contrat pour qu’elles soient réellement accessibles à tous, avec une véritable mixité sociale. Ce modèle nous semble bien répondre à trois enjeux contemporains : du côté des parents, l’intérêt pour les questions d’éducation et de parentalité et l’évolution des modes de travail, du côté des enseignants, le besoin de liberté dans l’exercice de leur métier et de réflexion collective, accompagnée et enfin, socialement, la nécessité de créer les acteurs du changement. C’est un concept qui peut encore faire peur en France parce que les esprits sont quand même formatés. D’où l’importance de donner à chaque enfant la capacité à questionner le monde, à agir avec empathie.

Votre objectif premier n’est donc pas de préparer les enfants à s’insérer dans la société mais plutôt de leur donner la capacité de la transformer, d’œuvrer à une transition sociale ?

Pour changer le monde, il faut révolutionner notre pédagogie et notre système

Oui, c’est une autre vision de l’éducation. Au début du projet, j’ai réalisé un tour des écoles, crèches et espaces de coworking alternatifs à l’étranger notamment en Asie et à Oman. J’ai été bouleversée par des écoles qui travaillaient sur le développement du changement chez l’enfant. Pour changer le monde, il faut révolutionner notre pédagogie et notre système. Les familles font le constat que le système classique n’est plus possible. Nous en sortons tous avec des lacunes comme le manque de confiance en nous, la peur de parler une langue étrangère, de parler en public… Ce n’est pas une fatalité ! Notre objectif est de travailler avec la plasticité cérébrale des petits enfants, de leurs donner des acquis en termes de développement de l’empathie, de confiance en eux pour qu’ils deviennent acteurs du changement. Toute notre pédagogie est basée là-dessus. Envoyer une carte postale à des enfants africains n’est pas suffisant ! L’école Riverside, à Ahmedabad, met les enfants en situation de repérer un problème à l’échelle de leur quartier, de la rue ou de la société et d’identifier des moyens pour développer des solutions. Les enfants ont par exemple visité une unité pédiatrique et se sont rendu compte que les enfants hospitalisés ne souriaient pas. Ils ont décidé de réaliser une fresque, d’investir dans du matériel pédagogique et du mobilier pour donner du souffle et de la créativité à ces espaces. Pour collecter des fonds, ils ont réalisé des dessins, monté une exposition, fait une vente… à 3-4 ans ! Bien sûr, ils étaient épaulés par des accompagnateurs mais aussi par des enfants de 10-12 ans parce que l’entraide et l’apprentissage entre enfants d’âges différents est assez extraordinaire. Un de nos objectifs sera d’aller à la rencontre du quartier et de ses différentes structures pour permettre aux enfants de monter des projets avec ce qui les entoure.

Concrètement, comment est née l’envie d’ouvrir une école hors contrat ?

Je me suis investie quelques années dans le milieu humanitaire et en suis revenue avec l’envie de travailler à la fois sur une éducation plus bienveillante à la maison et à l’école et sur la continuité éducative entre parents et professeurs.

Héléna Hugot : De l’écoute des parents ! Mon parcours professionnel m’avait sensibilisé à ces questions. Après des études en philosophie et un capes de lettres modernes, j’ai enseigné pendant un an et demi. Là, j’ai pris une claque. Ayant grandi dans les lycées français à l’étranger, donc des lycées d’excellence, je ne m’attendais pas à ce qu’un tiers de ma classe ne sache pas lire... Je me suis investie quelques années dans le milieu humanitaire et en suis revenue avec l’envie de travailler à la fois sur une éducation plus bienveillante à la maison et à l’école et sur la continuité éducative entre parents et professeurs. J’ai vite compris que cela allait être difficile dans le cadre de l’Education nationale. J’ai donc fondé, en 2016, l’association des Petits plus pour mener des ateliers périscolaires et d’accompagnement à la parentalité en m’appuyant sur la pédagogie positive et bienveillante. Le projet d’école est né de ces rencontres avec les parents, de l’expression de leurs besoins d’équilibrer temps de vie personnelle et professionnel, de se sentir davantage impliqués dans la vie scolaire de leur enfant. Beaucoup de parents ont aussi été bouleversés par tout ce qui a été fait par Céline Alvarez mais n’ont pas forcément les moyens de payer une scolarité dans les écoles Montessori.

Au-delà du recueil des besoins, les parents sont partie prenante de la création de l’école ?

