Vous êtes ici :

Histoire du service Arbres et Paysage au Grand Lyon

< Retour au sommaire du dossier

La multiplication des plantations d'arbres participent à la lutte contre la chaleur en ville
La multiplication des plantations d'arbres participent à la lutte contre la chaleur en ville, 2021© Thierry Fournier - Métropole de Lyon
Responsable de l'Unité Arbres et Paysage

Interview de Frédéric Ségur

<< La place et la fonction du végétal dans la stratégie de développement urbain me semblent encore à réévaluer >>.

Le végétal dans la ville a eu droit à un service au début des années 90, dans un contexte où l’écologie urbaine devenait un axe nouveau de l’action communautaire.

Nous interrogeons Frédéric Ségur, responsable de l’Unité Arbres et Paysage, rattachée à la direction de la Voirie du Grand Lyon, sur le tournant que sa création a représenté dans l’action du Grand Lyon en matière d’aménagement, et sur sa démarche d’innovation.

Réalisée par :

Tag(s) :

Date : 12/05/2009

Création du service Arbres et paysages

Le Grand Lyon a créé un service Arbres et paysages en 1992. Peut-on dire que c’est une rupture, et que depuis le Grand Lyon a intégré ces nouvelles composantes ?

 

Lors de la création de la Communauté urbaine, l’arbre, le végétal, la nature, le paysage ne faisaient pas partie de la culture, de l’organisation et des missions de l’établissement. Ces dimensions ont été simplement oubliées. L’arbre fait des feuilles, il est considéré comme accidentogène, ses racines déforment les voiries…, bref il est considéré comme une gêne. La nature était en quelque sorte cloisonnée dans les « espaces verts », sortes de « ghettos de nature ». On parle d’ailleurs à cette époque d’espaces verts par opposition avec le reste de la ville, qui est un espace gris. On n’envisage pas qu’il soit possible d’avoir un espace qui soit les deux à la fois.
La création de la mission Ecologie et du service Arbres et Paysage ont traduit une rupture avec l’idéologie du développement urbain qui prévalait depuis la création de la Communauté urbaine.

 

Quelle était cette idéologie ?

 

Il y a 40 ans, l’idéologie du développement de la ville était fonctionnaliste. Les services urbains ont été créés avec cet objectif : construire des routes pour répondre à l’essor de la voiture, industrialiser les processus de nettoyage, récupérer l’eau dans des tuyaux en raison de l’imperméabilisation des sols, créer des stations d’épuration… Cette logique fonctionnaliste ignorait les notions de cadre de vie et d’environnement. Ce n’est qu’à la fin des années 80 que les habitants ont manifesté fortement leur mécontentement par rapport à cette manière de concevoir la ville. Cette politique avait en effet conduit à créer des villes dangereuses avec la circulation automobile, des villes polluées, des villes bruyantes, où il était devenu difficile de bien vivre.
Dans les années 70-80, face à une augmentation de la circulation automobile de l’ordre de 5% par an, la réponse de la Communauté urbaine consistait à réaliser 5% d’infrastructures supplémentaires, dans une logique purement calculatoire, en estimant qu’il fallait agrandir les tuyaux pour faire passer des flux de plus en plus importants. La logique a été exactement semblable pour l’assainissement. Jusqu’au jour où cette logique se heurte à des murs : si l’on veut continuer à élargir encore les voies urbaines, il faut abattre les immeubles haussmanniens pour créer des autoroutes urbaines, ce qui augmenterait les nuisances, rendant la ville alors invivable. A un moment donné, on prend conscience que ce modèle ne fonctionne plus.

 

Vous évoquez des mouvements de contestation en provenance des habitants. C’est de là qu’est venu le changement ?

