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L'art de la conciliation à la lyonnaise

Interview de Jean-Pierre ALDEGUER

<< Habitat & Humanisme s’est créé à Lyon, parce qu’à Lyon depuis tout temps, le monde chrétien, le monde non chrétien, le monde économique, le monde social, les gens de droite, de gauche ont eu l’habitude de travailler ensemble >>.

Comment travailler ensemble au niveau d'une agglomération, par-delà les  divergences d'opinion ou de points de vue ? Fort de son expérience dans les milieux de l'urbanisme et du logement des plus démunis, Jean-Pierre Aldeguer, directeur de la Fédération Habitat & Humanisme, ancien directeur adjoint de l’Agence d’urbanisme de la région lyonnaise livre un éclairage sur une certaine capacité lyonnaise à dépasser les différends pour avancer sur des dossiers difficiles. Mythe ou réalité, cet "art de la conciliation", qui s'incarne notamment dans les liens entre mondes militants et milieux économiques, a porté ses   fruits dans de nombreux domaines sur la scène locale. Serait-il aujourd'hui en voie d'affaiblissement ? Si oui, comment le revivifier ? Réflexions sur le recours au symbolique comme moyen de renouveler "ce  qui fait communion" dans la ville.

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Date : 13/04/2006

Nombre de personnes qui ont vécu ou travaillé à Lyon estiment que la ville se distingue par un « esprit de conciliation » qui faciliterait la prise de décision sur certains sujets d’intérêt général. Qu’en pensez-vous ?

J’ai le sentiment, n’étant pas du milieu lyonnais de par mes origines, que cette idée fonctionne un peu comme un mythe. Comme dans tout mythe, il y a certainement des éléments de réalité, qui renvoient à une histoire. Mais il y a aussi un discours, créé par les uns et les autres, et qui permet de se servir du mythe. Lorsque j’étais Directeur adjoint de l’Agence d’Urbanisme, je fréquentais les élus, et je voyais qu’ils s’y référaient. Ils se référaient par exemple à « la Résistance » ou à « la bourgeoisie lyonnaise » comme à un cadre, des règles, des habitudes qui organisaient relations et conciliations. Et je note aujourd’hui, puisque j’évolue dans un milieu chrétien, que l’on se réfère aussi à  « l’Eglise ». Il y a comme cela des éléments de l’histoire locale, dont on parle même si on ne les connaît pas très bien, et qui sont là comme une représentation du vivre ou du faire ensemble, qui perdurent ou que l’on voudrait voir perdurer.

 

Mais comment ces éléments d’histoire influent-ils sur l’art de travailler ensemble ?

Pour en revenir à l’histoire de la Résistance, on voit bien comment celle-ci, qui avait permis à des hommes d’agir ensemble, avait aussi contribué à ce que des réseaux se créent ; des réseaux qui dépassaient les oppositions politiques ou idéologiques. J’ai travaillé par exemple avec M. Béraudier, qui fut l’adjoint de Louis Pradel, puis de Francisque Collomb, qui a eu des responsabilités importantes à la Ville de Lyon, à la Courly1 , à la SERL2  où il a dirigé politiquement les opérations de la Part Dieu, à Lyon Parc Auto, dont il a été président...  Le « Maire bis », comme on l’appelait, l’homme de l’ombre qui décidait de tout. Bien que n’ayant pas les mêmes opinions politiques que lui, j’ai été très marqué par cet homme. Je voyais très concrètement comment son engagement dans la Résistance permettait qu’il s’ouvre et accepte  des points de vue différents. Il entretenait des relations très fortes avec des personnes liées à ce passé, comme Charles Hernu à Villeurbanne ou le Docteur Dugoujon, Maire de Caluire et Député du Rhône. C’est sans doute ce qui l’a amené à être ensuite Président de la Région, en 1981. Aujourd’hui, à Lyon, les personnes impliquées dans cette histoire de la Résistance ne sont plus au pouvoir. Mais des éléments de réalité se sont formés. Ces histoires sont en partie oubliées, mais au-delà des hommes, elles demeurent comme un mythe.

 

Est-ce une particularité lyonnaise ?

