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LUTB : solutions de transport pour la ville de demain

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Portrait d'Eric Poyeton
Président du pôle de compétitivité Lyon Urban Truck&Bus

Interview de Eric Poyeton

<< Dans les transports de demain, il n’y a pas de science-fiction, il n’y a que des solutions pragmatiques >>.

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Date : 29/05/2010

Le Pôle LUTB travaille à trouver des solutions de transport pour la ville de demain. Doit-on imaginer une ville du futur à la façon du film Le 5e élément de Luc Besson, avec des déplacements verticaux, des véhicules volants, etc ?

Non, il n’y aura pas ces 3e ou 4e dimensions que vous évoquez ! On ne se déplacera pas plus vite et le scooter volant n’est pas pour demain. Tout restera sur roue, on ne décollera pas du sol. On ne va pas vers une ville du futur dans laquelle les solutions de transport seront en complète rupture par rapport aux solutions d’aujourd’hui. Elles seront fortement améliorées, mais ce ne seront pas des ruptures comme on a pu en voir au siècle dernier, avec une accélération sans précédent des temps de transport. Dans les transports de demain, il n’y a pas de science-fiction, il n’y a que des solutions pragmatiques.

 

Qu’entendez-vous par « solutions pragmatiques » ?

Le panel de solutions sera diversifié et sera la concrétisation de briques élémentaires. Une solution de transport, c’est un ensemble de briques ; on peut imaginer améliorer tout un ensemble de ces briques-là pour arriver à une innovation. Aujourd’hui, sur la brique « système d’informations », si on donne des nouveaux éléments d’aide à la conduite pour le chauffeur (des GPS plus performants) on peut imaginer que cette brique-là ajoutée à d’autres, apportera une solution globale bien plus efficace. Il y a des travaux de recherche sur toutes les briques et c’est la combinaison de toutes ces briques qui donnera de nouvelles solutions de transport.

 

L’urbanité est un élément essentiel du pôle LUTB. Pourquoi vous intéressez-vous quasiment uniquement au transport en milieu urbain ?

On est bien conscients que, par exemple en Europe, la ville est le modèle le plus efficace pour vivre à la fois sa vie privée et professionnelle. Le transport de personnes en ville est donc clé. Et c’est exactement pareil pour les marchandises puisqu’en Europe, 80% du transport de marchandises est fait sur des distances de moins de 150 km. On est donc bien dans l’urbain et le périurbain.

 

A l’avenir, les gens seront donc davantage citadins ?

A l’avenir, les villes seront de plus en plus étendues. C’est ce que l’on voit déjà : le Grand Lyon s’étend. Dans nos réflexions, on prend aussi en compte un élément évident : les ¾ des villes existent déjà… Il ne faut pas qu’on raisonne sur les villes nouvelles. On pourra trouver ici et là des créations d’éco quartiers, etc. mais ce seront des démarches qui partiront d’un existant. Il y aura peu d’expériences dans lesquelles on détruira tout pour reconstruire.

 

Le premier de vos cinq programmes porte sur la chaîne cinématique. De quoi s’agit-il ?

La chaîne cinématique, c’est tout ce qui sert à la mobilité du véhicule, du volant aux roues, avec la plus grosse partie qu’est le moteur. Ce programme vise à trouver un panel de solutions pour améliorer les moteurs, les boîtes de vitesse, les essieux, toute la transmission et tout le système d’échappement des bus et poids lourds.

On peut imaginer des solutions 100% électriques pour les hyper centres historiques, comme le Vieux Lyon par exemple. On peut imaginer un véhicule hybride (électrique et traditionnel) sur des usages un peu plus difficiles, comme pour les bennes à ordures ménagères, ou pour des bus qui circulent dans des endroits où il n’est pas possible d’avoir un système de trolley. On peut imaginer des solutions avec du gaz, du biocarburant, etc.

Mais la solution de transport ce n’est pas seulement la mobilité du camion ou du bus, c’est aussi son inscription dans la ville, son dialogue avec les infrastructures. C’est l’objet du 2e programme : « systèmes de transport ».

 

Vous imaginez ainsi les aires de livraison du futur ; à quoi ressembleront-elles ?

Les aires de livraison seront différentes d’aujourd’hui : ce ne seront plus des places de stationnement réservées sur lesquelles au final tout le monde peut se garer. On y accèdera sans doute par un système de borne d’accès et de réservation à distance.

