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Prospective du travail 3/7 : Aspirations des professionnels

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Illustration d'un phare

Étude

Plus de sens pour une meilleure performance, plus d'autonomie pour une meilleure organisation.

Quelles nouvelles valeurs au travail ?
Découvrez nos éléments de réponse à travers des points « à retenir » ci-après, et téléchargez sur cette page 10 fiches tendances :
• Une quête de sens au travail qui interpelle l’employeur
• Vers un retour en grâce des métiers manuels et de leur socle de valeurs)
• Pour se saisir des nouveaux enjeux, réinventer le lien travail-militantisme
• Vers des parcours professionnels moins linéaires : par envie ou par nécessité ?
• Entre indépendance et sécurité, quel statut pour le travailleur de demain ?
• Le choc des générations : un vrai faux problème ?
• Travail plaisir, travail gagne-pain, duel ou duo ?
• La flexibilité horaire pour mieux concilier vies personnelle et professionnelle
• Une attente croissante de protection face aux effets négatifs du numérique
• Relativiser la place du travail pour mieux en redéfinir les contours

Ce chapitre est le 3ème de l'étude « Mon travail et moi ». Découvrez les autres chapitres sur Millénaire 3 !

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Date : 25/11/2021

À retenir

 

→ Un nombre croissant de personnes souhaitent aligner leurs valeurs et aspirations et leur travail

Les trois premières tendances révèlent qu’un nombre croissant de personnes souhaitent aligner leurs valeurs et aspirations et leur travail, et que cela contribue à modifier les organisations sur de multiples plans. La quête de sens au travail (fiche 1), l’intérêt croissant pour le travail manuel (fiche 2), mais aussi les nouvelles formes d’hybridation entre militantisme et travail (fiche 3) sont trois tendances à travers lesquelles les professionnels, en particulier les nouvelles générations, affirment une recherche de cohérence de leur travail avec leurs convictions et engagements. Cela se manifeste tant au niveau de l’organisation interne des entreprises (qualité du management, articulation des temps, égalité professionnelle, etc.) que de leurs activités et impacts externes, environnementaux et sociaux. Afin de rester attractives mais aussi performantes, les organisations ont alors tout intérêt à se saisir de ces aspirations et nouvelles formes d’engagement afin de préciser leur identité, leurs activités, pour trouver des points d’appui à la mise en œuvre des transitions nécessaires.

 

→ Une double attente d’autonomie et de sécurité dans les choix professionnels des individus

Un second ensemble de tendances met en évi- dence une double attente d’autonomie et de sécurité dans les choix professionnels des individus avec d’une part des parcours professionnels de moins en moins linéaires du fait de changements d’activités et d’organisations (fiche 4), et d’autre part un essor des statuts d’indépendants et des hybridations des formes de travail (fiche 5). Nous mettons en évidence que si ces tendances répondent à des aspirations des professionnels (autonomie, flexibilité), ces aspirations sont elles- mêmes influencées par la donne du marché du travail et les discours néolibéraux incorporés. Entre flexibilité et sécurité, les aspirations évoluent au fil des expériences professionnelles, et nous mènent à relativiser les discours annonçant la fin des carrières et du salariat.

 

→ L'âge n’est pas la variable la plus structurante pour appréhender le devenir du travail

Les deux tendances suivantes proposent une analyse contre-intuitive. Elles indiquent que si chaque génération apporte et diffuse des idées ou des valeurs nouvelles, l’âge n’est pas la variable la plus structurante pour appréhender le devenir du travail. La tendance sur l’intergénérationnel (fiche 6) comme celle sur la dualisation du marché du travail (fiche 7) montrent que les nouvelles générations ne peuvent pas être ré- duites à un rapport au travail « post-matérialiste », comme on l’entend souvent, que les aspirations de la jeunesse (besoin de sens, utilité sociale…) sont souvent portées par d’autres classes d’âge au sein de l’entreprise, et que les enjeux traditionnels du travail (carrière, fonctionnement des collectifs, articulation des temps, etc.) sont portés par toutes les générations. Moins que l’âge, un clivage central est mis en exergue dans ces fiches entre les professionnels pour qui le travail est/devient une fin (le travail apporte de bonnes conditions matérielles et est vécu comme vecteur d'épanouissement) et ceux pour qui il reste un moyen (le travail est précaire et de mauvaise qualité).

