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Frédérique Jacob, géographe : « La propreté peut être regardée comme un rapport au monde en ce qu’elle est éminemment culturelle et civilisationnelle »

Interview de Frédérique Jacob

Photo de Frédérique Jacob
Maitresse de conférences en géographie à l'Université de Lille

Frédérique Jacob est maitresse de conférences en géographie à l’Université de Lille (INSPE Lille Hauts-de-France, laboratoire CIREL, équipe Théodile) et autrice d’une thèse soutenue en 2006 sur la propreté dans les villes méditerranéennes. Ses travaux de recherche s’intéressent à la formation-information, à tous les âges de la vie, à la compréhension des enjeux spatiaux et territoriaux.

Elle développe une approche originale de la propreté. Pour Frédérique Jacob, s’intéresser à la propreté d’une ville, c’est s’intéresser aux représentations et aux normes sociales, et même aux valeurs qui ont cours, mais aussi aux liens entre les habitants et au rapport que ceux-ci entretiennent avec leur ville et ses espaces. Dans cet entretien, elle revient sur la complexité et la richesse du concept de propreté urbaine pour appréhender un territoire. Elle partage également des approches et leviers qui lui semblent prometteurs pour travailler collectivement sur la propreté urbaine.

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Date : 28/10/2023

Comment, en tant que géographe, considérez-vous la propreté urbaine ? Quel regard spécifique la géographie peut-elle poser sur le concept de propreté ?

La propreté révèle (comme le paysage) la relation réciproque entre les lieux et les hommes-habitants qui les fréquentent. Cette représentation d‘un lieu propre est personnelle, spécifique à chacun. On n’est pas gêné par les mêmes choses en fonction des lieux que l’on habite ou pas

C’est par le biais de la géographie du paysage que je me suis intéressée au concept de propreté. Personne en géographie n’avait vraiment étudié la propreté urbaine. Je suis partie de la théorie de la théorie de l’ « artialisation » d’Alain Roger selon laquelle l‘art éduque notre regard et participe de la construction de nos perceptions. C’est l’observateur qui prime sur l’observé. Mais, les relations sont, aussi, au sens d’Augustin Berque « trajectives » : l’observation est une interrelation.

Ceci a guidé ma façon de considérer la propreté qui pourrait être une forme de corollaire du paysage. J’en retire l’idée qu’on ne voit que ce que notre société nous donne à percevoir. La propreté révèle (comme le paysage) la relation réciproque entre les lieux et les hommes-habitants qui les fréquentent. Elle est située, mésologique, puisque chaque rapport au monde est une réalité singulière.

Cette représentation d‘un lieu propre est personnelle, spécifique à chacun. On n’est pas gêné par les mêmes choses en fonction des lieux que l’on habite ou pas.

La propreté peut être regardée comme un mythe voire comme un rapport au monde en ce qu’elle est éminemment culturelle et civilisationnelle. Les critères de propreté sont variables selon les espaces et les époques. En Alsace par exemple, les habitants ont un rapport à la propreté urbaine bien spécifique, façonné notamment par l’existence d’une forte pression sociale, comme en Suisse. La Suisse a d’ailleurs pratiquement érigé la propreté comme une valeur civilisationnelle. Les Suisses ont construit l’image d’un pays propre, au travers d’un choix politique marqué, lié à l’attractivité touristique notamment.

Il est essentiel, pour appréhender la propreté, de partir des représentations des gens, des normes qui ont cours, et ce à différentes échelles. Or on ne prend pas suffisamment en compte aujourd’hui ces représentations et ces normes.

Comment définiriez-vous la propreté urbaine ?

J’ai pour habitude d’expliquer que la propreté se définit aussi par ses attributs, soit les notions afférentes d’urbanité, de spatialité, de territorialité et d’altérité

Le problème de la propreté, c’est qu’il s’agit d’un concept. Il n’y a pas suffisamment eu de travaux de définition de la propreté, ce qui confirme qu’il s’agit bien d’un concept en construction, qu’il faut penser comme un outil d’explications. On parle de la propreté comme étant l’inverse de la saleté. Pour la géographe que je suis, la propreté est un jeu de limites, elle détermine des actes et produit des espaces. J’ai pour habitude d’expliquer que la propreté se définit aussi par ses attributs, soit les notions afférentes d’urbanité, de spatialité, de territorialité et d’altérité.