L’objectif à terme est de développer un modèle participatif, peut-être en évoluant vers un modèle de coopérative.

Nous avons mis en place un comité de parents. C’est intéressant de noter que tous les parents engagés avec nous ne sont pas des futurs parents d’élèves. Certains n’envisagent pas de scolariser leurs enfants dans notre école, mais tous sont motivés pour travailler sur le thème de la bienveillance, de la communication positive. L’objectif à terme est de développer un modèle participatif, peut-être en évoluant vers un modèle de coopérative. Pour le moment, c’est trop compliqué d’intégrer les salariés et les parents. Entre faire une place, échanger et prendre des décisions de manière collégiale, il y a un gouffre qui demande du temps à traverser.

Comment est-ce que vous pensez l’implication des parents dans le fonctionnement quotidien de l’école ?

Notre credo, c’est la coéducation entre les éducateurs à l’école et les éducateurs à la maison

Notre credo, c’est la coéducation entre les éducateurs à l’école et les éducateurs à la maison. Nous invitons les parents à rentrer dans l’école d’une manière différente de l’école classique où ils posent leurs enfants et viennent les rechercher. Pour l’enfant, c’est rassurant de sentir que ses parents s’investissent dans le lieu dans lequel il va tous les jours et pour les parents de vivre des choses positives et d’être à l’aise dans ce lieu qu’est l’école. Une des propositions est de vivre à l’école au quotidien. Ce n’est pas obligatoire non plus, tout le monde ne peut pas faire du coworking ! Mais les lieux peuvent être investis sur différents temps scolaires et extra-scolaires via des coachings individuels ou des ateliers collectifs sur des thèmes liés à la parentalité ou l’éducation en plus d’activités partagées parents-enfants. Les mercredis après-midi seront réservés aux temps parents / enfants autour du jeu, d’activités yoga… Nous cherchons aussi des grands parents pour des ateliers lectures ou des activités pendant les vacances scolaires. Ce qui nous intéresse ce sont les liens et l’expérience de passer une journée ensemble au sein d’un groupe dans la bienveillance et les principes de l’éducation positive. Tout le projet pédagogique se construit aussi en concertation avec les souhaits des parents et des enfants. Créer un jardin potager, construire du matériel et du mobilier scolaire, etc. ensuite à nous d’aller chercher des ressources pour financer ces projets.

Cette volonté de décloisonnement se retrouve-elle dans le volet pédagogique ? Est-ce que vous repensez l’organisation spatiale et temporelle de l’école ?

C’est important que l’enfant puisse adapter son activité en fonction de son état tout en restant dans l’espace collectif.

Pour la pédagogie, nous étions partis sur la pédagogie Montessori mais plus le projet avance, plus on décloisonne les cadres pédagogiques. C’est à l’école et à l’équipe pédagogique d’adapter ses cadres à l’enfant et non l’inverse. Deux temps de dialogues sont instaurés comme des routines hebdomadaires : l’atelier philosophie pour arriver à débattre des concepts philosophiques et l’atelier de conversation sur les problématiques rencontrées dans la classe, les projets à venir… La matinée est plutôt réservée aux activités autonomes inspirées de la pédagogie Montessori et Emilia Reggio, tandis que l’après-midi est plutôt dédié aux projets collectifs, aux sorties à l’extérieur, à des ateliers qui seraient proposés par des parents (présenter un métier, enseigner une langue étrangère…). On ne souhaite pas être dans une logique de temps de récréation qui impose à tout le monde de sortir à la même heure mais plutôt de privilégier des temps plus longs de sortie aux parcs. Au niveau de l’espace, nous avons choisi l’organisation spatiale proposée par Emilia Reggio qui offre aux enfants différentes activités motrices, ludiques, d’attention, etc. dans un même espace, tout le temps. C’est important que l’enfant puisse adapter son activité en fonction de son état tout en restant dans l’espace collectif. Il y aura par exemple une malle à déguisement, un vidéoprojecteur que les enfants peuvent utiliser de manière autonome, un espace sieste pour se reposer quand ils veulent…

Finalement, vous vous rapprochez du modèle des écoles démocratiques ?

nous avons des éducateurs qui encadrent les enfants et sont là pour aider l’enfant dans ses apprentissages

Non, nous sommes très éloignés de ce modèle ! C’est intéressant comme question parce qu’à un moment donné, nous avons imaginé faire un pôle pédagogique avec l’école démocratique Nicolas Tesla qui s’est ouvert à Lyon. Cela ne s’est pas fait : nous avons trouvé que cela serait source de confusion pour les parents et les enfants. Pour nous, il y a une vraie différence dans nos propositions : nous avons des éducateurs qui encadrent les enfants et sont là pour aider l’enfant dans ses apprentissages. D’ailleurs, nous suivons le socle commun des compétences de l’Education Nationale. Notre objectif est bien défini et nous proposons juste un autre moyen pour y parvenir.