Il y aura sans doute le nécessaire à recharger les batteries électriques pendant que le camion ou le bus sera à l’arrêt. On peut imaginer aussi un système de boîtes postales : tous les colis sont livrés au même endroit et ce sont les commerçants qui viennent les chercher. J’ai bien dit « imaginer », car il reste à le prouver. C’est pour ça qu’on va faire des démonstrateurs pour tester cela en vraie grandeur.

 

La multiplication des commandes à distance sur Internet, notamment pour les grandes surfaces alimentaires, ne va-t-elle pas créer de nouveaux besoins de livraison ?

Pour les grandes surfaces, c’est le moins pire : généralement, le camion part faire sa tournée quand il est bien chargé ; il est donc assez optimisé. Reste à le rendre un peu plus propre. En revanche, quand tout un chacun achète sur Internet une ramette de papiers pour imprimante ou une cartouche d’encre, là, c’est tout un tas de véhicules qui viennent nous livrer et qui sont très peu chargés et très peu efficaces.

 

L’idée est-elle de rationaliser tous ces déplacements ?

Elle est surtout de les massifier. Quitte à ce que le consommateur ne reçoive pas toute sa marchandise dans des délais si courts qu’aujourd’hui ! A un moment donné, il va falloir faire des choix. Entre un transport optimisé un peu plus long et moins coûteux et un transport qui ne limite pas ses émissions de gaz, que vous ne payez jamais au bon prix, et qui vous livre le lendemain matin. Le consommateur aura des choix à faire. Et les politiques et décideurs économiques auront des propositions à faire pour que le changement de mentalité se fasse.

 

Comment s’effectuera l’approvisionnement en carburants ? Comment imaginez-vous la station service du futur ?

La gestion de l’énergie est intégrée à nos réflexions. Mais dans notre optimisation du transport de marchandises et de personnes, on ne va pas dans le sens de la station service en ville. Il faut imaginer : tout part d’un entrepôt. Des jouets y arrivent par gros containers. Il faut les mettre en paquets plus petits pour les livrer dans divers magasins en ville, par un moyen de transport efficace pour la ville. Je pense que le plein sera fait pendant le chargement. Ou au dépôt pour les transports en commun. Bus et camions n’auront donc plus besoin de faire le plein en ville. On va travailler aussi sur la consommation, la taille des réservoirs, les énergies alternatives. Quand le moyen de transport s’arrête, il faut qu’il fasse à la fois le plein de marchandises ou de voyageurs, et le plein d’énergie. Car minimiser le nombre d’arrêts, c’est optimiser l’efficacité. C’est un point de notre 3e programme, « architecture et confort ». Comment choisir le bon emplacement dans les véhicules pour le stockage des marchandises et des énergies ? Comment concevoir un design et une ergonomie qui incitent les passagers à prendre le bus ?

 

Vous travaillez aussi sur la sécurité…

C’est l’objet de notre programme « sécurité et sûreté ». On est obligés de le traiter parce que globalement, la sûreté des marchandises est essentielle si l’on prévoit que les camions livreront les marchandises par un système similaire aux boîtes postales. Il ne faut pas qu’on puisse voler les marchandises. Si on travaille sur de nouvelles énergies, imaginons des bus à hydrogène, il faudra également que les passagers soient en sûreté alors qu’il y a une énergie nouvelle qui demande un traitement qu’on ne connaît pas.

 

Comment travaillez-vous à la combinaison des différentes « briques » ?

Pour tester toutes les briques qu’on a développées, les mettre en place et voir comment  elles se combinent, nous avons besoin de démonstrateurs qui permettent de valider ou pas un certain nombre de solutions par des tests grandeur nature. C’est pour cela que nous avons deux projets de démonstrateurs : CityFret pour les marchandises, et Modulo-Sys pour les passagers. Il faut savoir proposer des bus modulables aux passagers qui leur évitent de trop changer de bus pour arriver d’un point à un autre.  Les bus qui se regroupent et puis se dégroupent sont une solution. Autre solution : adapter la taille du bus au moment où il circule : aux heures de pointe, il est plus long qu’aux heures creuses. Cela peut permettre de diminuer l’énergie consommée, et la place et la surface occupée par les bus en ville.

Dans le cadre de CityFret, nous allons faire des essais sur le Grand Lyon et Saint-Etienne métropole. On a prévu par exemple de faire un démonstrateur dans un hyper centre : la Croix-Rousse. On pourrait aussi en faire un dans une autre configuration : comment livrer depuis le marché de Corbas des denrées périssables en centre-ville ? Il se pourrait qu’il y ait un démonstrateur qui soit dans les conditions de circulation de la route de Lyon qui va à Saint-Priest : c’est une route avec un couloir pour les bus, mais rien de spécifique pour les marchandises. On pourrait donc faire un essai en ayant des camions qui utilisent le couloir des bus. On envisage aussi un démonstrateur qui trouverait sa place dans le projet « Part-Dieu 2020 ».