S’agissant de l’urbanité tout d’abord : ce qui est intéressant c’est de positionner la propreté dans le rapport ville / campagne. Avec les règles de l’hygiénisme, la ville bourgeoise a été voulue comme propre par opposition à la campagne sale. Ces représentations ont perduré longtemps dans nos systèmes de pensées même si tout ça semble s’inverser peu à peu. La campagne associée au végétal et à la nature est bien davantage valorisée tandis que la ville est bien plus souvent considérée comme sale.

La spatialité est essentielle aussi pour appréhender la propreté : est-ce que l’on doit traiter tous les espaces de la ville de la même manière en matière de nettoiement ? On constate, de fait, que tous les lieux ne sont pas traités de la même manière. Il y a par exemple certains espaces qui ont une fonction de vitrine de la ville qui sont très bien tenus. C’est une façon pour les élus de montrer qu’ils ont une bonne gestion de la propreté dans leur ville.

La territorialité nous permet d’éclairer encore une autre facette de la propreté relative aux représentations que l’on se fait des espaces et du degré d’appropriation qu’on a vis-à-vis de ces espaces. Son espace à soi est toujours plus propre que celui de l’autre. On tend à avoir des pratiques relatives à la propreté différentes en fonction des représentations qu’on se fait des lieux où l’on se trouve.

Enfin, le concept d’altérité nous rappelle que la propreté est toujours liée aux rapports que l’on entretient avec les autres. C’est souvent l’autre qui est sale. D’autres notions liées aux façons de vivre ensemble sont aussi associées à la propreté : la sécurité, la discipline, le respect, etc. C’est quelque chose que l’on voit bien dans les pays dictatoriaux. On avait interrogé un homme à Séville sur l’état de propreté de sa ville, qui disait, sous le regard courroucé de son épouse, que du temps de Franco, c’était mieux car c’était beaucoup plus propre.

Vous dites dans votre thèse que « le concept de propreté est relatif et fictif ». Cela signifie-t-il qu’il est impossible de mesurer l’état de propreté d’un espace ?

Il me semble essentiel de développer une approche qualitative de la propreté, plus fine et complète qu’une approche quantitative, mais à ma connaissance cela n’a jamais vraiment été fait et systématisé

Pour comprendre où se situe cette frontière entre le « propre » et le « sale » et, in fine, « mesurer la propreté », il faudrait faire un état des lieux des représentations des populations concernées, soit établir une liste des critères qualitatifs de l’état de propreté d’une ville. C’est quelque chose qu’on pourrait faire à Lyon si on le souhaitait, en s’inspirant des 38 critères que j’avais établis pour repérer des quartiers avec des états de propreté différents. Il me semble essentiel de développer une approche qualitative de la propreté, plus fine et complète qu’une approche quantitative, mais à ma connaissance cela n’a jamais vraiment été fait et systématisé.

D’autres approches sont développées, comme celle de l’Association des Villes pour la Propreté Urbaine (AVPU) qui a établi une grille des Indicateurs Objectifs de Propretés, « IOP ». Celle-ci mesure, de façon quantitative, les différents éléments qui participent de l’état de propreté et permet de les classer selon la façon dont ils affectent les usagers de l’espace public. Cela a l’avantage de pouvoir faire des comparaisons dans le temps et dans l’espace. Dans une optique technicienne, c’est efficace, mais ce type d’approche comporte des limites importantes. J’avoue douter de ce que cela mesure réellement : l’état de propreté à un instant t ? L’état idéal de propreté d’une ville, sachant qu’il sera très variable selon les personnes ? Beaucoup d’éléments peuvent rentrer en ligne de compte dans notre appréhension de la propreté, rien que la couleur noire de l’enrobée peut influer sur nos perceptions. La propreté n’est pas quantifiable pour moi, c’est quelque chose de trop subjectif.