Vous mélangez les pédagogies mais certaines ne demandent-elles pas d’être mises en œuvre comme un tout pour être efficaces ?

Chaque expert arrive avec ses propres motivations et l’école sert de terrain d’observation, d’évaluation

C’est certain que l’institution Montessori serait hérissée d’apprendre que le cadre montessorien est mixé avec d’autres pédagogies ! Ce choix est questionnable et c’est pour cela que nous avons créé un comité d’experts pour nous accompagner sur cette question. Peut-être que dans 6 mois, nous dirons autre chose ! Ce comité scientifique est composé de différents chercheurs en neurosciences,  sciences de l’éducation et psychologie, une pédiatre, et un membre du CA de l’association et se réunit tous les mois. En ce moment, nous travaillons sur l’organisation des espaces, le cadre pédagogique, les fondements de l’école. A partir de janvier, le comité se positionnera plutôt comme ressource auprès de l’équipe pédagogique et des parents sur des questions précises comme le rythme des enfants, le sommeil, etc.. Chaque expert arrive avec ses propres motivations et l’école sert de terrain d’observation, d’évaluation : étudier la création des écoles et le blocage actuel au sein de l’Education Nationale, être en lien avec du terrain, envie d’« évangélisation », de transmission de résultats de recherche, penser un modèle d’école qui pourra être dupliqué…

Quel profil d’éducateur avez-vous recherché ?

Nous cherchions donc un profil d’entrepreneur avec une grande ouverture d’esprit et une volonté d’expérimentation

Côté management, nous sommes partis sur un modèle très entrepreneurial loin des logiques hiérarchiques. Nous cherchions donc un profil d’entrepreneur avec une grande ouverture d’esprit et une volonté d’expérimentation. Nous avons rencontré près de 70 personnes et au final ce sont les enseignantes issues de l’Education nationale qui ont été les plus convaincantes. Elles ont une vision très claire des limites du système actuel, ont pratiqué la pédagogie Montessori dans leur classe, la volonté de tester de nouvelles choses mais le cadre de l’école publique est trop contraignant. Les enseignants se sentent ficelés. Imaginez que le film Demain n’a pas été projeté en classe par peur de déstabiliser les enseignants et de donner envie aux parents… C’est quand même terrible une telle peur de bouger ! Nos éducatrices ont fait le choix de se mettre en disponibilité. Cette école est une opportunité pour tester les solutions qu’elles sentent répondre aux problématiques terrain actuelles. Nous avons aussi rencontré un certain nombre de profils en reconversion professionnelle ayant suivi la Formation AMI - Institut Supérieur Maria Montessori, mais qui n’avaient pas forcément un bagage pédagogique antérieur et dont le souhait était d’appliquer directement ce qu’elles avaient appris. C’est légitime mais ça ne correspondait pas à notre projet.

Quelle est votre politique de rémunération ?

Comme en Islande, nous avons choisi de bien rémunérer les enseignants car ce sont les piliers du bon fonctionnement de l’école.

Nous adhérons à la convention collective des écoles hors contrat mais sans suivre la grille des salaires. Comme en Islande, nous avons choisi de bien rémunérer les enseignants car ce sont les piliers du bon fonctionnement de l’école. Ce sont des personnes ressources dont la responsabilité dépasse largement le cadre pédagogique pour accompagner globalement parents et enfants. Le salaire de base pour les éducatrices est à 1900€ brut mais elles peuvent travailler à gagner plus en animant des ateliers, des stages... Notre volonté est d’avoir un modèle économique valorisant ce travail pour tous, y compris les porteurs de projet. Le travail à une valeur et il faut la reconnaître. C’est notre côté entrepreneurial !

Vous ambitionnez de réinventer le modèle économique des écoles alternatives, de quelle façon ?

Pour avoir de la mixité sociale, nous avons choisi de calculer les frais de scolarité selon les quotients familiaux.