Concernant l’impact de la Résistance, j’ai constaté la même chose en Haute-Savoie. Mais pour avoir travaillé dans d’autres agglomérations, je remarque que si partout ce genre de mythe existe effectivement, il ne se traduit pas forcément par un esprit de conciliation. Dans certaines régions, au contraire, le «mythe » peut exprimer la tension ou l’affrontement. En Limousin, par exemple, c’est frappant. À Limoges, on trouve d’un côté le mythe laïc ouvriériste et de l’autre le mythe chrétien et bourgeois. Jamais ces histoires ne se sont rencontrées et aujourd’hui, forcément, si l’on est de gauche, on est laïc, et si l’on est chrétien, on est de droite. Cela imprègne fortement les mentalités. Et cela joue dans la gestion des projets…

 

Pouvez-vous donner des exemples, dans l’histoire récente de l’agglomération, de domaines d’action dans lesquels ce « savoir-faire ensemble » a joué ?

On pourrait parler de l’Agence d’Urbanisme, lors de sa création en 1977 ou dans les années 80, du temps de Jean Frebault, lorsque s’est reposée la question du schéma directeur et que l’Agence a lancé un débat pour penser « Lyon 2010 ». Il s’agissait de convoquer tout le monde à réfléchir ensemble, faire s’exprimer les différences de points de vue, écouter, traduire…, avec un objectif contractuel clair : établir le schéma directeur de  l’agglomération. La dynamique insufflée à ce moment-là a été très profitable : elle a permis d’impliquer le milieu économique, les milieux des urbanistes, des architectes, des aménageurs, autour d’enjeux politiques et techniques. Sur le projet urbain, je crois que cela a été un grand moment, qui fait qu’aujourd’hui encore, un certain nombre de personnes continuent de se réunir. Des gens aussi différents que Maurice Charrier, Guy Fischer, Bernard  Rivalta, Jacques Moulinier… Et ces réseaux, cet esprit de conciliation sont ensuite utilisés ailleurs, sur d’autres thèmes : on va s’y référer pour exprimer le fait que sur tel ou tel sujet, il faut être conciliant…, puisque l’on est Lyonnais et que cet esprit a de tout temps existé !
Dans le monde économique, je pense aussi à la création, en 1974, de l’Aderly3 , qui a été une initiative assez innovante. Il s’agissait de faire agir ensemble le patronat lyonnais, la Communauté Urbaine de Lyon et la Chambre de Commerce et d’Industrie. Une personnalité comme Jean Chemain, qui en fut l’initiateur, a eu un rôle très important pour dépasser certains blocages. Par exemple lorsqu’il a fallu déménager la Foire de Lyon et en faire un vrai salon professionnel, avec tous les commerçants de l’époque… De même sur l’aéroport Lyon Saint-Exupéry, et sur un certain nombre de grands dossiers de ce genre.

 

Ces savoir-faire sont-ils toujours à l’œuvre dans les projets d’aménagement urbain en cours ?

Je pense que les choses ont changé depuis quelques années. Au vu des différents échanges que j’ai avec le réseau des professionnels de  l’aménagement sur Lyon, il me semble qu’aujourd’hui les élus, quels qu’ils soient, se mettent directement en première ligne. Ce sont eux et leurs cabinets qui fixent les orientations, non seulement politiques mais aussi urbanistiques, architecturales… La concertation réelle des acteurs économiques ou sociaux sur le programme, qui était mise en œuvre par les instances techniques, se fait de moins en moins. Personnellement, je crois que les élus sont forts quand ils laissent se développer le débat, en particulier via les appareils de médiation que sont les instances techniques ou associatives.

 

Cette « culture de la conciliation » serait-elle en train de s’affaiblir ?