 

Approche qualitative et comparative de la propreté urbaine à Marseille, Séville et Fès. Chaque couleur correspond à un critère (papiers jetés au sol, absence de ramassage de poubelle, vétusté, odeurs, etc.) et chaque colonne correspond à un individu. L’étude menée conclut au fait que « la perception de l’état de propreté est fonction de l’éducation, des sens, de la culture » de la personne.© F. Jacob

 

Que dit l’état de propreté d’une ville des rapports entre les habitants d’une part, et des rapports que les habitants entretiennent avec l’espace urbain d’autre part ?

Si la propreté est une valeur qui doit être commune à tous, qu’est-ce qu’on peut mettre en jeu pour qu’elle soit partagée et non qu’elle divise ? Ça n’est pas en démultipliant les effets d’annonce ni même les dispositifs de collecte et de nettoiement que l’on va régler les problèmes. Il s’agit de comprendre pourquoi les gens jettent des détritus et salissent l’espace public. Il y a forcément une question de valeur que l’on attribue au lieu qui est à prendre en considération

Le sale, c’est avant tout l’autre. La notion d’altérité est essentielle à considérer. Or, on est très vite renvoyé, lorsqu’on parle de propreté, à l’incivilité voire à l’insécurité. Il me semble qu’il faut se méfier des discours qui exacerberaient l’incivilité car ils peuvent s’accompagner d’une forme de rejet de l’autre. L’enjeu majeur de la propreté, c’est bien le rapport des gens entre eux, le rapport à l’autre. Si la propreté est une valeur qui doit être commune à tous, qu’est-ce qu’on peut mettre en jeu pour qu’elle soit partagée et non qu’elle divise ?

Cela fait nécessairement réfléchir aussi à ce que l’on met derrière la notion d’« espace public ». Est-ce que l’espace public est à personne ou à tout le monde ? Si c’est à tout le monde, alors chacun est concerné. S’il n’appartient à personne, chacun fait comme il l’entend. Comment peut-on alors dépasser le fait que si l’autre jette quelque chose sur l’espace public, il ne faut pas pour autant qu’on le fasse de notre côté ?

Les villes communiquent sur le fait qu’elles font beaucoup en matière de propreté, elles montrent leurs machines, les agents mobilisés, etc. Or ces discours ont, me semble-t-il, des effets pervers. Ils peuvent, à l’inverse de l’effet attendu, amener à pointer encore plus fortement ce qui reste sale, renforçant l’idée d’incivilité, la méfiance et le rejet de l’autre. Ils tendent aussi à faire peser le poids de la saleté sur les citoyens en montrant que la ville fait sa part. Je ne suis pas certaine que l’histoire du colibri « chacun doit faire sa part, moi j’agis » fonctionne ici pour inciter chacun à se comporter de telle façon. Visiblement, cela n’a pas l’efficacité voulue en tout cas. Ça n’est pas en démultipliant les effets d’annonce ni même les dispositifs de collecte et de nettoiement que l’on va régler les problèmes. Il s’agit de comprendre pourquoi les gens jettent des détritus et salissent l’espace public. Il y a forcément une question de valeur que l’on attribue au lieu qui est à prendre en considération.

 

Propreté : législatif, esthétique, sociale, culturelle sociétale, hygiène, politique, technique, économique = différence entre ce qui rentre dans le connu, le factuel, et le perçu, le sensible
La propreté : un concept complexe et polysémique© F. Jacob

 

Pouvez-vous nous en dire plus sur cette notion de valeurs différenciées associées à des lieux ? Qu’est-ce que cela implique ?

On ne se comporte pas de la même manière en fonction de la valeur que l’on attribue aux lieux. Nos pratiques en matière de propreté sont ainsi liées à notre représentation et à notre rapport à l’espace considéré, mais aussi plus largement conditionnées par la civilisation dans laquelle on s’inscrit, à notre éducation et aux normes que l’on a intégrées, etc

Il y a des espaces de la ville que l’on ne fréquente pas mais pour lesquels on a tout de même des représentations de l’état de propreté. Ainsi, les quartiers riches sont réputés propres et les quartiers pauvres sont représentés comme étant sales. Ces représentations et, derrière, la valeur que l’on attribue à l’espace, vont avoir une incidence sur nos pratiques. Dans mon quartier, je ne vais pas jeter de choses par terre, mais dans un quartier que je considère comme sale, je vais être davantage tenté de jeter des détritus.