Le démonstrateur a aussi pour but d’accélérer le temps entre l’émission d’une idée nouvelle et son arrivée sur le marché en production.

 

Depuis la création du pôle LUTB, est-ce que certaines briques sont d’ores et déjà opérationnelles ?

On a déjà des briques qui sont sorties car des programmes lancés dès 2006 sont terminés. Par exemple, on a un système de réservation automatique des aires de livraison mis au point par une PME du pôle. On a également développé un système qui permet de calculer l’influence du créneau horaire et des conditions de circulation sur la performance de la livraison. On a déjà un camion à ordures hybride (« hybrys ») qui termine ses tests. Nous confirmons donc que le véhicule hybride génère vraiment des gains de carburants. On a aussi des solutions techniques sur les bus qui sont éprouvées.

On a déjà pas mal de briques, c’est pour cela qu’on a décidé de lancer nos démonstrateurs maintenant. Il était temps car dans les villes aujourd’hui, il y a toujours un opérateur de transports de personnes, mais pas pour le transport de marchandises. C’est une vraie question ! Cette autorité de coordination des transports de marchandises devrait venir un jour.

 

Que pensez-vous des solutions préconisées du type « péage » urbain ?

Limiter le transport en ville avec des péages ou ce type de solutions, fera évoluer le produit, la technologie. Mais ça ne résoudra rien.  

Quand vous avez des livraisons de marchandises en ville, 53% de l’énergie consommée est gaspillée dans les conditions de circulation. Donc en mettant des péages, la technique va s’adapter mais vous aurez toujours autant de véhicules. Pire : on assistera à la multiplication des voitures lambda qui iront livrer des petits paquets puisqu’elles ne seront pas soumises aux conditions de péage. Il n’y aura pas de massification, mais un effet inverse.  

Globalement, l’organisation des moyens de transport apportera beaucoup plus de valeur ajoutée que des barrières aux transports. La barrière n’est pas un principe proactif. Imaginez qu’on opère différemment le transport en ville, il y aura beaucoup plus d’opportunités de gains. En tout cas, c’est ce que nous pensons.

 

 

La révolution des transports de demain passera donc par une meilleure organisation…

Effectivement, demain, les transports seront bien plus organisés. Autour des villes, il y aura des plateformes sur lesquelles arriveront des marchandises par bateau, par rail ou par avion… Même chose pour les passagers. Il faudra des moyens adaptés et diversifiés pour leur permettre ensuite d’arriver à leur point de chute en ville. Les solutions se feront avec des énergies de plus en plus propres. Et seront sans doute réalisées par des opérateurs sélectionnés et organisés par une autorité qui en aura la mission. Après un Sytral, un Mystral ? Elles seront mieux interfacées avec les bâtiments, avec les infrastructures, que ce soit par des moyens de communication, ou physiquement. On peut imaginer que les camions ou les bus se chargent en énergie grâce aux toits des bâtiments, équipés de panneaux photovoltaïques…

 

Cette organisation entraînera-t-elle une meilleure efficacité ?

Oui, car on arrivera à livrer plus avec moins de moyens de transport. Et puis on arrivera à mieux les étaler aussi bien géographiquement que dans le temps. Si on trouve des solutions de transport silencieuses, on peut faire des livraisons de nuit qui ne dérangent personne. Ça fait autant de moins dans les embouteillages le jour. On peut aussi imaginer des solutions qui permettent à un petit camion de suivre un tramway : à chaque fois que le tram s’arrête pour débarquer et embarquer des passagers, lui il embarque ou débarque des marchandises qu’il laisse dans une boîte fermée à clé sur le quai. C’est autant de livraisons qui se feront proprement. Des expériences similaires d’utilisation des sites propres se font partout dans le monde. D’ailleurs, c’est ni plus ni moins copier ce qui est fait avec le TGV postal : un transport de marchandises sur un site passager. C’est pour cela qu’on ne fait pas rêver avec nos solutions : on fait des choses simples qu’on voit ailleurs…

 

On parle beaucoup de la ville de type européen. Mais travaillez-vous à des modèles applicables à des villes partout dans le monde ?

