Agriculture régénérative : promesses et limites d’un concept séduisant
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Face aux crises qui menacent durablement la production alimentaire mondiale, quelles solutions propose l’agriculture « régénérative » ?
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Interview de Sylvain Grisot
Fondateur de l’agence Dixit.net, chercheur associé à l'Université de Nantes et intervenant régulier du « Design Lab Ville Durable » de l’École de Design de Nantes-Atlantique, Sylvain Grisot porte une certaine idée de l’urbanisme, opposée à l’obsolescence programmée de nos bâtiments.
S’inspirant du modèle de l’économie circulaire, il nous propose du faire du mieux avec du vieux !
Qu’est-ce que le concept d’urbanisme circulaire ?
Le terme n’a pas encore la valeur d’un concept au sens scientifique même si j’y travaille. L’urbanisme circulaire, c’est d’abord une notion, un slogan, une sorte de drapeau qui permet aux acteurs de se repérer autour d’une approche commune de l’urbanisme. C’est une clé de lecture qui permet d’agir sur le réel, validée et encouragée par les retours des professionnels, chercheurs, techniciens et élus avec qui j’échange. Pour eux, cette notion est très utile parce qu’elle sert à mettre en récit, de façon claire et lisible, une approche plus durable de la ville et d’agir en conséquence.
L’urbanisme circulaire est directement inspiré du terme d’économie circulaire. En France, on associe de manière très restrictive la notion d’économie circulaire avec celle de recyclage. Je m’appuie sur la vision anglo-saxonne, plus intéressante, et qui s’apparente à une logique de processus. Prenons l’exemple du plastique qui est un processus linéaire. Après l’extraction du pétrole puis sa transformation, on produit un objet qui, une fois utilisé, part à la poubelle. L’idée de l’économie circulaire est d’éviter la case poubelle en maintenant une utilisation à cette matière qui a été extraite et transformée, à travers plusieurs boucles.
La plus grande des boucles, c’est celle du recyclage. On revient à la matière plastique mais on a une perte d’énergie, de matière et de valeur d’usage. Mais on a des boucles qui sont plus petites et donc plus efficaces. Il y a la boucle du réemploi où donner ou vendre à son voisin un objet, c’est redonner une valeur économique et d’usage. Il y a la boucle de la réparation qui demande déjà plus d’effort et d’énergie, mais c’est déjà mieux que la poubelle jaune.
J’ai repris cette idée qu’à partir du moment où on portait atteinte au milieu et à la matière, qu’on extrayait et utilisait quelque chose, on pouvait multiplier les boucles pour réinjecter la matière dans le système, réduire l’obsolescence, la consommation jetable, et j’ai appliqué cela à l’urbanisme.
Qu’est que l’urbanisme circulaire apporte de nouveau dans les réflexions sur les manières de produire la ville ?
L’urbanisme n’est pas une discipline, ni encore moins une science, mais le processus de fabrication de la ville. Dans ce processus, je me suis intéressé à une matière première qui est le sol, pas en tant que matériaux, mais en tant que ce qu’on appelle le foncier, c’est-à-dire la place pour faire la ville. Aujourd’hui encore et depuis moins de 50 ans en France, l’urbanisme s’appuie à plus de 80% sur la consommation de sols agricoles pour faire la ville dans un processus linéaire. L’idée est de passer à un processus circulaire où, une fois qu’on a consommé un mètre carré de sol, on multiplie les boucles pour essayer d’utiliser le mieux possible ce mètre carré et éviter l’étalement urbain.
Pouvez-vous illustrer l’application de ces boucles de circularité à l’urbanisme ?
Ce n’est pas compliqué du tout. La première des boucles, c’est éviter de construire, en intensifiant les usages de l’existant, grâce à l’urbanisme temporaire notamment qui travaille les temps d’utilisation plutôt que les espaces. La seconde boucle, c’est éviter de déconstruire parce que le cycle de démolition et reconstruction produit des déchets mais surtout une perte de toute la matière et de l’énergie grise accumulés dans le bâtiment existant. La troisième boucle, si on n’est pas parvenu à activer les deux premières, c’est éviter de s’étaler en densifiant les espaces urbains ou en recyclant par des processus de démolition et reconstruction, notamment des friches. La quatrième boucle, c’est la renaturation des espaces, la fin de la ville, tout à fait cohérente dans certains territoires, peut-être moins dans les métropoles où il y a des tensions évidentes.