 

Les habitants demandaient le changement à travers les comités d’intérêts locaux, les associations de quartier, les associations de protection de la nature. En parallèle de cette revendication de la société civile, on assistait à la montée d’un courant politique « écologiste », portant des valeurs de protection du cadre de vie. Cette question est très vite devenue un enjeu politique, et les partis politiques traditionnels ont senti qu’ils ne pouvaient plus faire abstraction de ces revendications portées autant par la société civile que par d’autres partis politiques.
Je pense aussi que le Grand Lyon a été tellement loin dans les années 70-80 dans l’excès fonctionnaliste, qu’il devait nécessairement aller très loin dans le sens inverse. Un des excès les plus manifestes de cette période a été le passage de l’autoroute à Perrache, à la place du cours de Verdun, alors le plus grand espace public de Lyon, reliant Rhône et Saône, formant une esplanade comparable au Champ de Mars ou aux Invalides à Paris. Ce lieu de festivité, de convivialité, avec ses 800 arbres a été considéré comme une opportunité foncière pour faire passer une autoroute. Pour moi, cela a été le point d’orgue de la vision fonctionnaliste à Lyon, et sans doute le déclic pour une remise en cause de ce modèle urbain par les Lyonnais.

 

La position de leader du Grand Lyon en matière d’arbres et paysages viendrait de ce retour de balancier ?

 

Oui, on a été tellement loin dans la logique fonctionnaliste que le retour de balancier est sans doute très fort. Aujourd’hui l’agglomération lyonnaise est la collectivité française qui réalise le plus de plantations urbaines, en quantité et sans doute aussi en qualité. Un enjeu politique fort a alors été perçu. Autour des années 1990, le politique a évolué plus vite que le technique, et c’est bien le politique qui a imposé un nouveau modèle, permettant en particulier de rétrécir les routes, et donc de laisser de la place pour réintroduire le végétal. Le changement de discours des élus a été manifeste : hier on pensait que la nature était autour de Lyon, à la campagne, suffisante et facilement accessible, aujourd’hui, on considère pour de multiples raisons que la nature doit être davantage présente en ville.

 

Penser global et agir local

Des personnes ou associations ont-elles fait, plus que d’autres, bouger la politique communautaire sur ces questions d’environnement ?

 

Après les élections de 1989, l’exécutif de l’époque a proposé à des personnes comme Yves Vérilhac, alors président de la FRAPNA — association qui a été par ailleurs un des principaux contradicteurs du Grand Lyon sur cette politique fonctionnaliste —, d’entrer au cabinet de Michel Noir, non pour les faire taire, mais pour chercher à apporter des corrections environnementales à une organisation communautaire bâtie uniquement sur des logiques fonctionnelles. Ce lien entre la vision alternative de l’aménagement urbain et le politique a permis de faire beaucoup évoluer la culture du politique sur les logiques d’aménagement urbain. Je pense que Henri Chabert, cheville ouvrière de l’aménagement urbain dans les années 90-2000, s’est par exemple acculturé à cette vision alternative de l’aménagement de la ville.
Il est important de se souvenir de l’actualité internationale : l’année 1992 est à la fois celle de l’adoption de la première charte de l’écologie du Grand Lyon et celle de la Conférence de Rio. On commence à parler des enjeux environnementaux planétaires, du « penser global et agir local ».
Il y a donc convergence : effets négatifs devenus manifestes de la politique fonctionnaliste, essor des aspirations environnementales, changements internationaux et émergence de ce que l’on va appeler développement durable. Cette période est donc véritablement charnière.

 

C’est la fin du modèle fonctionnaliste ?

 

Non, car on ne remet pas en cause un système installé qui naturellement fera tout pour s’auto protéger. Il a accepté de se réformer, mais seulement à la marge. Les questions environnementales et de développement durable ont été prise en compte, on arrive à des réalisations significatives, mais sans que l’on n’ait véritablement remis en cause de manière globale la façon d’organiser et de gérer la ville. Aujourd’hui, j’estime que les questions environnementales et les enjeux de développement durable au Grand Lyon sont encore considérés comme des artefacts ou des contraintes, car le moule fonctionnaliste de départ n’est pas cassé. Si c’était le cas, la culture de projet pourrait aller beaucoup plus loin. Les enjeux environnementaux et sociétaux sont tels qu’il faudrait une remise en cause beaucoup plus profonde de l’organisation.

 

Pourtant, on cherche depuis des années à réaliser des actions plus « transversales », impliquant différents services, compétences, approches… ?

 

La transversalité des actions a encore du mal à passer en termes d’organisation et de gouvernance de la technostructure, les questions transversales ne sont pas soutenues, sont mal vues, sont même presque taboues car elles coïncident mal avec les schémas de fonctionnement. Je pense par exemple à des projets cherchant à équilibrer la place du végétal dans un aménagement urbain et faire en sorte que le végétal participe à une stratégie d’assainissement pluvial : cela rentre encore difficilement dans les logiques individuelles des grandes directions. Spontanément, les normes ressurgissent, ce qui évite d’avoir à discuter avec les autres, d’avoir à concevoir différemment.

