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L'entrepreunariat étudiant dans la région Rhône-Alpes

Interview de Isabelle SERVAIS

<< L’entrepreneuriat n’est pas une démarche solitaire, individualiste, c’est un acte collectif ! >>.

Déléguée générale de Vouloir entreprendre, Isabelle Servais témoigne ici du rôle de entrepreneuriat  étudiant dans la région Rhône-Alpes.

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Date : 15/12/2006

Vouloir Entreprendre est une association dont l’objectif est de sensibiliser les étudiants rhonalpins à la création d’entreprise et de leur donner envie d’entreprendre. Comment s’y prend-t-on pour insuffler l’esprit d’entreprise ?
Vouloir Entreprendre a deux principaux leviers pour le faire. D’une part, la mise en relation des étudiants avec des entrepreneurs. Le témoignage de ceux qui ont créé leur entreprise, qui ont vécu le parcours du créateur d’entreprise, joue un rôle fondamental dans les représentations qu’ont les étudiants de l’entrepreneuriat et contribue efficacement à lutter contre les idées reçues. Cela se traduit concrétement par l’intervention régulière d’entrepreneurs dans les établissements et l’organisation des Cafés de l’Entrepreneuriat, organisés de manière conviviale et interactive au Café de la République. D’autre part, la mise en situation des étudiants dans le cadre d’un concours de création d’entreprise virtuelle, Campus Création, qui permet une approche concrète de la gestion de projet dans sa totalité. Ce concours regroupe 11 établissements de la région lyonnaise (INSA, CPE, EM Lyon, Université Lyon 3, Ecole Centrale de Lyon, ECAM Lyon, ISARA Lyon, ITECH, Université Lyon 2, ISTIL, IDRAC Lyon) !

 

Vous misez beaucoup sur le rôle de l’entrepreneur modèle pour encourager les étudiants à la création d’entreprise. Ce rôle est-il bien compris des entrepreneurs locaux ?
Je ne doute pas qu’il soit bien compris, ce qui n’empêche pas qu’il est difficile de motiver des Bonnel ou des Aulas à venir sur les campus...! Les entrepreneurs d’aujourd’hui ont un rôle très important vis-à-vis des jeunes car ce sont eux qui illustrent l’aboutissement de la création d’entreprise et donnent aux jeunes une raison de s’accrocher.

 

Vous parliez des idées reçues sur l’entrepreneuriat. Quelles sont celles qui reviennent le plus souvent dans le cadre des conférences et débats que vous organisez entre les étudiants et les entrepreneurs ?
Il est vrai que les jeunes qui s’intéressent à la création d’entreprise ne se posent pas les mêmes questions que les personnes qui ont déjà une expérience professionnelle et veulent créer leur entreprise. De la part des jeunes, nous avons plus de questions à caractère personnel, relatives à la vie privée ou à l’organisation de son temps de travail. Ce sont des questions légitimes à un âge où ils n’ont pas encore fondé leur vie et se cherchent encore. L’idée qu’ils se font de l’entrepreneur est celle d’une personne laborieuse, empêtrée dans les démarches administratives, obligée de bosser jour et nuit pour atteindre son but, une sorte de surhomme !

 

Cette idée est-elle si loin de la réalité ?
Elle n’est pas complètement fausse ni complètement vraie ! Certes, il faut bosser pour créer sa boîte mais ce n’est pas incompatible avec une vie de famille équilibrée. Une des clés de réussite de l’entrepreneuriat est de savoir s’entourer des bonnes personnes et de s’adresser aux bons interlocuteurs. On économise ainsi de l’énergie et du temps ! C’est une autre idée reçue qui revient souvent chez les étudiants que de croire que l’entrepreneuriat est une démarche solitaire, individualiste ! Pas du tout, au contraire ! L’entrepreneuriat est un acte collectif. Les étudiants ne réfléchissent pas à cette dimension collective ! Ils sont, dès le début, engagés dans une démarche individualiste qui n’a qu’une finalité : obtenir leur diplôme. Le concours que nous organisons, Campus Creation, vise précisément à les faire sortir de cette démarche individualiste et les sensibiliser au travail en groupes. Cette mise en situation les séduit pour la plupart et elle permet de faire baisser les barrières à l’entrée.

 

En dehors du travail collectif que favorise ce genre de concours, quels sont les autres apprentissages que font les étudiants lorsqu’ils sont en situation de créer leur entreprise même virtuelle ?
Il y a en effet un autre apprentissage important dont ils font l’expérience dans cet exercice, c’est la gestion de l’échec. La création d’entreprise, c’est une expérience de la vie qui n’échappe pas au risque d’échec, ce sont même deux notions qui sont étroitement liées ! Je dirais même qu’entreprendre, c’est apprendre à gérer l’échec ! Or, dans leur parcours scolaire, rien de leur apprend à gérer l’échec ! Ils sont dans une forme de bulle, notamment les élèves des Grandes Ecoles, qui les protège et les déconnecte des risques d’échec. On ne leur apprend pas vraiment que l’on peut tirer parti de l’échec, faire des ajustements pour se remettre en course comme c’est le cas dans l’entreprise. Que ce soit dans les Grandes Ecoles où les étudiants sont surprotégés ou dans les Universités où ils sont presque sous-protégés, dans les deux cas, la relation au risque n’est pas saine !

 

D’où l’importance de vos actions qui visent à mieux innerver le monde étudiant des réalités économiques !?
Oui, Vouloir Entreprendre joue un rôle de passerelle entre le monde économique et le monde académique. C’est un peu ce que fait Créalys, l’incubateur, qui lui fait plus le lien entre le monde de la recherche et le monde économique. Dans les deux cas, c’est souvent le maillon manquant dans la chaîne de l’entrepreneuriat, et c’est le premier maillon !

 

Est-ce que l’on retrouve des “Vouloir Entreprendre” dans toutes les régions françaises ?
On en retrouve certainement ailleurs, mais nous avons quand même un rôle assez spécifique et original ! Dans la plupart des cas, les universités proposent des formations à l’entrepreneuriat. Nous, nous sommes à la fois sur le volet pédagogie et le volet communication/sensibilisation, c’est ce qui fait peut-être notre originalité !

 

On attribue souvent à la région Rhône-Alpes un dynamisme supérieur à la moyenne en matière de création d’entreprise. Quelles en sont les raisons selon vous ?
La région Rhône-Alpes cumule plusieurs avantages qui peuvent expliquer ce dynamisme. Tout d’abord une énergie colossale qui provient du potentiel étudiant de la région. Ensuite la grande diversité des établissements de formation qui est une clé essentielle de l’entrepreneuriat. C’est le croisement des compétences qui favorise le brassage des idées et la création d’entreprise ! J’ajouterai également le potentiel économique de la région, le 2e de France, qui de fait, est constitué d’un vivier de créateurs d’entreprises ! Et puis, je vois enfin l’implication forte des collectivités locales pour encadrer les initiatives et accompagner les entrepreneurs.

 

Avec Saint Etienne, quels sont vos liens ?
L’Université Jean Monnet fait partie de Vouloir Entreprendre et nous mobilisons également des entrepreneurs stéphanois dans le cadre de nos conférences. Par contre, l’ESC Saint Etienne et les Mines ne font pas partie du réseau, ils n’ont pas manifesté d’intérêt pour le faire...! Ce qu’il manque un peu à Saint Etienne pour faire jouer à plein la dynamique entrepreneuriale ce sont les relations inter-établissements (les Mines, Jean Monnet, ESC, etc.). C’est pourtant au cœur de notre action  que de favoriser ces échanges entre étudiants, nous sommes une association inter-établissement !