Cette clé de lecture, très simple finalement, invite l’urbanisme à réorganiser ses priorités en questionnant systématiquement la nécessité de construire face à un besoin. Cela revient à s’interroger sur la capacité à ne pas répondre à ce besoin, sur la capacité à y répondre dans l’enveloppe bâtie existante, de façon plus complexe, ou la capacité à y répondre en recyclant le foncier déjà occupé, notamment des friches, voire la capacité à revenir à un état de nature à certains moments. La construction de neuf dans les champs qui est la solution par défaut de la production de la ville depuis un demi-siècle doit devenir l’ultime solution une fois qu’on a passé en revue l’ensemble de ces boucles circulaires.
Est-ce que les aménagements temporaires des espaces publics rentrent dans ce renversement des logiques que prône l’urbanisme circulaire ?
L’espace public est un espace sur lequel les collectivités ont = tenté, ces trente dernières années, de minimiser le plus possible la gestion. Elles l’ont désigné et y ont fait des investissements, souvent assez lourds, sur des matériaux de surface ou sur du mobilier urbain par exemple, pour en minimiser la gestion en termes de dégradation ou encore d’entretien. Quand on repositionne l’espace public dans la première boucle de l’urbanisme circulaire, celle de l’intensification des usages, faire plus avec ce que l’on a, on se rend compte qu’il est limité, extrêmement encombré notamment par la voiture, et contraint dans une trame et des façades qui le restreignent. Les aménagements temporaires des espaces publics permettent d’intensifier les usages par des interventions à minima, sans investir lourdement dans la dépense économique mais aussi dans la modification lourde de la matière.
Ces aménagements temporaires peuvent-ils changer notre manière d’appréhender les espaces publics et plus particulièrement la voirie ?
Oui et il y a deux aspects intéressants dans les conséquences de ce type d’actions temporaires. D’abord, elles poussent à regarder la composition de l’espace public de façon différente. Par exemple, les logiques de parklet, à l’image des terrasses sur les places de parking, questionnent l’utilisation du stationnement pour d’autres usages que la voiture et la place de cette dernière. Les parklets soulignent souvent l’étroitesse de nos trottoirs et la promiscuité imposée à la circulation piétonne qu’on n’ose pas regarder à l’ordinaire. Avec les mesures de distanciation liées à la pandémie de la Covid-19, il a fallu élargir les trottoirs, déployer des pistes cyclables, installer des terrasses. On a découvert qu’il existait des interstices nombreux dans l’espace public, souvent standardisés autour du gabarit automobile, permettant d’avoir des modes d’intervention standards et de massifier les installations. Le Cerema propose toute une série d’intervention standardisée et temporaire sur l’existant, pour le vélo ou le piéton, pour ajouter une couche d’usage avec la symbolique de la bande jaune et du chantier, laide mais très visible et provisoire.
Ensuite, dans les aménagements temporaires, on apprend des choses sur les manières dont on doit investir l’espace public et penser son design à long terme. Il faut se rappeler des difficultés qu’on a pu avoir lors d’aménagements temporaires pour penser des espaces plus souples lorsqu’il faut les refaire. Il faut s’interroger sur la capacité de ces espaces à être résilients, globalement adaptés à l’usage prescrit, celui qui a été imaginé, à l’usage second, celui imaginable, et surtout au troisième usage, celui qu’on ne peut pas imaginer. L’enjeu est d’avoir des espaces publics sur lequel on vient prescrire le moins possible les usages. Par exemple, le traitement du nivellement est important. Les ruptures de niveau créent des points durs sur tous les usages alternatifs qu’on pourrait imaginer : étendre le trottoir en temps de crise ou pousser une table au milieu de la rue en temps de fête. Planter un arbre au milieu d’une place c’est la même chose, c’est impactant, cela signifie qu’on ne pourra pas y mettre un chapiteau de cirque.
Il faut donc laisser de la place pour l’inconnu et avoir des objets qui savent s’adapter sur des temporalités assez longues. Typiquement je suis opposé à la création d’espaces de stationnement dédiés aux trottinettes. C’est un point d’innovation qui est pour moi un épiphénomène dans la durée de vie de l’espace public. Pérenniser ce type d’aménagement sans se poser la question plus globale de la place de toutes les micromobilités dans l’espace public et des vélos est à mon sens en décalage par rapport aux besoins réels.
Nous venons d’évoquer l’action temporaire dans les espaces publics, mais qu’en est-il de l’occupation temporaire des bâtiments vacants au sein de l’urbanisme circulaire ?
