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L'enjeu touristique de Lyon se situe autour de la diversification des attractions

Interview de François GAILLARD

<< En développant des moyens de transport et des activités sur ses fleuves, Lyon pourrait avoir une fabuleuse carte à jouer >>.

A l'inverse de plusieurs autres villes européennes, Lyon  se spécialise sur le tourisme de courte durée et n'attire que peu de touristes pendant la saison d'été. L'enjeu touristique en 2006 se situe au niveau de la diversification  des attractions :  "low cost" , enjeu patrimonial, l'OL , velo'v...
Rencontre avec François Gaillard, Directeur Général de l’Office du Tourisme et des Congrès du Grand Lyon.

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Date : 17/03/2006

Zurich, Munich ou Budapest connaissent leur plus grande fréquentation touristique durant l’été. À Lyon, c’est le cas inverse, le mois d’août est celui qui compte le moins de nuitées hôtelières. Comment expliquez-vous cette situation ?
Le tourisme à Lyon est avant tout un tourisme d’affaires. De fait, la fréquentation est importante de septembre à juin et en semaine, ce qui nous donne une belle saison de dix mois ! Cela ne signifie pas pour autant que l’activité touristique soit inexistante durant les mois d’été, il existe bel et bien un tourisme d’agrément à Lyon, mais l’été, la ville vidée  de ses habitants et des hommes d’affaires donne un sentiment de vide. Cependant, le tourisme urbain se développe même si cela ne se traduit pas toujours en terme de nuitées hôtelières. Il faut savoir qu’à Lyon, parmi les visiteurs, beaucoup sont des excursionnistes ou des personnes hébergées chez des proches. Et puis il y a l’enjeu des week-ends. Notre Bureau des Congrès essaie d’inciter les congressistes à précéder ou poursuivre leur séjour d’affaire par quelques jours de tourisme d’agrément le week-end, mais aussi de capter sans cesse de nouvelles clientèles, notamment l’été. C’est dans cet objectif que nous développons les formules de courts séjours en proposant une multitude de thèmes différents.

Pourquoi vous focalisez-vous sur les courts séjours ?
Cette formule est la plus adaptée au tourisme urbain notamment dans des villes comme Lyon qui ne sont pas des capitales. C’est une formule qui présente l’avantage de pouvoir être considérée comme un séjour en soi, mais aussi d’être combinable avec le tourisme d’affaires, le tourisme de montagne, le tourisme à thème (patrimoine…), où encore de nature. Et pour cela, Lyon joue pleinement la carte de la complémentarité avec Rhône-Alpes.Les Lyonnais auraient, soi-disant, une  mauvaise réputation. Ils seraient peu accueillants et froids. Est-ce votre avis ?
Non, les Lyonnais sont accueillants et ils ont même une tradition ancestrale de l’accueil. La gastronomie le confirme. L’art de la table est indiscutablement un art de l’hospitalité. Les gens se rencontrent à Lyon depuis des centaines d’années, c’est une ville d’échanges et de commerce, un carrefour. L’histoire de la foire en est la meilleure illustration. Cependant, les Lyonnais sont sérieux et d’ailleurs ça leur réussit, mais c’est probablement ce qui peut expliquer cette réputation de gens un peu froids.
 
Outre l’image des Lyonnais eux-mêmes, quel est l’attrait de Lyon en Europe et plus largement au niveau mondial ?
La ville ne séduit pas tous ses visiteurs de la même façon. En schématisant, on peut dire par exemple que les Chinois peuvent être intéressés par l’histoire de la ville associée à celle de la soie, et moins par une gastronomie à laquelle ils ont du mal à s’adapter. D’une manière générale, les asiatiques sont séduits par le patrimoine architectural, mais aussi par les possibilités de shopping… Les Américains apprécient les produits de charme, le vin et les antiquités, et les Russes la gastronomie et le shopping. Nous utilisons notre connaissance des marchés pour mettre en avant différemment et de façon appropriée les atouts de la ville. Tout est une histoire de cible et d’interlocuteur.

Malgré tout, il y a bien un fond d’image commun et cette image est-elle satisfaisante ?
Les questions d’image sont délicates, et nos capacités d’action réelles sont limitées, sans que ce ne soit forcément un problème de moyen. En matière de tourisme, il n’y a qu’une seule image, celle qui se construit avec le temps à partir de ce que l’on est vraiment. Il ne faut pas mentir, s’inventer des visages que l’on n’a pas. Il faut s’appuyer sur ses vrais atouts, savoir les mettre en valeur, les développer et les moderniser. Et Lyon n’en manque pas !

