Vous êtes ici :

Le marketing appliqué au secteur public

Interview de Sonia CAPELLI

© DR
Directrice du Centre de Recherche Clermontois en Gestion et Management (CRCGM)

<< Tous les domaines de la gestion, même la finance, ne s'intéressent qu'aux comportements : comment expliquer les comportements des parties prenantes ? Quels sont les leviers d'actions managériaux pour influer sur ces comportements ? >>.

Réalisée par :

Tag(s) :

Date : 31/05/2011

Propos recueillis par Caroline Januel le 5 avril 2011

S'appuyant sur sa double formation en économie/sciences de gestion et ses recherches en communication et sur le comportement du consommateur, Sonia Capelli nous livre son approche du marketing. Renonçant à la classique distinction entre la théorie et les applications, elle envisage le marketing comme une discipline appliquée, s'appuyant sur le croisement de nombreuses méthodologies. Elle évoque tour à tour les évolutions récentes et marquantes de la discipline : l'importance de la relation avec le client ou l'usager, la participation du client à la production de l'offre, l'extension du marketing à la sphère non marchande, l'utilisation du développement durable, etc. Sonia Capelli évoque ensuite différents travaux de recherche du CRCGM. Pour finir, nous lui avons demandé d'imaginer sous quels angles son équipe pourrait aborder les questions de mobilité, d'environnement urbain et d'espace public.

 

Quelle définition donneriez-vous au marketing ?

On peut rappeler tout d'abord que le marketing appartient à la famille des sciences de gestion, définies par le Conseil National des Universités  comme la section 6. Les sciences de gestion recouvrent « la gestion des organisations, la gestion des entreprises, les fonctions de la gestion, l'audit, la comptabilité, le contrôle de gestion, la finance, la logistique, la gestion des ressources humaines, le marketing, la stratégie, les systèmes d'Information, la théorie des organisations ».
Il existe un grand nombre de définitions du marketing. On peut citer celle de l'AMA (American Marketing Association) qui fait souvent référence en la matière : « Marketing is an organizational function and a set of processes for creating, communicating, and delivering value to customers and for managing customer relationships in ways that benefit the organization and its stakeholders ». Historiquement, le marketing désigne toutes les techniques d'aide à la vente d'un produit ou d'un service. Cette définition correspond bien aux pratiques des années 1960. Mais le marketing s'est transformé petit à petit. Aujourd'hui, il vise à établir une relation durable avec le client ou l'usager, à répondre au mieux à ses attentes, à le fidéliser, etc. Nous sommes passés d'un marketing transactionnel (où l'on vend un produit une fois à un instant t) à un marketing relationnel. Dans les années 1990, la notion de confiance était au cœur du marketing. Aujourd'hui, on parle plus volontiers de satisfaction. Les professionnels du marketing répondent à la question : comment satisfaire le client ou l'usager ?

 

Comment se traduit dans vos pratiques ce passage d'un marketing transactionnel à un marketing relationnel ?

Concrètement, dans une entreprise, le service marketing porte la voix du client. Il joue le rôle d'interface entre l'extérieur et les services internes, comme le service de production. Le service marketing réalise un travail de veille, il détecte et décode les tendances, grâce à toute une série de méthodes. Il participe aussi à ajuster les coûts et les fonctionnalités d'un objet. Par exemple, lors de la conception d'un objet technique, il doit aussi être capable de dire que le client n'a pas besoin de telle ou telle fonctionnalité mais souhaiterait avoir ce produit dans d'autres coloris. Et surtout, le marketing éclaire la dimension relationnelle qui entre en jeu dans tout acte de consommation.
Aujourd'hui, le client consomme un lien plutôt qu'un bien ou un service : il consomme de la relation. Par exemple, si vous allez dans un café, ce n'est pas seulement parce que vous avez soif mais aussi pour vivre un moment de détente ou de relations, dans un décor particulier, dans une ambiance particulière à laquelle vous contribuez. Si les personnes âgées vont si souvent chez le coiffeur, ce n'est pas seulement pour se faire couper les cheveux, mais bien pour partager un moment de sociabilité. Ces liens, qui existaient auparavant en-dehors de la sphère marchande, s'y développent aujourd'hui de plus en plus : on achète des relations, des moments de sociabilité, etc.

 

Est-ce pour cela que le marketing est très critiqué ? On entend souvent que le marketing crée des besoins, exploite les esprits faibles...