 

Pouvez-vous donner un exemple ?

 

Par exemple, on ne peut pas planter un arbre à moins de deux mètres d’un réseau, ou il faut telle structure pour qu’une voirie soit stable. On se rend compte, en voyageant, que ces normes sont exorbitantes par rapport à celles d’autres pays qui ont su trouver des solutions de compromis intéressantes.
Autre exemple, quand il a fallu améliorer les techniques opérationnelles des plantations, on s’est aperçu que les standards techniques, qui dataient du 19ème siècle, n’étaient plus adaptés à la complexité de la ville d’aujourd’hui. Au 19ème siècle, où l’objectif circulatoire n’était pas une finalité, on utilisait par exemple 25 mètres cubes de terre pour planter un arbre. Ce volume s’est réduit en un siècle à un mètre cube ! Conséquence : les arbres plantés dans les années 70-80 ont dépéri, car il existe une corrélation directe entre le potentiel du sol et l’espérance de vie de l’arbre... En 1996, 1000 arbres ont été abattus dans le Grand Lyon. 25% avaient moins de 10 ans, seulement 10% plus de 100 ans. Il nous a donc fallu réinventer des standards et des règles techniques, répondre à l’enjeu économique, pour faire des investissements plus durables.

 

Le cloisonnement vertical  frein à l’innovation

Des normes vous sont donc opposées pour refuser l’implantation d’arbres en milieu urbain…

 

Il faut nécessairement chercher à satisfaire les différentes exigences des producteurs et acteurs de la ville. Les exigences de la voirie portent sur la stabilité des sols, sur leur portance notamment, alors que l’exigence agronomique fondamentale pour planter des arbres, c’est d’avoir des sols meubles. C’est donc quelque part antinomique de vouloir planter des arbres sur des voiries. Mais il est possible de répondre à ces deux exigences en recherchant et en développant de nouvelles techniques : par exemple le mélange terre/pierre, répond aux deux exigences en créant un « squelette » indéformable conforme aux attentes de voirie tout en maintenant un réseau aéré de terre satisfaisant pour les exigences de plantation.
Mais il faut toujours se battre contre la facilité, car il est toujours plus facile d’appliquer sa méthode que d’élaborer collectivement d’autres modèles techniques qui seront nécessairement plus contraignants. Il faut surtout se battre contre les logiques verticales et le cloisonnement des différents savoirs. Chaque discipline a son propre jargon, son propre vocabulaire, sa propre culture et ses propres normes, qu’il est toujours plus facile de suivre. Il est plus facile de mener un projet en appliquant ses propres standards, en repoussant toute proposition de résolution transversale, même si cela coûte plus cher, même si cela ne répond pas à la demande sociale et même si c’est moins durable. Or, on s’aperçoit que toutes les marges de progrès dans l’aménagement urbain sont à la frontière des différentes disciplines et demandent nécessairement l’engagement d’un travail transversal.

 

Là encore, auriez-vous un exemple ?

 

Considérez les noues, ou fossés paysagers. Ils offrent des solutions intéressantes en matière de gestion de l’eau pluviale en permettant d’accroître les surfaces perméables, et ils augmentent par ailleurs les surfaces plantées… Sauf que les trois grandes directions urbaines du Grand Lyon se sentent peu concernées par leur développement et leur entretien. En schématisant, pour la direction de l’Eau, ce n’est pas un ouvrage d’assainissement ; pour la Propreté, ce n’est pas une zone mécanisable ; pour la Voirie ce n’est pas du minéral… Ainsi ce qui apparaît à tous comme une bonne solution risque d’être rejeté car la technique innovante se situe à la frontière des savoirs faire classiques.
Ce problème du cloisonnement vertical comme frein à l’innovation a été renforcé, il me semble, par la création des centres de responsabilité au milieu des années 2000. Chaque direction doit rendre des comptes sur la manière dont elle dépense l’argent (masse salariale, dépenses d’entretiens…) ce qui ne favorise pas la réalisation de projets transversaux, la noue paysagère dans mon exemple, dont les coûts de gestion doivent se répartir entre plusieurs directions. Il faudrait envisager de manière dynamique des évolutions des modes d’organisation, de gestion, et de financement.