On a donc des pratiques spatiales différentes en fonction de la représentation qu’on a de la propreté du lieu. C’est valable aussi à l’échelle de son logement : le petit coin caché de mon canapé, je peux y mettre mon mouchoir en attendant d’aller le jeter, mais je ne vais pas le laisser en plein milieu de mon canapé. À toutes les échelles, nos pratiques sont fortement spatialisées. On ne se comporte pas de la même manière en fonction de la valeur que l’on attribue aux lieux. Nos pratiques en matière de propreté sont ainsi liées à notre représentation et à notre rapport à l’espace considéré, mais aussi plus largement conditionnées par la civilisation dans laquelle on s’inscrit, à notre éducation et aux normes que l’on a intégrées, etc. Tout cela rend la question de la propreté bien plus complexe qu’un sujet technique ou même purement comportemental.

Il est aussi marquant de voir comment les normes évoluent, parfois très rapidement, et peuvent être relatives à un contexte bien spécifique. Pendant la crise de la Covid-19, on avait peur de l’autre ou de la Covid-19 en général et on a modifié profondément nos façons de vivre. Ce qui est marquant, c’est la rapidité avec laquelle on a abandonné les normes alors mises en place. La distanciation et les gestes barrières mis en place à l’époque m’évoquent la notion de « dimension cachée » d’Edward T. Hall qui correspond à l’espace nécessaire à l’équilibre de tout être vivant. Cette dimension est biologique, physique, mais aussi culturelle. Cette notion me semble très intéressante pour aborder le vivre ensemble et le rapport à l’espace urbain.

Vous avez largement abordé la question de la gouvernance en matière de propreté dans votre thèse. Quels sont les enjeux de gouvernance les plus saillants d’après vous ?

Les décisions relatives à la propreté urbaine sont des décisions qui peuvent être très descendantes et abordées d’un point de vue essentiellement technique. On essaie d’associer les populations mais cela reste très marginal. Je ne suis pas sûre que dans ce type de domaine, les élus soient prêts à co-décider

La question des modes de gouvernance et de prise de décision en matière de propreté se pose nécessairement. C’est un vrai choix politique de la part des élus. Souvent, on met beaucoup d’argent dans la gestion de la propreté urbaine pour des résultats qui ne paraissent pas très concluants. C’est aussi associé à un enjeu électoral. Les décisions relatives à la propreté urbaine sont des décisions qui peuvent être très descendantes et abordées d’un point de vue essentiellement technique.

On essaie d’associer les populations mais cela reste très marginal. Je ne suis pas sûre que dans ce type de domaine, les élus soient prêts à co-décider. L’enjeu principal serait pourtant celui-ci. On peut se questionner sur les modes de faire qui pourraient permettre d’associer les habitants aux enjeux de propreté, comme des budgets participatifs par exemple, des formes de soutien aux associations qui promeuvent la citoyenneté par exemple. On pourrait aussi envisager de mener un inventaire des initiatives et projets portés par des acteurs locaux en matière de propreté pour voir comment la société civile prend en charge ces enjeux. Je pense aussi que la parole des jeunes pourrait être davantage prise en compte en la matière. On pourrait compléter et enrichir des approches quantitatives de la propreté par le regard de jeunes et même d’enfants pour qualifier différents espaces urbains, repérer des critères sous-jacents à la propreté, etc.

Au-delà d’une approche plus ascendante, il y a aussi un enjeu de faire en sorte que le collectif l’emporte sur l’individuel. En France, on a longtemps pensé notre société comme une société collective. Mais j’ai l’impression qu’aujourd’hui, on est en train d’entrer dans un monde plus individuel voire communautariste. Est-ce que la prise de décision doit se faire pour le collectif ou est-ce qu’il faut changer de paradigme ?

Quels sont pour vous les principaux leviers à activer pour travailler sur ces enjeux de propreté urbaine ?