Je ne sais pas si c’est une culture. Je préfère la notion de mythe. Peut-être celui-ci est–il plus ou moins vivant selon les périodes. Un mythe doit sans cesse être régénéré pour demeurer actif. De fait, je pense que la réalité change sur l’agglomération lyonnaise. Certaines choses ne se passent pas comme ce modèle de la conciliation pouvait le laisser penser. Dans le secteur de l’insertion par le logement, par exemple, Habitat & Humanisme a beaucoup utilisé ces valeurs issues du passé lyonnais, en se référant à une période où le patronat chrétien jouait un rôle important dans le domaine du logement. Les collecteurs du 1 % patronal étaient tous partie prenante de cette histoire, ce qui a permis un certain nombre d’innovations autour du logement très social. La création de l’ALPIL4 , par exemple, est le fruit de ce contexte particulier. L’association est née d’un réseau de militants dans lequel intervenaient la Cimade, avec des personnes comme Michel Rouge, André Gachet… Ils avaient convaincu Bernard Lacoin, ancien directeur financier chez Berliet, qui avait des responsabilités au 1% patronal et qui était cousin par alliance de Maître Chaine, vice-président du Conseil Général. C’est ainsi que la création de l’ALPIL, association militant pour le logement des immigrés, a été soutenue financièrement par le Conseil Général et par le 1 % patronal, et que  Bernard Lacoin, issu du milieu bourgeois lyonnais en est devenu le premier président. Voilà un très bon exemple de cette logique de l’union. Cet esprit a aussi présidé à la création d’Habitat & Humanisme : les collecteurs du 1% patronal se sont énormément investis au départ. Mais je suis frappé de l’évolution récente de certains de ces collecteurs, suite à la disparition ou au départ à la retraite de représentants du patronat chrétien. Ils sont remplacés par une « technocratie patronale », des personnes qui arrivent sans porter cette culture lyonnaise, ce mythe de la conciliation, qui ne se réfèrent plus du tout à ce passé et qui défendent au contraire des objectifs à la mode : la rationalité, la rentabilité des capitaux investis, etc. Pour ces personnes-là, l’histoire lyonnaise est oubliée, considérée comme un passé révolu.
 
 

Le mythe ne résisterait pas aux mobilités qui marquent les mondes urbains d’aujourd’hui ?

Je pense que comme tout mythe unificateur, s’il n’est pas géré, nourri, les gens nouveaux qui arrivent ne se l’approprient pas forcément. Il faut le régénérer. Et pour cela, il faut trouver les lieux…

 

À quels lieux peut-on penser, dans lesquels s’actualiserait cet art d’agir ensemble ?

Le Conseil de Développement de l’agglomération lyonnaise peut être un lieu de ce genre. Cette instance permet à des gens d’origines différentes de se rencontrer, d’échanger, sans qu’il y ait un enjeu de pouvoir. Des liens se tissent au-delà de ce qui sépare… Moi qui suis impliqué dans le soutien des familles demandeurs d’asile, j’arrive à mobiliser par ce biais des personnes qui ne sont pas des défenseurs traditionnels de cette cause : des personnes de droite, de la bourgeoisie, qui se permettent d’écrire à des députés de leurs tendances, etc. Ainsi, les dossiers prennent une autre tournure : ce ne sont pas simplement des militants de gauche qui revendiquent, c’est en quelque sorte tout Lyon qui se mobilise pour une cause humanitaire…

 

Et du côté des ONG ? Lyon semble une plateforme particulière du point de vue de leur installation et de leur développement. Est-ce que cela a quelque chose à voir avec cet esprit local ?

Ce qui est particulier ici, c’est le lien entre des réflexions sur la solidarité — et en la matière le monde chrétien joue un rôle important — et des entreprises ; la conjonction entre des mondes militants, une personnalité forte et des milieux économiques. On peut penser à Mérieux avec son institut Bioforce, ou à la personnalité d’Alain Michel, qui avait fondé Equilibre ; à Olivier Brachet et à la réussite de Forum Réfugiés ; ou au rôle qu’a joué Anne Lichtenberger, de la Fonda, dans l’animation du réseau associatif autour de la question du logement dans l’agglomération. Ou encore à ce qu’est en train de réaliser Aralis, l’ex-Maison du travailleur étranger, avec le Forum Traces en Rhône-Alpes.

 

Cette notion de conciliation est-elle présente dans les réflexions et l’action d’Habitat & Humanisme (H&H) ?

