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Maud SGORBINI : La démarche "santé psychique et logement" du Grand Lyon

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Interview de Maud SGORBINI

<< La finalité étant de poursuivre, avec toutes les parties prenantes au projet, un objectif qui est d’intégrer et/ou maintenir les personnes fragiles psychiquement dans l’habitat collectif, tant que c’est possible >>.

Entretien avec Maud Sgorbini, responsable du projet santé psychique et logement du Grand Lyon.

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Date : 30/04/2008

Le projet « santé psychique et logement » a été amorcé en 2002, six ans après, où en est-on de cette démarche ?

Nous sommes rentrés dans la phase opérationnelle ! Concrètement, cela consiste en un guide santé psychique et logement renouvelé et réédité, des formations, un forum national en préparation… la finalité étant de poursuivre, avec toutes les parties prenantes au projet, un objectif qui est d’intégrer et/ou maintenir les personnes fragiles psychiquement dans l’habitat collectif, tant que c’est possible.

Six ans, cela peut paraître long, mais ce temps long, avec le recul, était nécessaire pour définir la façon selon laquelle nous allions tous évoluer dans le même sens. 6 ans pour faire connaissance, comprendre et s’imprégner de la culture professionnelle des uns et des autres…Nous entamons également une phase de mise en lisibilité et de reconnaissance de cette démarche, avec la création d’un label et d’une identité visuelle.

 

Pour quelles raisons mettez-vous autant l’accent sur la lisibilité de cette démarche ? Quelles préoccupations mettez-vous derrière ? Un simple besoin de communication, d’information… ?

La question de l’intégration ou du maintien des personnes fragiles psychiquement n’est pas simple à gérer car, d’un côté elle ne relève pas de la compétence d’une institution en particulier, mais à contrario, elle concerne tous les acteurs qui entourent ces personnes ! Le personnel soignant, les collectivités locales, les bailleurs sociaux ou privés…Les hôpitaux psychiatriques sont impliqués en tant qu’entités soignantes, soucieuses de l’intégration dans la société de leurs patients, les maires des communes sont concernés au titre de leur pouvoir de police, les bailleurs sociaux, voire privés, dans le cadre de leur vocation qui consiste à pourvoir aux demandes de logements, etc.

De fait, sur cette question, chacun agit à la limite de ses compétences propres. Et, force est de le constater, maintenir une personne psychiquement fragile dans l’habitat ordinaire, peut se réaliser sur la base d’un travail collectif  de l’ensemble des acteurs cités précédemment. Le projet s’est donc construit au fil du temps, grâce aux bonnes volontés et à l’implication des partenaires concernés.

Aujourd’hui, informer sur ce projet, communiquer nous permet d’afficher le portage politique et institutionnel dont nous bénéficions désormais.

 

Vous évoquiez le fait que chaque acteur intervient à la limite de son champ de compétence, est-ce le cas du Grand Lyon ?

La Communauté urbaine, à la différence des autres acteurs, a pu intervenir légitimement sur cette question grâce à son assise territoriale et à sa compétence Habitat. Grâce à cette position spécifique, nous avons pu, en toute légitimité, jouer un rôle d’animation de cette démarche. Et sur ce projet, nous avons également apporté notre expertise en terme d’ingénierie du partenariat  et de conduite de projet.

 

Pouvez-vous nous expliquer en quoi cela consiste ?

Sur ce projet nous avons mobilisé tous les ingrédients nécessaires pour mettre en route un partenariat efficace : appropriation collective d’une problématique, connaissance des modes de faire des uns et des autres, partage de pré requis et d’une culture commune, chacun intervient dans son champ de compétences mais fait connaître aux autres acteurs son mode de faire…

 

Quelle a été l’implication des élus concernés, les élus du Grand Lyon, les maires des communes… ?

Les élus sont très sensibles à ce sujet, en particulier les maires des communes, qui, au titre de leur pouvoir de police peuvent être amenés à prendre des décisions qui concernent les personnes fragiles psychiquement,  une hospitalisation d’office, par exemple. Pour eux, cette démarche pragmatique, qui prend en considération des situations humaines, parfois très difficiles, ne peut qu’être accueillie favorablement.

 

Finalement peu de personnes sont concernées par ce que vous avez mis en place. N’est ce pas un dispositif marginal dans la prise en compte de la question du « logement », centrale aujourd’hui en France ?

On pourrait considérer que, quantitativement, c’est effectivement un dispositif marginal de par la population touchée. Mais, en réalité, les problèmes de santé psychique peuvent avoir des répercussions importantes sur la vie quotidienne de nombreuses personnes. Ce qui fait l’originalité de cette démarche, c’est justement de traiter la question de l’intégration de ces personnes dans la société en choisissant « l’entrée » logement. Aborder le sujet de cette façon, permet en quelque sorte de créer un modèle réutilisable.

 

Voulez-vous dire par là que d’autres champs d’investigations pourraient être traités avec la même approche ?

Effectivement, les questions d’hébergement ou de maintien des personnes âgées pourraient également bénéficier du même type de réflexion. Ce type de dispositif nous oblige à  définir et à mettre en place des stratégies d’efficacité, pour travailler collectivement, entre personnes d’origine et de cultures professionnelle fondamentalement  différentes. Ce qui nous permet de résoudre des situations à la marge, dans le respect des compétences de chacun, à moyens en ressources humaines et financiers quasiment constants. D’autres collectivités ou d’autres acteurs, institutionnels ou non, pourraient  également se positionner pour jouer un rôle moteur favorisant  le travail collectif.

 

De quelles façons les acteurs de la démarche sont-ils parvenus à travailler ensemble ?

Tous les partenaires associés à ce  projet se sont fortement investis, dès le début, car le souci de trouver des solutions concrètes pour les personnes concernées et leurs familles se révèle  humainement très fort. Sur la question de travailler ensemble, fort heureusement, dans l’agglomération lyonnaise, on ne part pas de trop loin en termes de culture des approches partagées et de coopération entre les acteurs. Cela  nous a beaucoup aidés à travailler en équipe, de façon efficace et somme toute rapidement.

Par contre, maintenant, pour que cela fonctionne, il faut « assurer » et stabiliser le dispositif. C’est ce à quoi nous nous employons aujourd’hui ! Ce type de projet demande une énergie importante pour que les dispositifs d’intervention soient définis et mis en action,  mais une fois que la machine est  lancée, il faut suivre !

 

De quelle façon allez-vous asseoir ce dispositif ?

La mise en musique du  partenariat ne s’arrête pas quand le projet est lancé, nous devons également gérer, avec tous les acteurs, la « montée en puissance » et la « vitesse de croisière ».

C’est vrai que les résultats obtenus l’ont été grâce aux professionnels qui se sont impliqués, personnellement, dans la démarche. Mais, maintenant, si on veut légitimer et pérenniser ce que nous avons mis en place,  il faut formaliser les modalités d’action et  les partager. C’est essentiel pour que la problématique « santé psychique et logement » appartienne aux institutions et pas seulement aux personnes de « bonne volonté » qui l’ont initiée.

La création d’un label et d’une identité visuelle participe pleinement à cette étape d’institutionnalisation. La démarche continue, de nouvelles formations-actions sont programmées et le point d’orgue du projet sera constitué, en 2009, par un temps fort « le forum national sur la santé psychique et le logement ».