On est encore dans l’intensification des usages, c’est-à-dire faire plus avec l’existant. Pour moi, l’occupation d’un bâtiment vide en attente d’un projet, je la mets dans la même cas que le restaurant collectif qui se transforme en un espace de coworking l’après-midi. Le premier, c’est un bâtiment vide sur le temps long de l’année et le second c’est un bâtiment vide sur le temps court de la journée. Globalement, un bâtiment dans sa vie longue passe 10% du temps vide et c’est une ressource temporelle qu’on peut venir exploiter pour intensifier les usages, au même titre qu’une cour d’école vide le week-end ou pendant les vacances.
Dans les friches, plusieurs boucles de circularité peuvent coexister. L’occupation d’un bâtiment vide avec des investissements légers va recréer des usages qui n’auraient pas pu trouver de place dans la ville, ou auraient nécessité de la place ailleurs. Si l’on réfléchit en termes d’économie globale, cela peut signifier une réduction des besoins de bureaux qui, éventuellement, limite l’extension de la ville en périphérie dans du neuf. À l’échelle du site entier, cette occupation peut côtoyer des boucles plus longues de recyclage urbain de démolition et reconstruction, ou de réhabilitation lourde, en maintenant la trame du bâtiment et en s’inspirant de l’occupation temporaire pour penser ses nouvelles fonctions.
Est-ce que cela n’interroge pas aussi directement les manières de construire ?
Si, bien sûr, quand on se pose la question de l’occupation temporaire de l’existant de cette manière-là, cela interroge les manières de construire du neuf effectivement. La capitalisation des difficultés affrontées par les occupations temporaires pourrait permettre de designer un neuf qui est plus adaptable sur le long terme à la mixité et l’évolutivité des usages. En occupant un bâtiment ancien, on peut en apprendre sur la souplesse des trames constructives, par exemple pour construire du neuf qui va répondre au besoin à un instant T, mais sans être suroptimisé, pour pouvoir s’adapter plus tard à d’autres usages. C’est très important pour le socle de la ville. Faire un design seulement des cellules commerciales, ce peut être une erreur et il faut les designer pour être souples, habitables, commerciales, artisanales. La logique peut s’appliquer aussi aux équipements de santé. Comment on designe aujourd’hui des bâtiments de santé qui seront construits demain, alors qu’on sait que les pratiques médicales changent extrêmement rapidement ? En suroptimisant les bâtiments pour les usages présents, on prend le risque qu’ils ne soient pas adaptables aux besoins futurs.
Comment cela se traduit dans la pratique urbanistique ?
Il y a une nouvelle ingénierie du temporaire particulièrement intéressante qui se développe. D’un part, dans ces urbanismes temporaires, il y a un travail des matériaux (de la palette à l’OSB), un travail de réparation et de micro-travaux, de mise en sécurité et de construction qui forment un savoir-faire. Il ressemble à celui du monde du spectacle dans cette capacité de venir occuper un lieu pour quelques jours ou quelques nuits, sans transiger sur les normes et en trouvant les bons modes pour simplifier les interventions. On assiste à une professionnalisation du bricolage qui n’est pas l’apanage des agences d’architectes ou des bureaux d’étude.
D’autre part, et c’est peut-être le plus important, il y a aussi un savoir-faire en termes de gestion et d’organisation de la coexistence d’usages et d’usagers différents qui posent des questions en termes assurantiels, par exemple dans la gestion des clés d’un bâtiment ou la sécurisation des aménagements dans l’espace public. Et finalement, c’est la dernière chose que l’on affronte. C’est plus facile en France d’investir des millions dans un équipement public, que de pouvoir partager le soir une salle de classe avec l’assentiment de l’académie, d’avoir l’autorisation d’occuper un bâtiment vacant, de faire respecter un espace de maraichage par les riverains d’un terrain vague ou de sécuriser des aménagements temporaires la nuit dans la rue.
C’est pourtant le sens de l’histoire que de trouver des solutions pour ce type d’action qui ne nous demande finalement qu’une seule chose, c’est de s’entendre entre nous sur les modes de gestion des lieux dans le temps. Et cette question de gestion, on la retrouve dans le neuf dès qu’on souhaite multiplier et intensifier les usages des lieux.
Doit-on toujours chercher à occuper un bâtiment ou à en recycler l’usage ? Est-ce toujours possible finalement ?