Oui, bien sûr, elle est utilisée fortement, comme un mythe : Habitat & Humanisme s’est créé à Lyon, parce qu’à Lyon depuis tout temps, le monde chrétien, le monde non chrétien, le monde économique, le monde social, les gens de droite, de gauche… ont eu l’habitude de travailler ensemble, d’échanger. Dans la maison, on le dit constamment, on l’écrit, on le porte… Lors de sa création, en 1985, l’association a bénéficié d’un appui de l’Église. Mais dès cette époque-là, pour des militants comme moi, impliqués dans la question du logement des plus démunis, c’était intéressant que Bernard Devert se présente comme un entrepreneur et dise « On va créer une SCI ». Lui-même est nourri de toute cette histoire lyonnaise, par de multiples entrées : sa famille, son quartier (Ainay), son positionnement politique, ses liens avec le monde économique… Cette implication des milieux économiques, c’est la grande force d’H&H par rapport à d’autres mouvements associatifs. Aujourd’hui, avec la fédération, cela dépasse Lyon : à l’échelle nationale, il y a des adhérents de toutes tendances politiques exceptées les extrêmes, et bien sûr pas mal de représentants de la bourgeoisie libérale. Certains sont opposés aux manifestations de rue, mais ils ne démissionnent pas pour autant lorsqu’on en organise une. D’autres veulent bien travailler avec les habitants, mais seulement si le Maire est d’accord : on ne travaille pas contre le Maire, contre le Préfet… Nous avons des tensions importantes parfois au sein du mouvement. Et au-delà de nos différences, c’est Bernard Devert qui nous rassemble tous, finalement.

 

Quid du mot « humanisme » ? Qu’entend-on par là, à H&H ?

Il a été choisi, très clairement, en référence à Économie et Humanisme. C’était une manière de se placer dans la même filiation spirituelle, celle du Père Lebret, du catholicisme social, etc.  Nous n’avons pas de lien institutionnel avec E&H, mais il y a des liens entre personnes. Beaucoup des fondateurs d’H&H étaient des gens qui soutenaient les Dominicains, ou étaient inspirés par leurs réflexions, par le rôle important qu’ils ont joué à Lyon, dans la pensée sociale et dans un certain nombre  d’initiatives sur le projet de la ville, les liens avec le monde économique, le patronat, etc.

 

Concrètement, comment mettez-vous en œuvre cet « art de la conciliation » ?

Par rapport à d’autres mouvements, on peut dire que notre mode d’action est un peu l’antithèse de la simple dénonciation. Lorsque l’on dénonce — par exemple le fait qu’il y a trois millions de mal logés en France — on entre tout de suite dans une logique qui fait porter la responsabilité sur l’Autre. Moi qui dénonce, je m’exclus, ce n’est pas moi qui suis concerné par ce qu’il y a à faire. Je dénonce les autres, le pouvoir, l’Etat, etc. A H&H, on affirme certes que la situation n’est pas acceptable, mais que c’est à nous d’agir, parce que nous sommes nous-mêmes concernés. C’est en cela que nous sommes quelque part dans la conciliation… On ne dit jamais : « C’est à cause de ceci, cela, il faudrait que l’Etat ceci, cela… », mais « Il faut que nous… » ; c’est intéressant à mon avis.

 

Effectivement, parce que du coup, il faut le construire, ce « nous »…

Dans la charte d’H&H, il est dit qu’en s’engageant, on participe à l’action aux côtés des familles, mais aussi que l’on accepte de s’engager dans une démarche de transformation personnelle. Dans l’univers laïc, la transformation personnelle relève plutôt de l’intimité : à la limite cela ne concerne que moi, l’important est de transformer la société. Alors que dans le monde chrétien, comme dans toutes les grandes spiritualités, on accepte de reconnaître que la transformation personnelle fait aussi partie de ce qui se joue. C’est une manière de poser le « nous » que d’accepter sa propre transformation.

 

L’histoire religieuse de Lyon jouerait donc un rôle dans l’existence de ce mythe unificateur, dans la transmission de cet esprit de conciliation ?

Oui, sans doute. Personnellement je suis agnostique, mais de par mes responsabilités à H&H, je m’aperçois du rôle que peut avoir la religion — ou le fait religieux — dans la vie publique locale. Je pense à une autre agglomération, qui me semble elle aussi marquée de ce point de vue-là : il s’agit de Poitiers. Ce n’est pas un  hasard si cette ville a depuis longtemps un évêque très impliqué sur les questions sociales. De même qu’à Lyon, on se réfère souvent au Cardinal Decourtray, à Poitiers, la figure de Monseigneur Rouet est très présente dans la vie locale. Et je constate que là-bas, sur la question du logement des plus démunis, le milieu associatif et le milieu des collectivités locales se mettent autour de la table : on s’écoute, on réfléchit ensemble, etc.
Je pense que nous, les non Chrétiens, n’avons pas su porter les valeurs de l’humanisme. Même si dans les faits, aujourd’hui, les Chrétiens sont beaucoup moins nombreux, certaines valeurs perdurent de manière tout à fait fascinante, y compris dans la mémoire de personnes qui se sont éloignées pendant un temps de la religion. Je le vois par rapport à d’autres mouvements, dans lesquels on connaît une baisse de l’engagement…. Lorsque je débats avec mes collègues  de l’AVDL5 , qui organisent un mercredi par moi une petite manifestation à la Préfecture, ils se demandent comment on fait à H&H pour attirer autant de monde…