Les besoins existent depuis toujours. Je dis souvent à mes étudiants qu'au Moyen-âge, la servante rêvait d'avoir la robe de la princesse et il n'y avait pas de marketing... En revanche, le marketing crée des envies qui permettent de satisfaire des besoins. Par exemple, avoir une vie sociale, des amis, est un besoin que le marketing ne peut pas créer. Par contre, le marketing peut parfois véhiculer le message que vous ne pourrez vous faire des amis qu'en consommant. Ainsi, des études  menées dans les cours d’école montrent que les enfants achètent des chaussures de marque pour être acceptés par les autres (Rodhain et Aurier, 2006). C'est un travers mais il s'agit d'un problème d'éducation plus que de marketing. Devenir un consommateur averti s'apprend. Il y a d'ores et déjà des études  montrant la résistance des consommateurs aux tentatives de persuasion. Les travaux de Scott (1994)  montrent que la publicité est devenue un style littéraire à part entière et est reconnue du premier coup d'œil. Par conséquent, elle n'est pas traitée de la même façon qu'un autre type de visuel par le récepteur. Les jeunes générations en particulier ne sont pas dupes, cette vision du marketing créant des besoins et manipulant les esprits est dépassée.

 

Voyez-vous d'autres évolutions récentes dans le champ du marketing ?

Une autre évolution majeure et récente est la participation du client. Le client coproduit l'offre avec l'entreprise ou la collectivité de façon à ce que l'offre lui convienne. C'est le cas quand vous allez prendre un café, vous participez à l'image et à l'ambiance du lieu en échangeant ou non avec les autres clients, en d'autres termes à l'offre. Quand Nike vous propose sur son site NIKEiD de personnaliser vos chaussures de sport, c'est la même démarche. Il peut s'agir aussi d'actions plus simples comme le vote pour une nouvelle saveur de yaourt, la proposition d’idées pour la campagne publicitaire « si j’étais banquier » du Crédit Mutuel , le choix de l’égérie du prochain spot publicitaire de la SNCF ou une simple boîte à idées.

 

Le marketing est très critiqué et pourtant il s'étend. On a aujourd'hui le sentiment qu'il touche tous les domaines...

Le marketing prend beaucoup d'importance et parce qu'il prend beaucoup d'importance, il est très décrié. Pendant longtemps, le marketing se résumait au marketing produit : comment vendre mes petits pois, dans quelle boîte et à quel prix ? Puis le marketing s'est étendu pour s'inscrire dans une logique de satisfaction du client, de réponse à ses besoins, d'anticipation de ses besoins. Aujourd'hui, on entend dire que le marketing est partout. Il touche aussi la sphère non marchande, comme par exemple les services publics, le monde associatif ou le monde politique. Une de nos études  sur les campagnes de communication des candidats à l'élection présidentielle de 2007 montre bien combien les candidats sont « vendus » comme des produits. Les logiques sont les mêmes ! La logique marketing rentre vraiment dans les domaines du public et du social.

 

Mais en pratique, est-ce si facile d'appliquer une logique marketing au secteur public ?

Il faut bien entendu adapter la démarche car une même personne n’agira pas de la même façon selon qu’elle est cliente ou citoyenne. Cependant, la distinction entre le secteur privé et le secteur public est difficile pour les usagers. Par exemple, dans le secteur des transports, les usagers se comportent comme des clients, alors que ce n’est pas le cas pour les Caisses d’allocation (Sabadie, 2003). Quoiqu’il en soit il faut aller au-delà de ce clivage entre le secteur public et le secteur privé pour tenir compte des attentes de l’usager. A ce titre, je m'étonne encore que nos interlocuteurs dans les services communication des collectivités n'aient aucune formation marketing. Historiquement, les personnes dans le public qui occupent des postes en communication sont majoritairement issues des formations en sciences de l'information et de la communication. Ces personnes sont très bien formées aux notions d'information, de communication, aux processus et aux usages de l'information et de la communication, elles sont souvent très créatives, mais elles n'ont pas de formation en gestion. Elles ne sont pas forcément aptes à établir un plan de communication et à en mesurer ses effets, comme le monde actuel l'exige. Un chef d'entreprise n'embauchera jamais des personnes sans formation en gestion pour son service communication/marketing, mais se tournera vers des personnes formées dans des IAE (Instituts d'administration des entreprises), dans des écoles de commerce, etc. Cette situation n'est pas anodine car il est parfois difficile de collaborer concrètement avec des collectivités, alors que les besoins semblent importants.

 

Quels sont les principaux besoins des collectivités auxquels le marketing peut répondre ?

L'un d'entre eux est la prise en compte de la légitimité des collectivités à diffuser tel ou tel message de communication, de telle ou telle manière. Une plaquette extrêmement travaillée, sur un support de grande qualité très couteux sera très mal perçue par le public considérant que cet argent aurait du être destiné à d'autres actions. Une association aura tout intérêt pour garder sa crédibilité et ne pas nuire à son message à utiliser des méthodes « modestes ». Il en est de même pour la nature du message : un usager accepte qu'une collectivité lui parle du cadre de vie, de sécurité, de développement durable, etc. Par contre, il est difficilement concevable qu’une collectivité, par exemple une commune, affiche qu’il vaut mieux vivre chez elle que dans la commune voisine, mêmes s’il existe des éléments concrets de comparaison.
Cela signifie que le transfert de certaines méthodes très commerciales du marketing du privé au  public ou au social n'est pas du tout évident. Si de nombreux principes restent pertinents, il y a des ajustements à faire.