 

→ Une véritable recomposition de la sphère du travail dans nos vies

Enfin, le dernier ensemble montre comment différentes tendances, la demande de flexibilité horaire (fiche 8), le déploiement du numérique et ses impacts (fiche 9) contribuent à une véritable recomposition de la sphère du travail dans nos vies, dans un contexte où la centralité du travail semble de plus en plus en plus discutée, tant en termes quantitatif que symbolique (fiche 10). La demande de flexibilité horaire en lien avec le déploiement numérique est une aspiration particulièrement partagée. Elle est perçue positive- ment parce qu’elle apporte une meilleure articulation des temps personnels et professionnels, mais elle a aussi un pendant négatif : surengagement, perte de lien à la sphère professionnelle, travail en soirée et week-end, etc. Des tendances au surengagement cohabitent ainsi avec une aspiration à réduire la centralité du travail dans la vie au profit d’autres sphères (famille, activités militantes, sportives, créatrices, manuelles), témoignant d’un fort malaise vis-à- vis d’une sphère professionnelle qui ne répond pas toujours au besoin de sens et aux désirs d’engagement.

 

Ces tendances interrogent l'évolution des organisations publiques

 

➞ Comment faire en sorte que le « sens du travail » ne soit pas affaibli par un manque de « sens au travail » ?

Le sens du travail est lié à la perception qu’à l’individu de l’utilité de son travail et à la signification qu’il lui attribue, alors que le sens au travail est nourri par les conditions d’exercice du travail au sens large : la qualité des relations avec les collègues et la hiérarchie, le fait d’avoir ou non de l’autonomie et des occasions d’apprentissage, etc. Au sein des organisations publiques engagées auprès des usagers et des citoyens le « sens du travail » se dégage normalement aisément. En revanche, des ingrédients qui contribuent au « sens au travail » font fréquemment défaut, suscitant un possible désengagement des professionnels : lourdeur bureaucratique, épuisement à rechercher de la transversalité, contexte d’optimisation, manque d’autonomie ou de reconnaissance, etc. Demain, un argument de l’attractivité des organisations publiques sera, outre le salaire, de permettre aux professionnels de remplir leur travail de sens, à la fois en donnant à leurs missions des finalités qui résonnent pour eux, et en faisant en sorte que les conditions de travail permettent concrètement de les remplir, dans de bonnes conditions.

 

➞ Comment trouver l’équilibre entre l’objectif de performance de l’organisation et les attentes des salariés ?

L’engagement des salariés peut être une ressource intéressante pour l'employeur afin de développer de nouvelles activités. Comment tirer parti de la soif de sens, d’utilité, d’impacts positifs de l’employeur sur la société et la planète, pour répondre à de grands enjeux sociétaux et environnementaux ? À l’inverse, comment réguler les aspirations des professionnels pour maintenir la cohérence de l’organisation ? Et comment éviter les effets déceptifs pouvant être provoqués par des promesses non tenues ?

 

➞ Comment éviter le risque de raisonner seulement à partir des aspirations de certaines catégories professionnelles ?

Les fiches montrent une propension générale à survaloriser les aspirations portées notamment par les jeunes générations et par les catégories les plus diplômées, au risque de prendre des décisions inadaptées et d’exclure une partie du corps professionnel à cause d’une communication mal ciblée.

 

➞ Alors que l’on note le retour en grâce du manuel, d’un travail porteur de sens, ainsi qu’un phénomène accéléré d’obsolescence des compétences, comment les collectivités peuvent-elles se saisir de ces tendances ?

Ainsi, alors que le travail manuel revient en grâce auprès de jeunes qui y voient le moyen de donner du sens à leur travail, se saisit-on réellement de cette tendance ou la laisse-t-on passer ? N’est- ce pas l’occasion de valoriser des métiers en réactualisant en même temps le discours porté sur eux (utilité sociale, …) ?