Quels sont ses principaux atouts ?
Son premier atout est probablement sa taille. Lyon est une ville à échelle humaine qui présente tous les avantages d’une capitale sans les inconvénients. Elle possède des infrastructures et des équipements de grande qualité, un patrimoine d’exception, des possibilités de shopping illimitées, une offre culturelle riche, bref des attraits dignes des capitales européennes sans les contraintes de bruit, de circulation ou d’insécurité qui souvent les caractérisent. Son positionnement sur un grand axe sud-nord, sa proximité de Genève ou de Turin, des Alpes et du Mont-Blanc connu dans le monde entier, est également un atout indéniable. La richesse de son patrimoine et de son histoire, la gastronomie et la soie et bien sûr ses fleuves lui confèrent une identité particulière, unique.

Vous portez autant de considération aux fleuves qu’au patrimoine architectural ?
Oui, j’y suis en effet très attentif. C’est une vraie chance pour Lyon d’être à la confluence de ces deux fleuves au bord desquels la ville s’est construite. Notre Maire l’a compris, les berges sont réaménagées et le projet « confluence » viendra confirmer la réappropriation des fleuves par la ville. Mais l’enjeu n’est pas seulement au bord de l’eau, il porte aussi sur l’eau. À l’exemple de Venise ou d’Amsterdam, il serait intéressant de multiplier les modes doux de transport pour les lyonnais comme pour les touristes. Depuis ses fleuves, la ville déploie tous ses charmes, c’est un magnifique moyen de la découvrir autrement. Aujourd’hui, en développant des moyens de transport et des activités sur ses fleuves, Lyon pourrait avoir une fabuleuse carte  à jouer.

Outre cette utilisation des fleuves, pensez-vous qu’un événement majeur durant l’été faciliterait le développement de l’activité touristique ?
Les gens ont souvent besoin d’un prétexte, d’un but à donner à leur séjour, et les évènements sont effectivement de très bonnes raisons. C’est un des leviers de développement. On le voit bien avec la Fête des Lumières que de nombreuses villes nous envient et qui chaque année attire de plus en plus de touristes. Créer un événement aussi marquant l’été me semble difficile. N’étant pas un spécialiste de l’événementiel, je ne me risquerais pas à choisir entre capitaliser sur un événement existant l’hiver ou créer un nouvel événement majeur l’été. Mais, à l’évidence, il y a là des pistes à explorer.

Quel autre levier de dynamisation touristique vous semble aujourd’hui essentiel pour Lyon ?
Attirer des opérateurs à bas coûts, des Low Cost à l’aéroport de Saint Exupéry serait très certainement une des possibilités majeures d’attirer de nouvelles clientèles : celle qui voyage souvent et se laisse séduire par une destination proposée à bas prix, même si cette dernière n’était pas envisagée comme une destination prioritaire et, une nouvelle clientèle, pour qui un court séjour urbain devient accessible. Genève totalise 33% de fret généré par le Low Cost quand Saint Exupéry est à 3% ou 4%. C’est un vrai enjeu pour les séjours de courte durée, et pour l’été,  et un moyen réel d’augmenter les flux de manière importante.

Au quotidien sur quels axes travaillez-vous et qu’elles sont vos perspectives ?
Chaque jour, nous nous battons pour améliorer l’accueil des visiteurs. Nos visites guidées sont de grande qualité et nous développons des produits comme la Lyon City Card pour faciliter la pratique de la ville. Un visiteur bien accueilli devient un ambassadeur !
La promotion de Lyon est notre deuxième axe de travail. Nous conduisons des campagnes de communication et sommes présents sur de nombreux salons. Nous réalisons un démarchage systématique des tours opérateurs et des agents de voyage pour améliorer le positionnement de Lyon et toujours mieux cerner leurs attentes. Néanmoins, il faut mesurer la difficulté de l’exercice car la concurrence est vraiment rude. Lyon n’est pas une capitale et se retrouve en concurrence avec de nombreuses capitales européennes qui développent aujourd’hui fortement leur potentiel d’attractivité. Et Lyon se retrouve aussi en concurrence avec d’autres destinations au niveau mondial, face à des destinations de rêve qui cassent toujours plus les prix du fait de la conjoncture. Aujourd’hui se vendent des séjours d’une semaine en République Dominicaine pour moins de 500 euros ! L’industrie touristique se métamorphose. Néanmoins, j’en suis profondément convaincu, Lyon est une ville insuffisamment connue, mais qui a de vrais atouts et qui, demain, va compter sur le plan du tourisme urbain. Elle a une position d’outsider et beaucoup de développements sont encore possibles. À très court terme, l’Amphithéâtre 3000 permettra à Lyon de confirmer sa deuxième place nationale sur le plan du tourisme d’affaires y compris l’été. Pour preuve, le congrès Tupperware se tiendra à Lyon du 22 au 24 août prochain et accueillera plus de 2000 personnes.  Enfin, il y a parfois des facteurs de rayonnement international inattendus, les Velo’V en sont un exemple, l’Olympique Lyonnais en est un autre… Notre travail est aussi de savoir capitaliser sur ces aspects.