 

Comment la montée en puissance du développement durable résonne-t-elle sur les pratiques du marketing ? Le consommateur/usager parait de plus en plus éclairé sur les biens et services disponibles, comme sur les pratiques déployées pour le pousser à consommer...

Il y a effectivement une pression de la société pour des pratiques plus responsables. Hier, en gestion, on parlait de développement durable, aujourd'hui on parle de plus en plus de la responsabilité sociale des entreprises. La RSE implique des pratiques respectant un certain nombre de normes. Un colloque à Clermont-Ferrand  l'année dernière nous a permis d'explorer ce thème. Il y a schématiquement deux cas de figure : soit vous changez vos pratiques, intégrez le volet social et sociétal dans votre bilan  pour répondre aux obligations légales ou pouvoir prétendre à des appels d'offre publics exigeant cet engagement, soit vous vous engagez dans une démarche proactive et pouvez acquérir ainsi un avantage de pionnier, ce qui me parait beaucoup plus intéressant. C'est le cas par exemple de Toyota qui le premier s'est engagé sur la voie des véhicules hybrides. Aujourd'hui, de nombreux constructeurs automobiles en proposent mais ils n'ont plus d'avantages concurrentiels à le faire, et c'est encore Toyota qui est présent dans tous les esprits comme un constructeur soucieux de l'environnement.

 

Cette déclinaison de la notion de développement durable dans les entreprises est-elle utilisée par le marketing, pour toucher les consommateurs/usagers ?

Tout d'abord, il faut savoir que cette logique de RSE parait « so frenchy » aux Américains qui ne comprennent pas pourquoi les entreprises françaises se posent ces questions autour des pratiques socialement responsables. Pour eux, l'objectif d'une entreprise est de faire du profit, tout au moins de ne pas faire de pertes : elle n'a pas d'autres responsabilités. Aux Etats-Unis, les hommes, les « charities »  ou les fondations s'engagent et développent diverses actions responsables, mais les entreprises n'ont pas à jouer ce rôle. En France, l'entreprise dépasse la sphère purement commerciale, on lui prête un rôle social : l'entreprise est considérée comme responsable du bonheur de ses employés, de la qualité de l'air, de sa consommation d'énergie... L'histoire de Michelin est en cela tout à fait exemplaire : à une époque, Michelin faisait vivre la ville de Clermont-Ferrand tout entière. C'est Marcel Michelin qui est à l'origine de l'ASM Clermont Auvergne (ASM signifiant Association Sportive Michelin). Créée en 1912, cette association avait pour but de distraire et de donner le goût de l'effort aux employés de la Manufacture Michelin.
En France, l'entreprise est considérée comme responsable de tout ce qu'elle fait. Le consommateur et l'usager ont donc des attentes fortes vis-à-vis des entreprises. Certains veillent à ce que tous leurs choix de consommation soient en accord avec les principes du développement durable, privilégient telle ou telle entreprise pour leurs pratiques, en boycottent d'autres, renoncent totalement à certains biens ou services... mais à l'heure actuelle, consommer de cette manière est un sacerdoce et ces consommateurs sont encore très rares. Cette tendance est néanmoins très étudiée. En pratique, la majorité des consommateurs et des usagers ne prennent pas en compte les pratiques de l'entreprise, car ils ne sont pas suffisamment informés pour le faire. Qui en France sait que Body shop a été racheté par l'Oréal?? En Grande-Bretagne, l'information est davantage connue et des consommatrices ont boycotté les magasins Body shop pour montrer leur désaccord avec la logique commerciale de l'Oréal. Est-ce que l'Oréal va continuer à tester ses mascaras sur des lapins ? Est-ce que Body shop va profiter des innovations de l'Oréal ? Ce fait est assez intéressant car il montre bien l'imbrication qui existe parfois entre les logiques socialement responsables et les logiques commerciales. L'Oréal a préféré racheter une marque socialement responsable plutôt que de développer des gammes en accord avec les logiques du développement durable.
Certains consommateurs prennent en compte les pratiques des entreprises dans leurs choix de consommation, mais pour servir avant tout des intérêts personnels : faire des économies, veiller à sa santé... Si une personne en recherche d'appartement s'intéresse à la consommation d'énergie des logements, c'est davantage pour estimer les frais à venir que pour préserver l'environnement. Si une personne privilégie les cosmétiques bio ou mange des produits bio, c'est parce qu'elle est convaincue que c'est meilleur pour sa santé... On a du mal en tant que consommateur à avoir une vision holistique du développement durable.
C'est la même chose pour l'entreprise, et je sais que je peux choquer en affirmant cela : l'entreprise ne s'engage pas dans des pratiques socialement responsables pour la planète, mais bel et bien parce qu'elle y gagne. Actuellement, ces pratiques ne sont pas encore généralisées donc elles sont encore différenciantes. C'est ce que l'on appelle du marketing sociétal. C'est par exemple une entreprise qui s'associe au Téléthon et reverse une partie du bénéfice de ses ventes à l'association. C'est intéressant pour elle en termes d'image, pour augmenter ses ventes, pour toucher des nouveaux clients qui opteront exceptionnellement pour ce produit car il est associé au Téléthon, etc. Ensuite, des entreprises s'engagent dans des pratiques socialement responsables aussi parce que leurs concurrents le font. Là encore, cela ne veut pas dire que certains chefs d'entreprise ne soient pas intimement convaincus de l'intérêt de pratiques durables. J'en ai croisé un dans ma carrière : il venait à son travail à vélo, était un consommateur éclairé, veillait aux pratiques de son entreprise, etc. mais il ne communiquait pas là-dessus... jusqu'au jour où il est venu nous voir pour envisager comment utiliser cela dans son argumentation commerciale.
Aujourd'hui, il est certain que ces pratiques socialement responsables se développent mais ne soyons pas naïfs quant aux motivations diverses des entreprises, comme des consommateurs-usagers.