 

Un service innovant

Votre service est généralement perçu au Grand Lyon, et à l’extérieur, comme innovant. Où se situe l’innovation ?

 

L’innovation est plutôt dans la conception de projet, avec la redéfinition de la place du paysage dans l’aménagement de la ville ; elle est également au niveau technique, dans la manière de faire. Le service s’est placé tout de suite dans une démarche d’expérimentation et a noué rapidement une multiplicité de collaborations avec des écoles et des universités (Angers, Nancy, Montpellier…) parce que les connaissances en matière d’arboriculture urbaine étaient très insuffisantes et empiriques à cette époque. Ses acquis méthodologiques, notamment le programme « Sciencil » développé lors de l’aménagement de la Cité Internationale de Lyon serviront d’exemple national en matière de recherche appliquée dans ce domaine… Cette démarche a notamment inspiré la création de l’association « Plante et Cité » devenue leader d’opinion en France et en Europe sur les questions des paysages urbains.

 

A quoi sert-il d’innover dans ce domaine des paysages et du végétal ?

 

Le besoin d’innovation en matière d’arboriculture urbaine repose sur deux principaux objectifs : assurer la qualité des investissements (leur durabilité) d’une part, rechercher des solutions pour minimiser les coûts d’entretien d’autre part. Il se situe à la conjonction d’enjeux environnementaux (théoriques, cycle de l’eau), économiques (attractivité du territoire) et sociaux (demande sociale). Et pour faire plus avec moins, il faut expérimenter…

 

Ressentez-vous des freins à l’innovation ? Je sais qu’à la Communauté urbaine, on pense facilement que si l’innovation met trop de temps pour atterrir et faire ses preuves, c’est du temps perdu…

 

Un des freins culturels à l’innovation est paradoxalement la culture du service bien fait. Nous sommes dans une culture de la commande publique, où l’on commande des réalisations maîtrisées, validées par un cahier des charges, qui ne peuvent par conséquent conduire qu’à une réussite. Si cela échoue, on cherchera à réparer rapidement sans forcément chercher à comprendre la cause de l’échec. Dans une logique d’expérimentation, en revanche, on a beau établir un protocole pour minimiser le risque d’échec, l’échec fait partie de l’expérimentation. L’échec est même souvent, si l’on est capable de l’analyser, ce qui fait le plus progresser. Or, il est difficile dans le cadre d’un marché public de se placer dans une logique expérimentale dont le résultat peut s’avérer aléatoire. Il faudrait par ailleurs systématiser une culture d’expertise de l’échec.

 

Qu’est-ce ?

 

Il est important de savoir pourquoi ce que l’on fait marche, en bien ou en mal. Que sont devenus, à titre d’exemple, les espaces publics réalisés depuis 20 ans ? Pourquoi, sur telle place, les arbres sont-ils morts au bout de 10 ans ? Il nous manque encore au Grand Lyon cette culture de l’évaluation des réalisations. Ce serait une clé de progrès, en permettant déjà de ne pas reproduire les échecs, et en permettant de définir des points de vigilance.

 

Quel est votre système d’innovation ?

 

Nous sommes plutôt support pratique à l’innovation et à l’expérimentation. Le Grand Lyon peut être un partenaire de la R&D en mettant à disposition ses moyens d’aménageurs. Notre service joue les facilitateurs, en activant un réseau de compétences constitué d’écoles d’ingénieurs, de labos de recherche, de bureaux d’études, d’entreprises et de pilotes d’opérations du Grand Lyon.
L’intérêt du lien entre praticiens et chercheurs, c’est de faire passer une idée théorique en application pratique. La collectivité n’a pas vocation à faire de la recherche fondamentale. Elle peut faire de la recherche appliquée en partenariat, mais ce n’est pas non plus sa vocation. Le Grand Lyon est un aménageur ; il peut ainsi proposer son territoire ou ses projets comme support d’observation ou d’expérimentation grandeur nature pour les chercheurs. Ces recherches doivent clairement viser à répondre à des interrogations exprimées par la collectivité.

 

Pouvez-vous donner un exemple d’expérimentation menée par votre service ?