Ce n’est pas automatique. Je suis militant de la conservation des bâtiments existants, mais je prescris aussi énormément de déconstruction pour penser les transitions et les mutations des fonciers. On a construit des bâtiments à obsolescence programmé qu’il est difficile de faire muter. Cette obsolescence vient en partie de bâtiments qui sont structurellement défaillants mais elle vient bien plus souvent d’une conception des bâtiments reposant sur un usage unique et qui les rend incapable de muter pour accueillir d’autres usages.
Comment l’occupation temporaire peut accompagner la transition des bâtiments et des espaces ?
Côté préservation, l’occupation temporaire peut participer à faire muter les bâtiments dans une logique de réhabilitation. Il y a des modes d’occupation temporaire qui se révèlent sous-optimaux et qui créent des anomalies qu’on ne connaît pas dans du neuf ou de la réhabilitation, mais qui renseignent sur des possibles usages. Ce sont des studios très grands parce qu’à un moment on a occupé un plateau de bureau qui va se transformer en studio de 80 m² et qui répondent à un besoin. Ce sont des espaces tertiaires de bureaux partagés où il y a 50 % d’espaces communs et face auxquels tout promoteur crierait à un manque flagrant d’efficacité, parce que ce type d’espaces coûte mais n’est pas loué. Pour autant, cette sous-optimalité va donner naissance à d’autres natures d’espace qui vont faciliter les rencontres et le dialogue, et qui vont être à la base de collaborations et d’organisations qui ont une valeur en soi. L’occupation temporaire peut donner des idées de réhabilitation par une forme de connaissance plus intime des bâtiments et de ses capacités à faire autrement.
Concrètement, l’occupation temporaire a démontré que des grands plateaux pensés mono-utilisateurs dans des immeubles avec une logique de siège sociaux pouvaient parfaitement être divisés entre plusieurs utilisateurs. Et cela correspond au marché d’aujourd’hui, dans une logique de petites entreprises avec des services en commun. Cela permet alors de penser des réhabilitations qui vont plus facilement sortir d’une offre standard de bureau avec des ratios classiques entre espace commun et privatif ou avec des surfaces standardisées pour les postes de travail.
Pourquoi sortir d’une offre standard éprouvée qui supporte le modèle de la construction ?
Il faut sortir du modèle optimal de ce qui est possible de faire si on détruisait et reconstruisait parce qu’il faut intégrer une approche en termes de cohérence environnementale. Détruire pour reconstruire, c’est perdre toute l’énergie grise de la structure. Il vaut mieux partir de l’existant, de ses possibilités, avec des modèles d’utilisation qui permettent d’avoir un réalisme économique dans le projet, sans forcément chercher une maximisation de l’offre potentielle sur la surface foncière. Les marges immédiates sont un peu moins fortes, mais cela à plus de sens au long terme avec un bilan carbone bien meilleur qu’une démolition/reconstruction. Il est parfois plus pertinent de conserver une passoire thermique pendant 40 ans, plutôt que faire une démolition/reconstruction pour faire du passif parce que l’énergie grise pour faire le nouveau bâtiment ne sera pas amortie sur ces 40 ans. Mais évidemment, la meilleure des solutions est d’avoir une réhabilitation ambitieuse, qui conserve la structure existante quitte à faire quelques compromis programmatiques.
Il faut donc d’abord se demander comment utiliser l’existant pour répondre au besoin avant de se projeter des programmes neufs ? Comment cela peut s’appliquer aux politiques publiques métropolitaines ?
À l’échelle d’une vaste métropole comme Lyon, l’urbanisme circulaire pousse effectivement à bien se reposer la question des priorités. Il pousse à sortir du processus d’étalement urbain, qui est vu comme l’acte par défaut qui vient répondre aux besoins de développement, pour chercher les solutions dans l’emprise de la ville déjà-là. Il y a cette idée sous-jacente dans l’urbanisme circulaire de moins s’étaler, moins construire, et de se poser davantage la question des potentiels de l’existant pour répondre aux besoins. Il aide à inverser ce processus de décision en passant par toutes les boucles circulaires dans lequel on se pose la question de l’occupation temporaire, de l’intensification des usages, de la réhabilitation de l’existant, etc. Cela touche le privé comme le public, le bâti et l’espace public, et ça se décline à tous les niveaux.
Qu’est-ce que cela signifie d’inverser le processus de décision en matière d’urbanisme ?