 

Qu’est-ce qui ferait défaut au monde laïc pour mobiliser aussi largement ?

Je crois que le phénomène d’engagement se nourrit à la fois du don (de soi, de temps, d’argent, etc) des adhérents, militants, bénévoles… et en retour, du contre-don que se doit d’apporter l’organisation ou l’association. La plupart du temps, ce contre-don est de nature symbolique. Or, les mouvements laïcs ont du mal à jouer du symbolique, puisqu’ils sont dans la rationalité. Les gens qui s’engagent à H&H reçoivent un contre-don symbolique fort : c’est la parole de Bernard Devert, c’est la parole du prêtre. Moi qui ne connaissais rien à la religion, je découvre ce que représente la parole d’un prêtre, pour les gens qui croient.

 

Il faudrait donc cela aussi, pour impulser de l’unité : des figures charismatiques, l’art de la parole ?

Il faut du symbolique. Je suis assez intéressé par ce que dit Régis Debray là-dessus. Il explique combien on a besoin du fait religieux et comment la laïcité n’a pas su porter du symbolique… Plus que la terminologie « religion », il utilise la notion de communion : des lieux qui permettent d’être ensemble, avec des rites, des paroles…

 

Peut-on repérer de tels lieux, dans la ville moderne, hors du champ religieux ? Les événements festifs, qui reviennent régulièrement dans l’agglomération, n’acquièrent-ils pas, pour certains, ce statut de rituel social unificateur… ?

On peut penser au foot, à l’OL… Mais pour renouveler ce qui va faire communion, il faut puiser à la fois dans l’histoire et dans le symbolique. La culture est un lieu dans lequel on peut trouver des moments, des rassemblements de ce genre, dans lesquels va se générer de l’union, au-delà des différences. Je pense que ce qui se passe autour du Défilé de la Biennale de la Danse est important de ce point de vue-là. Cela me fait penser à la musique, qui joue aussi, par certains aspects, une  fonction de mythe. Mythe de référence, qui nourrit…,  et qui peut disparaître à certains moments. Il est intéressant de voir par exemple combien les musiques brésiliennes se réfèrent à l’histoire (les rythmes qui reviennent, les mêmes thèmes, les mêmes paroles qui sont reprises…) et combien elles se fondent sur du spirituel, que ce soit la spiritualité bahianaise, celle du candomblé, ou la spiritualité animiste d’autres courants musicaux du Brésil. C’est la même chose pour la musique cubaine avec la santeria.

 

Lyon devient une scène importante des musiques actuelles. Peut-on imaginer que se joue là aussi quelque chose de ce genre-là ?

Oui je pense…  Des lieux comme le Ninkasi, le marché gare…, ces nouvelles scènes sont intéressantes. Elles renouvellent une dynamique qui a existé fortement, dans un autre domaine musical, autour de l’École de la Chanterelle : toutes les chorales, tous les réseaux, qui gravitent autour de ce monde-là. Je pense qu’il y a aussi des sites importants — St-Jean, par exemple — que l’on pourrait davantage valoriser, animer. Quand on voit comment, dans les villes italiennes, le patrimoine est porté à la disposition de tout le monde, il me semble que nous avons du chemin à faire pour que le patrimoine local « résonne » davantage pour les Lyonnais…, et pas seulement pour les touristes.

1 Communauté Urbaine de Lyon
2 Société d'Equipement de la Région Lyonnaise
3 Agence pour le Développement Economique de la Région Lyonnaise
4 Action Lyonnaise pour l'Insertion par le Logement
5 Association Villeurbannaise pour le Droit au Logement.