 

La montée en puissance d'internet ces dernières années a-t-elle changé les pratiques du marketing ?

Pour moi, non, les supports ont changé, les moyens sont peut-être démultipliés mais les concepts,  et c'est ce qui m'intéresse en tant que chercheur, n'ont pas changé. Par exemple, le bouche-à-oreille prend une nouvelle ampleur avec les mails, les blogs, les réseaux sociaux, etc. mais il a toujours existé.

 

Quelles sont les principales méthodologies utilisées en marketing ?

Nous en utilisons beaucoup. Les sciences de gestion dans leur ensemble se définissent par leur objet. On va utiliser tous les instruments susceptibles d'étudier cet objet : les méthodes de la sociologie, de la psychologie, de l'ethnologie, des mathématiques, des statistiques, etc. Le marketing utilise et agrège les données obtenues grâce à ces différentes méthodes.
En marketing, on peut distinguer les méthodologies quantitatives et qualitatives. Celles-ci regroupent les études de cas, les entretiens individuels, les « focus group » où l'on rassemble un groupe de consommateurs et d'usagers afin de comprendre leurs attitudes ou comportements à l'égard d'une offre, les récits de vie, les journaux de consommation, les observations de vidéos, etc. On croise ensuite ces données de différentes sources : on parle de triangulation. Cette étape est essentielle car, sur certains sujets, les discours des consommateurs/usagers peuvent être biaisés. Les sujets en lien avec le développement durable en particulier font l'objet de biais de désirabilité sociale : tout le monde adhère aux concepts du développement durable, mais dans les faits, certaines pratiques ne sont pas si faciles que cela à adopter. On traite ensuite ces données avec des logiciels d'analyse qualitative comme NVivo utilisé dans notre laboratoire. Ces logiciels sont intéressants car ils permettent de faire des classifications, du comptage de mots, etc. donc finalement, obtenir des chiffres.
Quant aux méthodologies quantitatives, on utilise toute la palette qui existe en marketing : beaucoup d'analyses factorielles, de variance, de régression, etc. Cela dépend de la manière dont sont collectées les données.
Nous menons également des expérimentations, issues des pratiques de la psychologie. Le principe consiste à placer des groupes de personnes dans des conditions particulières et à observer les différences et similitudes. Par exemple, faire goûter le même produit mais de couleurs différentes.

 

Mais comment un professionnel du marketing peut-il maîtriser autant de méthodes ?

La formation à la recherche est un des enjeux de la formation doctorale. Lors d'une thèse en gestion ou en marketing, un doctorant doit apprendre et utiliser une large palette de méthodes pour traiter son sujet : des méthodes quantitatives, qualitatives et des expérimentations. Ensuite, un chercheur ayant besoin de telle ou telle méthode saura nouer des collaborations, apprendre auprès d'autres professionnels pour acquérir les méthodes dont il a besoin. Nous nous efforçons toujours d'aborder l'objet d'étude au travers de plusieurs méthodologies.

 

Percevez-vous une demande croissante des acteurs socio-économiques et/ou des collectivités vis-à-vis de votre discipline ? Comment l'expliquez-vous ?