On étudie toutes nos solutions pour qu’elles soient applicables aux villes du monde entier. Parce qu’on sait bien que nos adhérents, que ce soit Renault Trucks ou des petites PME, ne pourront développer ces solutions que si elles sont applicables à grande échelle. Si on ne développe que des solutions franco-françaises, on n’aura pas l’effet volume et on ne pourra pas se payer la recherche par la commercialisation des solutions. Donc dans notre esprit, il faut toujours un panel de solutions car certaines villes ont des moyens, d’autres peu. Par exemple, toutes les villes ne peuvent pas se payer un métro. Un bus propre (électrique ou hybride), pas obligatoirement en site propre, peut être une solution peu chère pour des villes qui n’ont pas les moyens.

 

La mise au point de solutions globales de transport vous conduit à travailler en concertation avec d’autres acteurs que les membres de votre pôle ?

C’est sûr qu’on n’imaginera pas toutes les solutions dans nos pôles, il y en a une partie qu’il faut forcément travailler en collaboration. Pour installer des recharges de batteries, il faudra bien que la prise soit la même pour un camion, une voiture ou un bus. Il y a des standards communs à trouver avec l’automobile. De façon générale, il faut toujours réfléchir à la complétude de la solution. Qui opère ? Où est-ce qu’on charge et décharge les marchandises ou les gens ? Comment on s’occupe de l’énergie ? Qu’en est-il de l’entretien ? Quand on raisonne sur l’efficacité énergétique d’une solution, il faut penser à son efficacité globale, depuis le début de la fabrication des pièces qui permettent cette solution, jusqu’à leur recyclage. Exemple : l’hydrogène. Si on arrive à le produire à partir de centrales nucléaires, ça ne pollue pas. Mais si on produit de l’hydrogène à partir du charbon, le bilan énergétique ne sera pas très positif… Il faut donc vraiment se pencher sur la complétude de la solution. C’est pour ça aussi qu’on a besoin des autres pôles de compétitivité, et notamment des pôles matériaux qui travaillent sur des solutions chimiques. On a ce besoin là, et désormais cette force-là en France. C’est pour ça qu’on a été l’un des pôles fondateurs de la réponse de Rhône-Alpes à l’appel à projet pôle « éco-tech ». On a proposé – ce qui a été retenu – de créer un pôle « efficacité énergétique » permettant de travailler sur ce système. L’Etat vient de donner une réponse favorable.

 

En 2011 débuteront les travaux de Transpolis, un centre d’essai dédié au pôle LUTB, qui se déploiera sur 140 ha dans l’Ain. A quoi servira ce site ?

Quand on fait de la recherche, il faut la valider. Les premières validations se font sur des moyens propres à chacun de nos adhérents. Ils ont des bancs d’essai. C’est le 1er étage de la validation, et on a mutualisé ces moyens. Si je suis une PME adhérente du pôle LTB et je veux utiliser les moyens d’essai de Renault Trucks, je vais sur un espace sécurisé sur l’intranet du pôle et je vois que tel moyen d’essai est disponible à telle condition. Le 2e étage porte sur des validations qu’on ne peut pas faire sur routes ouvertes. Il permet par exemple de valider le vieillissement des solutions grâce à une piste à haute vitesse. C’est ce que permettra « Transpolis », qui n’a pas d’équivalent en Europe. Il comptera une partie « ville du futur » dans laquelle on pourra simuler l’arrêt du bus du futur, l’aire de livraison du futur, la plateforme des marchandises sur laquelle les marchandises arriveront par gros camions et seront reprises par des plus petits. Mais aussi des carrefours reconfigurables, etc. Une 3e étape est l’expérimentation en terrain réel. Là on a la chance d’avoir le Grand Lyon comme adhérent du pôle et force motrice sur le sujet, qui nous met à disposition son territoire. Il est suivi en ça par les autres agglomérations de la région Rhône-Alpes. Expérimenter en vraie nature c’est toujours la dernière étape avant de passer en série et ce n’est pas forcément facile puisqu’il y a beaucoup d’endroits où le législateur dit : « on ne peut pas le faire » car c’est trop nouveau.

 

Le pôle LUTB est dans une phase « offensive ». Qu’entendez-vous par là ?

Jusqu’à l’été 2009, on était dans une phase de start-up. Désormais, nous sommes dans une phase offensive pour la recherche et le développement des solutions de transports. Nous comptons 120 adhérents, et plus de 92 projets labellisés, pour un montant de 263 M €. Il y a déjà des projets terminés, d’autres en phase de commercialisation, un projet a donné naissance à une entreprise, d’autres sont en phase d’industrialisation. La crise a rendu les choses plus difficiles, mais pour l’instant, on n’a pas perdu de rythme.