Le fait d’associer les gens autour d’un projet commun, de développer les liens sociaux, a donné beaucoup de valeur aux espaces qui sont, par conséquent, davantage respectés

Le vivre ensemble est vraiment un élément clé pour appréhender la propreté. La propreté, c’est un support du vivre ensemble pour moi. Derrière cette notion, il y a la question des normes que l’on partage, ou pas, avec les autres. Au-delà des normes, on peut même parler de valeur commune. Comment fait-on pour que ces normes et ces valeurs soient partagées ? Cela passe par des dynamiques d’appropriation, par l’apprentissage, la pédagogie, mais aussi le lien social. Il a par exemple été montré que le fait de faire des jardins partagés en bas des tours à Marseille dans un quartier populaire a largement réduit le problème de saleté et de dégradation des espaces communs. Plus personne ne jette de choses par la fenêtre. Le fait d’associer les gens autour d’un projet commun, de développer les liens sociaux, a donné beaucoup de valeur aux espaces qui sont, par conséquent, davantage respectés.

L’éducation est un levier fondamental. C’est d’ailleurs un des principes de la Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement de Rio en 1992 : les populations doivent être associées à la décision, mais pour ce faire, il faut les informer et les former. Ceci est valable pour tous types d’enjeux et de défis collectifs. Pour bâtir un cadre pédagogique pertinent, il faut prendre en compte l’existence de représentations variées autour de la propreté. L’information ne peut pas être la même pour tous ; un discours commun n'a vraisemblablement pas grand intérêt. Il faut de la différenciation.

Par ailleurs, il me semble essentiel d’avoir cette approche qualitative de la propreté urbaine et de dépasser les approches très techniciennes. Ceci peut se traduire dans la formation-information à l’adresse des élus notamment. Plutôt que de parler de « propreté » d’un seul bloc, on pourrait d’ailleurs plutôt parler de « degré » ou de « seuil » de propreté.

Quand on est centré principalement sur une approche technique, on oublie aussi la notion de responsabilité qui est pourtant clé dans le maintien du « bien public » qu’est la propreté. Mais il ne faut pas tout miser non plus sur la responsabilité, qui renvoie à une approche très individuelle du problème. C’est un sujet complexe où il faut avoir une approche équilibrée, multi dimensionnelle. Plus encore que la responsabilité, la notion de « capabilité », soit la possibilité laissée aux personnes d’agir en fonction de leurs capacités personnelles, me semble très intéressante. Cela peut être un concept porteur pour penser la propreté urbaine et d’autres enjeux collectifs.

Pour finir, pouvez me parler du concept de « doudou spatial » ? Il permettrait selon vous « à tout acteur, de prendre conscience de ses pratiques et de leurs conséquences ». Quelle perspective peut-il ouvrir sur ces enjeux de propreté urbaine ?

En prenant appui sur les pratiques de propreté que les gens ont dans leur quartier (lorsque celui-ci est qualifié positivement), pourrait-on faire l’hypothèse de les transposer à d’autres espaces ?

Le doudou, c’est un objet transitionnel qui permet de passer d’un état à l’autre en faisant le lien entre les deux. Ce doudou me permet de comprendre le monde par un petit bout de mon état intérieur. Au travers de ce doudou, l’enfant reste en relation avec ses parents, son environnement familial. En prenant appui sur les pratiques de propreté que les gens ont dans leur quartier (lorsque celui-ci est qualifié positivement), pourrait-on faire l’hypothèse de les transposer à d’autres espaces ? Le doudou respecte l’individualité de l’enfant, sa spécificité, voire son unicité. Comment favoriser l’appropriation (dans sa double acception : rendre propre et faire sien) des autres espaces de la ville lorsque cohabitent des pratiques de propreté différentes ? Ainsi, quelle serait la prise en compte de la notion de limite, voire de seuil, entre intérieur et extérieur dans l’analyse des pratiques ? Quel est impact sur l’état de propreté des bords de routes du fait du simple geste de jeter ses détritus hors de son véhicule ?

Ce serait l’exact contre-pied d’une campagne de communication menée à Grenoble il y a quelques années qui représentait un homme en train d’uriner sur un canapé et mentionnait : « Impossible chez vous ? Pareil dans la rue. » Par le doudou spatial, il serait possible de penser le passage du territoire à la place et inversement de la place au territoire selon la volonté du vivre-ensemble envisagée. La propreté : un objectif commun ou une somme de gestes individuels ? C’est là tout l’enjeu de faire société.

 

Campagne pour la propreté à Grenoble, montrant une personne urinant dans un salon, avec écrit "impossible chez vous ? Pareil dans la rue".