Pour des questions de gestion et de marketing, ce ne sont malheureusement pas les professionnels en gestion et en marketing que l'on vient chercher mais des économistes et des sociologues. Les sciences de gestion sont des disciplines jeunes en France puisqu'elles ont réellement émergé dans les années 1970-80 et manquent encore de reconnaissance. Et il y a des rivalités entre ces disciplines, sciences de gestion, économie, sociologie. Mais les sciences de gestion se définissent par leur objet, ce qui n'est pas le cas des autres disciplines. L'économie s'intéressait jusqu'à présent à ce qu'il y avait en-dehors de l'entreprise et celle-ci était considérée comme une boîte noire. Ayant une double formation en économie et gestion, je constate que l'économie reste encore très intellectuelle et éloignée des pratiques et du concret, contrairement à la gestion qui est ancrée dans la réalité. Aujourd'hui, les économistes s'ouvrent aux questions de gestion et de marketing, mais ne sont pas vraiment au fait des recherches actuelles dans ces disciplines. Pourtant, dans les formations, l'économie est encore un passage obligé pour ensuite, pouvoir étudier la gestion, ce qui est un non-sens.
En revanche, la gestion est énormément sollicitée dans le cadre de contrats de recherche. Notre laboratoire participe actuellement à de nombreux projets. Le critère décisif pour accepter ou non ces contrats est simple : il faut qu'il y ait un intérêt pour la recherche. Souvent on nous sollicite en tant qu'universitaire pour faire du conseil. Expliquer à une entreprise ce qu'elle doit faire pour implémenter une procédure de développement durable ne m'intéresse pas en tant que directrice de laboratoire. Il suffit pour cela que l'entreprise envoie un de ses collaborateurs dans une de mes formations et s'engage réellement dans un processus de formation continue. Or, ce n'est pas la vocation des laboratoires de recherches qui doivent avant tout produire de la connaissance partagée. Cela signifie que l'entreprise doit ouvrir ses données, jouer le jeu, collaborer, même si finalement on doit lui dire des choses qui ne lui plaisent pas. Nous publions ensuite les résultats obtenus en conservant l'anonymat de l'entreprise.

 

Cette demande est-elle aussi vive de la part des collectivités ?

Les contacts avec les entreprises sont nombreux mais rares avec les institutionnels. Ce qui entretient la méconnaissance vis-à-vis des sciences de gestion et de leurs apports possibles. Si l’on considère la place lyonnaise qui vous est plus familière, l'IAE de Lyon travaille en permanence avec le privé, mais l'Université Lyon 2, qui regroupe une large palette de disciplines à l'exception de celles touchant le commercial, travaille davantage avec les institutionnels. Cela s'explique aussi par les profils des personnes en poste dans les institutions : on y trouve rarement des personnes diplômées en sciences de gestion et marketing, elles connaissent peu ces formations (par exemple les filières MAE -Management et Administration des Entreprises- en formation continue) et entretiennent cette situation.
Nous ne jouons peut-être pas assez notre rôle également. Comme nous avons de nombreuses relations avec les entreprises, qui sont très chronophages, nous ne faisons pas forcément l’effort de rentrer en contact avec les institutions pour leur présenter notre offre de formation.

 

Concrètement, comment engager une collaboration avec le CRCGM ?

Les demandes de collaborations passent par un service de valorisation, ces services existent à présent dans toutes les universités. Elles recueillent les besoins et déterminent le type de coopérations possibles : soit des coopérations de recherche (économiquement beaucoup plus avantageuses pour l'entreprise ou la collectivité), soit des coopérations de conseil. Il y a aussi la possibilité de rentrer dans des Chaires ou dans des pôles de compétitivité, ce qui permet de bénéficier des fonds publics.
Nous sommes partenaires par exemple de la société parisienne Métropole Gestion, spécialisée dans le « rating » RSE des entreprises. Certains de nos chercheurs ont également mené des recherches en collaboration avec Michelin et le Nouvel Hôpital d’Estaing à Clermont.
Nous travaillons aussi avec le Club des 1000 entreprises citoyennes d'Auvergne qui est un collectif de dirigeants qui militent en faveur de l'implication sociale de l'entreprise. Des chercheurs du laboratoire ont travaillé sur l'implémentation du personnel des entreprises au développement durable.
Nous avons trois projets principaux de collaboration en cours pour 2012. Premièrement, nous avons postulé dans le cadre du pôle de compétitivité Viameca pour un financement de la DATAR visant à accompagner les petites entreprises dans l’adoption d’innovations robotiques. Deuxièmement, nous développons une chaire en Gestion des Ressources Humaines pour les TPE (Très Petites Entreprises) ancrée sur le réseau des entreprises d’Auvergne. Troisièmement, nous finalisons une chaire sur l’alter-gouvernance, basée sur l’étude des formes de gouvernance originales (coopératives, gestion collective, …) en partenariat avec le syndicat des scop et de grandes coopératives françaises (Limagrain, Crédit Agricole…).

 

Quels sont les principaux domaines de recherches du CRCGM ?