 

Nous souhaiterions disposer d’un substrat de substitution à la terre végétale pour réaliser les plantations urbaines de demain. En effet depuis le 19ème siècle jusqu’à aujourd’hui, la terre végétale utilisée en ville est issue du décapage de terres agricoles en liaison avec l’étalement urbain. Or, si nous voulons stopper ce mécanisme tout en reconstruisant une ville dense et fortement paysagée, il faut imaginer la fabrication d’un substrat… Nous allons indiquer aux scientifiques de quels matériaux, qui sont aujourd’hui des déchets urbains, on dispose au Grand Lyon (boues des stations d’épuration, gravats, limons de décapage…) et leur demander comment, à partir de là, il est possible d’obtenir un substrat durablement fertile. Les scientifiques vont établir des protocoles d’expérimentation et d’évaluation des résultats. Le partenaire scientifique proposera une méthodologie d’expérimentation, qui sera mise en œuvre dans le cadre d’un chantier d’aménagement. Pour diluer le coût du risque, on va tester le substrat sur une petite portion du projet, puis voir comment l’intégrer ensuite à un processus industriel, c'est-à-dire reproductible à grande échelle.
Tout cela s’inscrit dans un cahier des charges et doit se gérer en terme de prise de risque : le risque est-il partagé entre scientifiques, entreprises, collectivités ? Il faut en discuter avant. Cela peut faire évoluer efficacement les modes de faire si on se place dans cette logique d’expérimentation avec une rigueur scientifique. C’est en tout cas ce qu’on essaye de faire notamment avec le réseau Plante et Cité.

 

L'innovation au Grand Lyon

Considérez-vous que le Grand Lyon en fait assez en matière d’innovation ?

 

Il gagnerait certainement à valoriser et médiatiser davantage la R&D et l’innovation. Souvent, une innovation sera mieux connue à l’extérieur grâce à des échanges ou des colloques par exemple, alors qu’à l’intérieur du Grand Lyon, elle risque d’être négligée.
On gagnerait aussi à être plus exigeant en matière de rigueur scientifique lors des expérimentations, alors que l’on reste trop souvent dans des méthodologies empiriques.

 

La place du végétal

Finalement, estimez-vous que le végétal a trouvé toute sa place au Grand Lyon ?

 

Non pas encore, même si le Grand Lyon est pionnier pour beaucoup de thèmes, le végétal reste une composante marginale, éminemment fragile. En plus, elle est un peu flottante, à cheval entre les communes, le Grand Lyon et le domaine privé : la notion de cadre de vie ou de paysage est une réalité du territoire qui s’accommode mal des découpages administratifs. Pourtant, il va falloir changer de paradigme, considérer la végétation non plus seulement comme un élément de décor, mais comme un élément actif de la qualité de vie. C’est l’avenir ! Les éco quartiers en Suède, au Danemark… l’ont compris et font jouer à la structure espace vert des fonctions d’assainissement pluvial, en tirant partie des fonctions filtrantes et d’évaporation des plantes. Dans le Plan Climat du Grand Lyon, on se rend compte que la végétation peut jouer aussi un rôle de climatiseur et de régulateur des pics de chaleur, ceci de deux manières : de manière passive par l’ombre et de manière active par l’évapotranspiration : pelouses, arbustes ou arbres pompent de l’eau dans le sol et la restituent sous forme de vapeur d’eau dans l’atmosphère, abaissant les températures. La place et la fonction du végétal dans la stratégie de développement urbain me semblent encore à réévaluer.

 

Quelles solutions voyez-vous pour que le végétal ne soit plus marginalisé ?

 

Il faut surtout revoir les manières de faire, favoriser les projets pluridisciplinaires, où l’on met autour de la table des gens différents qui apportent des visions complémentaires. La culture de projet a permis d’avancer vers cette synthèse pluridisciplinaire, mais elle reste sous-développée, pas assez encouragée dans l’organisation du travail et dans les actes. Cela fonctionne surtout aujourd’hui grâce à des réseaux de personnes, mais au niveau de l’organigramme, on voit bien que cela n’existe pas, n’est pas affirmé ou réellement pris en compte. Cette logique de fonctionnement n’entre pas dans les boîtes trop étanches et concurrentielles qui organisent encore notre système.