Cela signifie de regarder la ville telle qu’elle est mais avec d’autres lunettes pour détecter les potentiels d’activation : ces écoles vides le week-end, ces stationnements de surface sous-utilisés, ces parkings souterrains vides, ces délaissés routiers, ces bâtiments vacants, ces friches ou encore ces secteurs de lotissements qui sont autant de ressources pour l’avenir. Par exemple, on ne regarde pas les lotissements parce que personne ne lève le doigt, il n’y a pas de question à se poser, mais on pourrait y ajouter des maisons en plus sur des terrains déjà viabilisés, organisés, structurés, ou lâcher des droits à construire de manière intelligente et coordonnée, pour que les gens puissent construire leur bureau dans leur jardin, alors qu’aujourd’hui ils ont souvent un Plan Local d’Urbanisme restrictif.
Il faut regarder ce foncier invisible que sont les espaces libres, recyclables, et les temps de la ville, activables, à partir desquels on peut générer plus d’usages.
Quelles nouvelles compétences sont à l’œuvre dans cet urbanisme circulaire ? Assiste-t-on à l’émergence de nouveaux métiers ?
Activer ce foncier invisible demande de nouvelles compétences et de nouveaux métiers qui ne sont pas industrialisables. On peut massifier la réhabilitation de l’existant ou les occupations temporaires, mais cela demande toujours de s’adapter à un bâtiment particulier, un type d’usage, un environnement, des voisins, etc. Et on ne peut pas standardiser l’offre. À titre d’exemple, l’occupation transitoire d’un bâtiment ça ne se gère pas sur un tableau Excel. Il faut comprendre le bâtiment, le contexte, voir à qui ça peut servir. Ce n’est pas parce qu’il y a un bâtiment vide et des besoins en face que ça va fonctionner et aller de soi, pas du tout, il faut être plus fin, miser sur l’intelligence, déployer des process non standards et mobiliser des gens qui vont accompagner la vie de ces lieux de façon complexe. Il y a un besoin de vision systémique pour articuler des questions de mise en dialogue, de gestion, d’animation d’une part, et des questions techniques, de normes, règlementations, matériaux, pollution de l’autre. Ce sont pleins d’expertises spécifiques qu’il faut arriver à organiser et faire parler ensemble pour à un moment faire projet, et c’est une sacrée compétence.
Et au niveau des collectivités ?
Côté agents des collectivités, il y a beaucoup de ces métiers-là qui ne peuvent pas être totalement standardisés. Typiquement, la question de l’urbanisme tactique, l’urbanisme temporaire appliqué à l’espace public, a reposé celle de l’internalisation du design de l’espace public et des voiries. Pour un certain nombre de fonctionnaires territoriaux et de services techniques, qui n’ont pas pu faire un marché public pour avoir une maîtrise d’œuvre, il a fallu les dessiner eux-mêmes. Certains se sont aperçu pendant le confinement qu’ils n’avaient plus AutoCad sur leur ordinateur ou qu’ils ne savaient plus l’utiliser. Et on a retrouvé un acte de conception, rapide, temporaire, etc., efficace, appliqué et internalisé dans les services, qui peut être fait et défait et ça, ce n’est pas simple à écrire dans un marché public. Quand c’est un coup de peinture ou des pots de fleur, et bien, ce n’est pas un marché de travaux. Il faut des gens qui reprennent des outils et une réinternalisation des compétences.
Cela demande aussi de nouveaux outils juridiques, mais surtout des organisations pour travailler les temps extrêmes, à la fois très courts du tactique mais aussi ceux très longs de la maîtrise foncière, pour des friches, des bâtiments patrimoniaux ou encore des rez-de-chaussée commerciaux. Il y a des acteurs qui s’inventent et se réinventent, des SPL dédiées, des foncières solidaires, etc. Il y a des enjeux de repenser la planification autour de ces enjeux : il ne peut pas y avoir une collectivité qui se lève et se dit tout d’un coup pertinente sur ces sujets si, dans le même temps, la mairie d’à côté continue de lâcher des parcelles peu chères et pousse à l’étalement urbain. L’espace du futur, c’est le périurbain : déjà à l’échelle territoriale, c’est sur lui que doit se porter les efforts de densification et d’intensification des usages du foncier.
Les sols communs sont trop importants pour être mal gérés par le marché. Il faut que la puissance publique redonne de la voix et reprenne la main en favorisant d’autres processus de développement urbain, en activant ou en soutenant les initiatives qui activent les boucles circulaires sur le foncier existant.
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