Les écoles privées hors-contrat sont perçues comme élitistes alors qu’elles paient juste un loyer et des charges de personnel ! Pour avoir de la mixité sociale, nous avons choisi de calculer les frais de scolarité selon les quotients familiaux. Cela nous fait perdre de l’équilibre. Mais comment trouver des ressources au service de la mixité sociale ? Sur ce volet économique, nous sommes accompagnés par l’incubateur d’entreprises sociales Ronalpia mais aussi par Bouygues Immobilier. Nous n’avons pas peur des partenariats avec le privé.
Notre business model repose sur trois piliers :

-la mutualisation des moyens en intégrant les écoles au sein de lieux vivants. L’espace Hévéa à Lyon 7 offre des loyers modérés aux acteurs de l’économie sociale et solidaire grâce à la mutualisation des espaces (cuisine, atrium, coworking…) et des services (téléphone, internet, reprographie…). On ne gère pas la maintenance, ni de travaux de gros œuvre, c’est un gain énorme ! L’école occupe 78m2 mais nous avons accès aux 1900m2 de l’espace Hévéa !

- le maintien à l’équilibre de chaque activité de manière autonome pour éviter qu’une activité ne mette en péril une autre 

- le développement d’activités complémentaires, génératrices de revenus. Par exemple, utiliser le local de l’école pour d’autres activités, faire vivre le lieu de 8 heures à 22 heures et toute l’année avec du scolaire, du périscolaire, de l’accompagnement à la parentalité, construire et louer du matériel Montessori, développer des prestations de conseil pour les porteurs de projet de structures éducatives alternatives. Nombreux sont ceux qui nous sollicitent et jusqu’ici, nous proposons des temps de rencontre bénévole mais ce pourrait devenir un accompagnement rémunéré.

Vous avez fait le choix d’une tarification au quotient familial. L’école est donc gratuite pour certains enfants ?

Nous avons 6 tarifs différents selon le quotient familial et chaque famille paie aussi une contribution solidaire obligatoire de 30€ mensuels. Cette contribution sert à financer la scolarité des plus fragiles économiquement mais est due aussi par les familles qui sont au tarif 1, c’est-à-dire exonérées de frais de scolarité. Nous ne souhaitions pas une gratuité totale mais un engagement de toutes les familles à la fois financièrement et en temps (temps des repas, petits travaux, création collective de jeux et de matériel).

Le pari de la mixité sociale est-il gagné sur les demandes d’inscription ?

En fin de compte, ce qui relie tous les parents reste la manière de mieux accompagner leurs enfants

Nous avions pas mal d’appréhension sur la création de cette fameuse mixité sociale : est-ce qu’il allait falloir aller chercher des familles auprès de la PMI ou à l’inverse des expatriés ? Mais cela s’est fait naturellement. C’est remarquable tant sur la mixité sociale que culturelle. Il y a eu des demandes sur tous les tarifs avec beaucoup de demandeurs d’emplois et des métiers liés à la manutention. En fin de compte, ce qui relie tous les parents reste la manière de mieux accompagner leurs enfants. Nous avons aussi beaucoup communiqué sur les réseaux sociaux et c’est surement grâce à cela que nous avons une telle mixité sociale, à l’image des groupes Facebook dédiés à la parentalité par exemple.

Quel est le profil sociologique des familles ?

Un tout premier cercle est constitué de jeunes femmes entre 25 et 35 ans qui ont eu un premier enfant et s’intéressent à la Communication Non Violente. Un deuxième cercle regroupe plutôt les profils d’indépendants comme des papas coworkers qui avaient choisi de rester à la maison pour élever leur première enfant. Un troisième cercle se dessine autour de personnes ayant fait le choix de l’instruction en famille mais qui se rendent compte qu’en termes de socialisation, c’est compliqué. Ils s’intéressent à l’école à mi-temps ou aux ateliers périscolaires. Enfin, il y a le bouche à oreille, les expatriés qui reviennent en cours d’année ou encore des personnes qui sont intéressés par Montessori mais n’ont pas les moyens pour une école Montessori.

Quels sont les critères de sélection ?