Le CRCGM est un laboratoire de gestion puridisciplinaire, c'est-à-dire qu’il couvre l’ensemble des domaines de la gestion (finance, marketing, stratégie, gestion des ressources humaines, logistiques, comptabilité…). Il serait trop long de vous faire l’inventaire de tous les travaux issus de notre laboratoire, pour cela il suffit de se rendre sur notre site internet.
Pour ce qui concerne particulièrement la problématique RSE et le secteur public, il me semble intéressant de vous faire part de travaux plus ciblés. Tout d’abord, nous avons identifié une thématique de recherche autour du développement durable qui aborde notamment ce sujet sous l'angle des ressources humaines (comment décliner le développement durable en interne, par rapport au personnel ?), de la finance et de la stratégie.
Ensuite, dans le domaine du marketing, j’ai pour ma part travaillé sur la notion de communication sociétale des entreprises.
Corinne Rochette et Pierre Fenies ont travaillé sur le cas de la satisfaction des usagers du service des urgences de l’hôpital d’Estaing dans l'optique d'améliorer la logistique des urgences (réduire le temps d'attente par exemple) : d'autres critères comme celui de la satisfaction du patient peuvent venir compléter celui de la pathologie la plus grave. Ces chercheurs développent actuellement une recherche en marketing territorial en accord avec 20 régions françaises, sur le transfert de la notion de marque à un territoire ou une région (exemple de la marque « Région Bretagne »).
Côté marketing public, une doctorante réalise une étude sur la satisfaction des usagers ayant adressés une lettre de réclamation au médiateur de la République et un chercheur travaille en particulier sur le marketing des associations.
Dans le domaine du marketing de la chose sociale, un autre thésard travaille sur le don du sang.
Enfin, j’ai réalisé en collaboration avec Bruno Ferreira et Christine Lambey une étude sur la perception de la variation des prix du carburant pendant la crise d’octobre dernier : à qui le consommateur attribue-t-il la responsabilité du prix et de ses variations ? Quelles sont les conséquences sur sa fidélité ? Qui assume ces variations de prix ? Par exemple, est-il envisageable de faire varier le prix des transports en commun en fonction du prix des carburants, des hausses de salaires des employés, etc. ? Plus généralement, nous développons des recherches autour de la communication de crise. Nous pouvons étudier l’efficacité des alternatives dont disposent les collectivités pour communiquer pendant une crise. Par exemple, que dire lorsque les élèves d’une école souffrent d’une intoxication alimentaire liée à la cantine scolaire ?

 

A quel stade pouvez-vous intervenir et pour quel type d'apport ?

Le plus en amont possible car le rôle de conseil m'intéresse peu. Nous préférons privilégier les contrats de recherche et donc recueillir nos données, les traiter, les analyser, faire part de nos résultats, voire organiser des journées de formation pour mettre en application nos résultats. Ainsi, nous allons bien souvent au-delà des demandes de l'entreprise ou de la collectivité et cela leur revient moins cher que des prestations de conseil. En bref, tout le monde y gagne.
Avec les entreprises, il est possible également de conclure un contrat Cifre : ce dispositif du Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche subventionne toute entreprise qui embauche un doctorant d'un laboratoire public.
L'apprentissage est une autre perspective de collaboration. Le secteur privé et le secteur public non-industriel et non-commercial peuvent embaucher des apprentis. Les conditions fiscales sont très intéressantes et la durée du contrat peut varier de 1 à 3 ans en fonction de la qualification préparée. Il est même possible de préparer des doctorats en apprentissage.

 

La compréhension des pratiques urbaines, des usages fait partie des préoccupations du Grand Lyon. Comment le marketing aborde-t-il la notion d'usage ?

En marketing, la question de l'usage et de l'utilisation est centrale : comment le consommateur/l'usager utilise t-il  le produit/le service ? Il y a un mouvement marquant autour de l'innovation par l'usage. Un chercheur de notre laboratoire a un contrat avec Décathlon pour faire évoluer les produits Quechua en fonction des usages des consommateurs. Il peut s'agir par exemple d'une capuche ajustable sur un blouson, mise en place parce que les randonneurs cherchaient toujours à régler leur capuche selon x paramètres. Les « lead users », des pionniers dans l'utilisation des produits et services, sont très observés : leurs manières de porter un vêtement, de détourner l'usage d'un produit, de bénéficier d'un service nous renseignent sur les usages du futur.
Les frontières entre utilisateur, client, consommateur, comme on le désigne dans le privé, et usager, comme on l'appelle dans le public, ont tendance à se flouter, car l'usager comporte une dimension citoyenne que tend à avoir le client. Ces distinctions relèvent de la sémantique. Les méthodes des professionnels sont équivalentes dans le privé et le public pour étudier les motivations et les usages des consommateurs ou usagers, ces méthodes sont juste adaptées à la problématique posée.
Une différence peut être notée et nos études le montrent : les personnes acceptent davantage que l'offre proposée soit moins bonne dans le public que dans le privé. Une étude montre par exemple que les étudiants tolèrent davantage des problèmes d'horaires, d'équipements, etc. dans les universités publiques que dans les écoles de commerce privées.

 

Comprendre et anticiper les comportements sont deux dimensions du marketing. Est-il possible d'aller au-delà : d'induire des comportements ou de les modifier ?