 

Les camions ont une mauvaise image, très anti écolo, auprès du grand public. En quoi le pôle LUTB prend-il en compte les relations avec le citoyen consommateur ? Les pôles de compétitivité assurent l’interface entre l’entreprise, la recherche et l’institution. Mais qu’en est-il du 4e élément : le citoyen ?

Le citoyen est au cœur de la recherche du LUTB et nous comprenons que le grand public, par ses réactions, nous pousse à l’amélioration des solutions. Aujourd’hui, il n’y a aucun bien de consommation qui ne soit pas livré par camion ! Alors oui on n’aime pas les camions, mais on en a besoin ! Et le public doit  reconnaître les améliorations faites : en effet, il faut savoir qu’un camion de 12 t en ville remplace 14 véhicules utilitaires, il consommera 53 litres pour faire sa tournée au lieu de 178 litres pour les utilitaires, il occupera sur la route une surface qui est 4 fois plus petite que les utilitaires. Tout ça pour nous, c’est positif. C’est pour ça qu’on propose la massification. A nous de le rendre plus efficace, ce qui est déjà le cas. Les émissions de particules et d’oxyde d’azote ont été réduites en 12 ans de  98%. Et la consommation de 34%. L’amélioration est infinie !

 

Avez-vous le souci de l'acceptabilité de l'usager dans l'innovation ou le laissez-vous aux pouvoirs publics ?

Au sein du LUTB et grâce à la présence des décideurs de la ville d'aujourd'hui et de demain, nous avons le souci de l'utilisateur final. En revanche, notre Pôle apporte une pierre à un édifice dont il ne peut pas être l'architecte. En effet, ce sont bien les missions des pouvoirs publics et décideurs politiques que de définir une stratégie autour de tout cela. Un exemple : Au sein du Pôle, nous pensons que le développement du commerce par internet devrait s'accompagner de mesures visant à rééquilibrer la balance entre l'usager qui veut tout tout de suite après sa commande et le peu d'efficacité de transport que cette exigence génère.

 

Certaines solutions de transport se heurtent à des freins réglementaires ou légaux. Le pôle LUTB a t’il également un rôle de lobbying auprès des pouvoirs publics, pour faire changer les normes ou les lois ?

L’un des rôles du pôle est effectivement d’interpeller le législateur sur les évolutions qu’il doit faire de certaines normes ou de certaines lois, qu’elles soient locales, nationales ou européennes. Car il faudra qu’il y ait des évolutions réglementaires pour permettre l’émergence efficace de certaines solutions. Pour économiser du carburant (environ 7%), il faudrait pouvoir améliorer l’aérodynamisme des camions en rajoutant 50 cm à l’avant. Or on n’a pas le droit car une loi verrouille la longueur d’un camion.  Autre exemple : on ne peut pas prévoir deux réglages électroniques des moteurs, un pour la route, et un pour la ville (qui serait plus silencieux) car c’est interdit par la loi. Des solutions sont prêtes mais on ne peut pas les mettre en œuvre car le législateur bloque.

Dans notre pôle de compétitivité, on a la chance d’avoir un représentant du Grand Lyon, de la Région, de l’Etat… C’est vraiment très bien ! Car on peut passer les messages en direct. Les pôles sont reconnus, donc on arrive bien mieux à faire un lobbying vis-à-vis de l’ADEME (Agence de l’environnement et de la maîtrise d’énergie), la DGCIS (Direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services) et  l’Europe. C’est vraiment intéressant car tout le monde est là. On peut travailler sur des solutions, y compris le changement des lois, même si ce dernier point n’est pas le plus facile.

 

Concevez-vous le pôle de compétitivité comme un lieu de dialogue (entre 4 mondes : entreprises, organismes de recherches, institutions publiques et citoyens consommateurs) pour gérer l'innovation au niveau d'un territoire ? S’agit-il pour vous d'un nouveau mode de management de l'innovation ?

Sans aucune hésitation ! Notre pôle est une usine à projets qui doit agir pour que le transport collectif de demain soit plus efficace sur tous les plans. Il s'agit donc bien de manager de l'innovation en faisant collaborer tous les acteurs qu'ils soient publics ou privés, du monde de la recherche ou de l'industrie ou de la formation. Un des enjeux majeurs est de mettre en œuvre des projets impliquant les décideurs de "La Ville" afin d'imaginer des solutions de transport globales. Ce qui est très différent que de simplement imaginer un camion ou un bus de demain. Nous raisonnons système et nos projets de démonstrateurs tels Cityfret et Modulo-Sys sont les meilleurs projets pour réussir ce management de l'innovation impliquant tous les acteurs.