L’âge, le genre, les finances des parents pour la mixité sociale et le lieu d’habitation. Nous travaillons sur le bien-être de l’enfant, notamment le respect de son rythme et de pouvoir passer du temps avec ses parents en sortant tôt de l’école, cela n’aurait pas de sens d’accepter des familles habitant à une heure de l’école ! Enfin, nous tenons compte de la motivation des parents : entre ceux qui écrivent une phrase et ceux qui font un roman, entre ceux pour qui cette école est une opportunité d’organisation vie-travail, et ceux qui ont le sentiment qu’elle va répondre à des problèmes repérés avec leur enfant, à leurs attentes en matière d’éducation.

Avez-vous été surprises par des demandes d’inscription ?

l’éducation des enfants est un enjeu fort pour toutes les familles,

Héléna H. : Oui ! Nous n’avions pas anticipé les demandes de familles choisissant de ne pas scolariser leurs enfants mais intéressées par un schéma d’école à la carte : l’enfant dort le matin, donc il ira à l’école l’après-midi, mais, comme le mardi et le jeudi, il a des activités, il ne pourra venir que le lundi et le vendredi. Mais l’école ne marche pas comme ça ! Nous essayons de remettre un cadre tout en gardant de la souplesse. C’est essentiellement ça.

Cécile D. : J’ai été étonnée par la diversité des motivations et des problématiques familiales : femmes seules, divorcées, familles éclatées, fratrie, perte d’emploi… Au-delà de ces particularités, l’éducation des enfants est un enjeu fort pour toutes les familles, ainsi que la recherche de sens et de soutien dans le quotidien.

Quelle est votre position face à des demandes d’accommodement religieux ?

La laïcité, c’est aussi la capacité à accepter tout le monde ​​​​​​​

Ce n’est pas une question qui a été débattue au sein de l’équipe. Je pense que cela coule de source pour nous tous que notre modèle est celui de l’école laïque publique. La religion n’a pas lieu d’être dans la classe si ce n’est sur les temps philo. Mais pour les intervenants, la question mériterait d’être posée. La laïcité, c’est aussi la capacité à accepter tout le monde

Quelles sont vos principales difficultés et contraintes ?

la démarche immobilière est un vrai métier et ce n’est pas le nôtre

Le démarrage au niveau du local est primordial et représente généralement un coût important. Sur Lyon, c’est très compliqué de trouver des espaces adaptables aux enfants avec des jardins à proximité. Au départ, nous avons recherché un local par nous-mêmes. Mais la démarche immobilière est un vrai métier et ce n’est pas le nôtre. Louer auprès d’une régie, payer un architecte pour les mises aux normes, etc., il y a de quoi se casser la figure tout de suite ! C’est pourquoi nous privilégions les partenariats avec d’autres structures comme Hévéa, la SNCF ou encore Bouygues Immobilier avec qui nous travaillons sur la recherche de local, l’optimisation du loyer, les ressources et la part d’investissement. L’idée est que l’école ne supporte que ses frais de fonctionnement.

Comment envisagez-vous l’avenir ? Passer sous contrat avec l’Etat est-il un objectif ou voulez-vous plutôt proposer un modèle alternatif au système public ?

maintenir ce dialogue avec l’Education Nationale est très important pour nous.

Nous gardons ouvert la possibilité d’une contractualisation puisque nous suivons le socle commun des compétences. Tout dépendra de si cela nous oblige à renoncer à des points pédagogiques validés, de notre équilibre économique, de ce que cela peut nous apporter. De toute façon, il faut avoir 5 années d’activité, nous avons le temps. Dans tous les cas, maintenir ce dialogue avec l’Education Nationale est très important pour nous. Cela a motivé en partie notre choix de recruter des éducatrices issues de l’Education nationale et qui ont la volonté d’y retourner pour essaimer les pratiques développées ici. Pour avoir un impact, il faut infiltrer le système public, comme le travail de Cécilia Alvarez ! A l’avenir, nous aimerions aussi développer une structure en milieu rural parce que le meilleur cadre pour les enfants reste la campagne et que le travail à distance se développe aussi là. Nous avons un projet en cours avec la SNCF qui rénoverait un ancien bâtiment dans une zone à revitaliser. L’espace proposerait une crèche, une école et du coworking. C’est un de nos avantages : le lien public-privé est réel pour nous. Nous ne craignons pas de nous associer à des grands comptes pour trouver des solutions pérennes et avec un potentiel d’essaimage. Si notre modèle est bon, notre ambition et notre mission est de toucher le maximum d’enfants, pas de s’arrêter à une ou deux écoles !