Tous les domaines de la gestion, même la finance, ne s'intéressent qu'aux comportements : comment expliquer les comportements des parties prenantes (consommateurs, investisseurs, employés, etc.) ? Quels sont les leviers d'actions managériaux pour influer sur ces comportements ? Nos publications comportent toujours cette dimension : quelles sont les applications managériales de nos résultats ? S'il n'y a pas d'applications managériales, il ne sert à rien de conduire les recherches. Les dimensions descriptives et explicatives des sciences de gestion doivent permettre l'action. C'est l'essence même de la recherche en gestion. La gestion non  appliquée n'existe pas.

 

Si le marketing peut décoder les comportements mais aussi les modifier,  peut-il être utilisé afin de favoriser l'acceptabilité sociale de telle ou telle pratique ?

Notre laboratoire s'intéresse principalement à l'acceptabilité sociale de différentes pratiques de communication. Comment ces pratiques sont-elles acceptées ? Nous avons mené par exemple une étude sur l'utilisation de l'humour et de la peur en communication politique pendant les élections présidentielles de 2007. Il apparaît que l'humour est plus efficace que la peur quand le message s'adresse aux sympathisants et aux indécis. Au contraire, la peur produit une meilleure attitude envers le message chez les opposants au candidat. Finalement, les habitudes de communication - l'utilisation antérieure du procédé par le candidat - modèrent également l'efficacité du message. L'humour est plus efficace lorsqu'il est utilisé ponctuellement, tandis que la peur est recommandée pour une stratégie de communication à plus long terme.
Nous posons également la question suivante : l'émetteur d'un message est-il considéré comme légitime pour le faire ? Le Grand Lyon est jugé légitime pour parler d'environnement, de cadre de vie..., une ONG également, mais Leclerc, nettement moins. Sa campagne visant à sensibiliser les clients à préférer des sacs réutilisables aux sacs jetables n'a pas été bien perçue. Des affiches montraient un dauphin mort sur une plage entourée de sacs plastiques avec le slogan « les sacs jetables ont un prix ». Le message n'est pas bien passé : les clients ayant pris connaissance de cette affiche avaient tendance à aller faire leurs courses au marché ensuite et estimaient que l'enseigne n'était pas légitime pour diffuser un tel message concernant la sphère publique. En revanche, le programme d'accès à l'eau potable auquel participe Volvic pour l'Unicef parait plus cohérent. De l'eau achetée par le client est synonyme d'eau puisée au Sahel, de l'eau pour de l'eau, cette opération fait sens pour les consommateurs. Il y a toujours un transfert d'image, cela signifie qu'une entreprise doit bien choisir les causes qu'elle défend et les messages qu'elle souhaite faire passer. Mais une collectivité ou une association pourra se permettre davantage de choses sur les sujets touchant la sphère publique, l'environnement, etc. tant que la légitimité est reconnue, ou encore parce qu'il n'y a pas de but lucratif. Cela explique pourquoi la Prévention routière tente parfois des campagnes « trash » : la cause justifie tout et excuse tout.

 

Que vous inspire l'association des termes éthique et marketing ? Le marketing approche-t-il le champ de l'éthique ?

Il me semble que le marketing préfère parler de déontologie lorsqu'il s'agit de ses pratiques professionnelles. Pour moi, l'éthique est personnelle, traduit des notions morales, elle donne un cadre d'utilisation personnel de valeurs morales.
Quant à la consommation éthique, on parle plutôt de consommation socialement responsable, de même qu'on parle davantage d'entreprises socialement responsables, plutôt que d'entreprises éthiques. Les pratiques socialement responsables des entreprises renvoient à différentes réalités : privilégier les fournisseurs locaux, bannir le travail des enfants, limiter ses dépenses énergétiques, compenser ses émissions de CO2, ne pas utiliser tel ou tel produit chimique, ne pas discriminer, etc. Il y a aussi une notion de justice et d'équité dans l'éthique. Par exemple, quand vous prenez l’avion avec Air France, il vous semble normal qu’une femme enceinte ou une personne handicapée soit appelée en priorité pour entrer dans l’appareil. A l’inverse, si vous avez recours à la compagnie Easy-Jet, cela ne vous choque pas que ces mêmes personnes ne soient plus prioritaires, et que seules celles qui ont payé le supplément « fast boarding » passent devant les autres. Ce simple exemple pose la question de la justice perçue par le client de la compagnie aérienne : suis-je traité comme les autres et pourquoi ? Il est intéressant de considérer que, par nature, le marketing invite à différencier les clients, et, en fonction des critères choisis, une mesure peut paraître non-éthique par rapport aux valeurs personnelles de l’individu.
Il y a plusieurs niveaux de lecture de l'éthique car plusieurs niveaux d'engagement que Patricia Thiery  résume ainsi : « l'éthique comme un viatique » désigne la philosophie de l'entreprise, dont l'engagement consiste à rendre compatibles affaires et conscience sociale, « l'éthique dans la pratique » fait référence à la volonté de faire face à des responsabilités sociétales tout en s'adressant à des marchés porteurs, et « l'éthique pour la boutique » renvoie au simple prétexte commercial. C'est l'entreprise qui choisit par exemple de faire apparaître sur son paquet de café une photo de paysans brésiliens dans une plantation de café, le consommateur interprétera cela comme un café éthique même si ce n'est pas le cas. Après, les entreprises décident ou non de communiquer là-dessus, mais communiquer sur son engagement sociétal est « une arme à double tranchant » en termes d'image et de légitimité, comme je l'expliquais tout à l'heure.
En gestion, beaucoup des questions se posent actuellement autour de la finance éthique, c'est-à-dire respectant une morale judéo-chrétienne. Par exemple, au sein de notre laboratoire, des chercheurs travaillent sur la gestion des fonds éthiques et s'interrogent : est-ce qu'un investissement éthique est plus rentable ? Est-ce que l'actionnariat est plus fidèle ? Dans le champ de la finance, la finance islamique, reposant sur d'autres codes mais ayant les mêmes bases théoriques que ce que l'on appelle la finance éthique, se développe actuellement. Un doctorant de notre laboratoire travaille sur ce sujet. L'éthique est une notion à manier avec précaution car très marquée socialement.

