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La création d'entreprises via Crélys

Interview de Nadia KAMAL

Directrice de Créalys

<< Pour les laboratoires, la création d’entreprise est aujourd’hui un paragraphe du rapport d’activité, les brevets entrent dans l’évaluation du chercheur. Ce n’était pas le cas, il y a 10 ans. >>.

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Date : 27/06/2006

Propos recueillis par Marianne Chouteau – le 28 juin 2006. La création d'entreprises via Crélys dans le contexte de la loi sur l’innovation de 1999 et de la Région Rhône Alpes.
__________________________________________________________Pouvez-vous présenter Créalys et notamment son rôle et ses actions ?
Créalys est une structure créée en 1999 sous l’impulsion du ministère de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur. Ce fut un des premiers incubateurs à être labellisés. Il s’agit d’une structure d’accompagnement à la création d’entreprises dont la mission est de collaborer avec les laboratoires de recherche publique. Cela implique une condition sine qua non : tous les porteurs de projets doivent travailler en collaboration avec un laboratoire de recherche publique dans l’académie de Lyon c’est-à-dire en lien avec les laboratoires des universités et des écoles de Lyon, Saint-Etienne et Bourg en Bresse. Même si 90% des porteurs de projets sont issus de Lyon, nous avons une démarche territoriale et nous incluons les porteurs de projet issus des autres villes de l’académie. Nous sommes 3 suiveurs à Créalys. Chacun de nous s’occupe de thématiques particulières (NTIC, Chimie/Matériaux, Sciences du vivant). Il y a deux incubateurs en Rhône-Alpes. Créalys s’occupe de Rhône-Alpes Ouest tandis que GRAIN s’occupe de Rhône-Alpes Est. Quelle est votre mission ?
Nous expliquons aux chercheurs et aux enseignants-chercheurs (doctorants, post docs) que la création d’entreprise est possible et que ça l’est à partir de leur savoir faire, de leurs travaux de recherche voire des brevets qu’ils auraient pu déposer. Nous travaillons de façon très étroite avec tous les membres de l’association Créalys (les universités, les écoles d’ingénieurs et  les établissements de recherche de Lyon, Saint-Étienne et Bourg en Bresse) afin que ces derniers identifient dans leurs laboratoires des projets qui pourraient aboutir à la création d’entreprise.
Notre mission était initialement dédiée aux chercheurs et aux doctorants uniquement. Mais au fil du temps, nous avons élargi notre cible et notamment à des personnes du secteur privé qui ont un projet ou une idée et qui ont envie d’être rattachées à un laboratoire pour créer leur entreprise.
Aujourd’hui, nous en sommes à 82créations d’entreprises depuis 1999. Nous suivons en permanence environ 45 dossiers. Comment sélectionnez-vous les dossiers ?
Nous avons plusieurs phases de sélection. Nous ne recevons que les porteurs de projet qui n’ont jamais créé d’entreprise et qui ont envie de collaborer avec un laboratoire de recherche. Il est vrai que nous ne renvoyons pas les autres porteurs de projet sans explication. En général, nous les aiguillons vers d’autres structures qui pourront prendre en charge leur projet.
Ce que nous validons ensuite avec le porteur de projet est sa volonté d’entreprendre et de le faire en Rhône-Alpes. Nous rencontrons le laboratoire et si l’établissement n’est pas au courant, nous demandons à ce qu’il le soit. Le porteur signe avec l’établissement une convention sur un transfert de connaissances, de brevets. Le porteur de projet se présente ensuite à un premier comité, qui se nomme le comité exécutif. Ce dernier est constitué des représentants des cellules et des filiales de valorisation des établissements de recherche et des universités ainsi que de l’ANVAR, l’INPI et la Chambre de Commerce et d’Industrie de Lyon. A la suite de cette présentation – qui dure cinq minutes – le porteur de projet sait s’il peut entrer en phase préalable ou non. A ce stade on peut proposer de mettre en place une expertise préalable afin de lever un doute sur son dossier.
A l’issue de cette phase le porteur présente son projet au comité d’engagement. Ce dernier étant constitué d’investisseurs. A partir de là, le projet est incubé à Créalys qui l’accompagne au quotidien. Nous assurons un accompagnement personnalisé et un accompagnement financier. Créalys est financé par la Région Rhône-Alpes, le Grand Lyon, le Ministère de la Recherche et ses membres.
Les projets sortent entre 9 mois et deux ans après leur passage en premier comité de sélection. Notre objectif est de les accompagner jusqu’à ce qu’ils aient soit un investisseur potentiel soit un client potentiel. En quoi consiste votre aide circonstanciée ?
Nous la centrons essentiellement sur le projet. Dans un premier temps, nous les aidons à travailler sur la technologie, ensuite nous travaillons sur le « business plan » puis sur les contacts avec les investisseurs. Nous les formons, nous les initions sur le marketing, sur la réglementation, sur l’ensemble des aspects financiers. Notre vraie valeur ajoutée est dans l’accompagnement et dans la mise à disposition du réseau. Nous existons depuis 7 ans et nous nous sommes créés un large réseau tant au niveau académique qu’au niveau « entreprise ». C’est aussi de ça que va profiter le porteur de projet. 
La loi sur l’innovation de 1999 a maintenant 7 ans. Pensez-vous qu’il y a eu un réel mouvement de création d’entreprises dans ce contexte-là ?
Il y a eu un récent rapport édité par le ministère en juin 2006 sur tout ce que les incubateurs ont pu apporter. Il est clair que l’on s’attendait à plus de création d’entreprises de la part des chercheurs. Mais, cette loi a créé un contexte très favorable. Une association comme Créalys a permis l’émergence de 82 entreprises. C’est déjà un résultat non négligeable.
Cette loi a assuré un soutien et cela a facilité la prise de risque pour les chercheurs. L’objet n’est pas de vider les laboratoires de recherche mais de mettre en valeur leur travail de recherche.
C’est une mesure favorable et l’essentiel est de pouvoir transférer le savoir faire, les connaissances de la recherche fondamentale vers l’extérieur. Les entreprises créées sont, de plus, souvent des entreprises à haute technologie. Ce sont des entreprises innovantes qui embauchent des jeunes docteurs. Etant donnée la situation difficile des jeunes docteurs, cela est loin d’être négligeable.
De plus, cette loi a permis un rapprochement entre le privé et les laboratoires. Pour les laboratoires, la création d’entreprise est aujourd’hui un paragraphe du rapport d’activité, les brevets entrent dans l’évaluation du chercheur. Ce n’était pas le cas, il y a 10 ans. Peu à peu les choses évoluent. Quelle est la taille moyenne de ces entreprises ?
En général, ces entreprises ont 5 à 10 personnes. Il y en a une sur la région qui a embauché une centaine de personnes. C’est un cas unique. Mais il suffit d’une pour dynamiser toute une région, tout un secteur. Que pensez-vous de la re-structuration engagée au niveau de la région en matière de recherche : création des pôles de compétitivité, des clusters de recherche, etc.
Créalys est l’outil de création d’entreprises en collaboration avec les laboratoires de recherche  « pour tout le monde » que le porteur de projet fasse partie d’un pôle, d’un cluster ou non. Créalys est un outil généraliste.
Est-ce que cette restructuration va permettre d’augmenter la création d’entreprises ? Aujourd’hui, je n’ai aucune certitude. Cancéropole et Génopôle auraient du m’apporter des dossiers hors aujourd’hui je n’ai rien reçu ni de l’un ni de l’autre.
Mais toutes ces initiatives restent bonnes car elles permettent de rassembler les gens, de les faire échanger et de dynamiser un territoire.______________________________________________________________________