 

Intéressons-nous à présent à des thèmes chers au Grand Lyon... Comment aborderiez-vous par exemple la question de la mobilité et des nouveaux modes de déplacement ?

Je ne connais pas précisément les problèmes qui se posent au Grand Lyon sur cette question. Si je considère que le problème central des nouveaux modes de déplacement est d’inciter les Grands Lyonnais à modifier leurs habitudes en matière de transports, alors cela me semble relever des tactiques de persuasion. Comment faire en sorte que les habitants laissent leurs voitures ? Pour traiter cette question, je m'engagerais sur la voie de la communication émotionnelle, plutôt que sur celle de la communication informationnelle, car je ne crois pas que les Grands Lyonnais n’ont pas conscience des alternatives existantes. Il faut avant tout travailler à la prise de conscience du problème et positiver la modification de comportement. Ainsi, il conviendrait de comparer un message qui fait peur, un message qui fait rire, un message didactique, un message qui fait honte... Et je m'attacherais à voir aussi les impacts de ces messages sur l'image du Grand Lyon.
Sur la forme du message, il me semble intéressant de comparer des supports traditionnels (affichage, magazine…) avec des supports plus « en contact » avec les usagers lorsqu’ils prennent leurs décisions de transport (stickers, « skinning » sur transports en commun, « mobile marketing »…) afin de rapprocher le moyen de transport de l’usager. Là encore, ce ne sont que des pistes qui demandent à être creusées et testées…

 

Dans le champ de l'environnement urbain, comment travailler sur les comportements des citoyens-usagers ? Comment les pousser à adopter des pratiques durables??

Je pense tout d'abord à l'étude des comportements d'empowerment, c'est-à-dire de capacitation. Cela désigne la manière dont l'individu se réapproprie l'environnement, comment il décide de prendre le pouvoir par l’acte de consommation ou de boycott par exemple.
Nous pourrions aussi étudier la communication du Grand Lyon face à une situation de boycott, de grève, de blocage... Par exemple, nous pourrions étudier les différentes stratégies du Grand Lyon dans ces situations : le déni, les excuses, la compassion, le silence, etc. Quels sont les antécédents de ces stratégies ? Quels sont les facteurs déterminant leur réussite ou leur échec ? Qu'est-ce qui fonctionne et qu'est-ce qui ne fonctionne pas ? Nous pourrions constituer une sorte de boîte à outils qui aiderait le Grand Lyon à savoir quoi répondre et quelle attitude adopter face à une situation de boycott d'un service ou d'un espace public.
Sous un autre angle, on pourrait étudier comment coproduire avec les citoyens, comment faire participer les usagers à la gestion du Grand Lyon, comment prendre en compte leurs avis, leurs réclamations, les voies citoyennes... C'est un mouvement de fond actuellement dans le marketing qui pourrait intéresser une collectivité territoriale comme le Grand Lyon.

 

Comment traiter la question de l'espace public, de ses différents usages, de son partage ?

Nous avons dans l'équipe des logisticiens qui pourraient aborder la question en termes de flux d'usagers et voir comment il est possible de les optimiser. Nous pourrions aussi nous concentrer  sur l'idée du lien, sur les échanges entre usagers. Souhaite-t-on les développer ? Comment peut-on s'y prendre ? Nous avons réalisé une étude pour la SNCF montrant comment les lieux fonctionnels peuvent devenir des lieux de socialisation ou de détente. Nous pourrions envisager comment allier l'aspect fonctionnel et l'aspect relationnel d'un espace public.