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St Chamond : tour d’horizon des enjeux d’un projet de territoire porté à l’échelle de l’agglomération

Interview de Gérard DUCARRE

<< Nous sommes extrêmement bien placés pour accueillir des transferts d’entreprises qui souhaitent se développer >>.

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Date : 01/02/2006

Propos recueillis par Gilles Cayuela, février 2006

Territoire stigmatisé par près de 40 années de crises industrielles, la vallée du Gier poursuit ses efforts pour se reconstruire une image positive et retrouver une attractivité toute neuve. Réhabilitation des friches industrielles, reconversion du site Giat, reconquête des centres urbains, remodelage du paysage, repositionnement économique… Gérard Ducarre, maire de Saint-Chamond et 1er vice-président de Saint-Etienne Métropole fait le tour d’horizon des enjeux d’un projet de territoire porté à l’échelle de l’agglomération. 
 

 

A votre arrivée à la municipalité en 1989, quelle était la situation économique de Saint-Chamond et de la Vallée du Gier en générale ?

L’industrie métallurgique digne héritière des exploitations minières était depuis le début des années 80 en pleine crise. Idem pour le textile qui depuis le début des années 70 avait connu de nombreuses fermetures d’usine. La quasi-totalité des teinturiers de la vallée avait disparu. La Manufacture Réunie, qui regroupait toutes les industries de tresses et lacets, avait également sérieusement été amputée. L’ensemble de la Vallée du Gier vivait au rythme des conflits sociaux, à l’image de celui qui agita l’entreprise JB Martin à la fin des années 70. Des cheminées qui ne fument plus, des usines laissées à l’abandon… bref, la vallée était devenue un territoire de friches.

 

Comment avez-vous entrepris de traiter la question des friches ?

Nous avons décidé de casser tout ça. J’ai été élu en mars 1989. Au mois de juillet, nous avons entrepris la démolition des 4 hectares de la friche Chavanne-Kétin, située dans le centre ville. A la place, nous avons construit un cinéma, une médiathèque et un centre petite enfance. Au total en dix ans, nous avons rasé une dizaine d’hectare de friches. Ce qu’il faut bien comprendre, c’est qu’à l’époque industrielle, la ville se construisait autour de l’usine. La fin de cette époque a marqué également la fin de ce mode de fonctionnement. Il fallait que la population puisse se réapproprier le centre ville. C’est pour cette raison que de nombreuses friches industrielles situées dans le cœur de la ville ont été démolies où réhabilitées pour accueillir des services publiques et des logements. Les entreprises ont quant à elles été déplacées dans des parcs d’activités créés à cet effet et situés en périphérie de la ville et à proximité des grands axes routiers. On ne fait pas venir des semi-remorques au centre-ville alors que l’on peut faire autrement ! Un exemple, en 1992 nous avons lancé la zone d’activité Stélytec.

A cette époque, non content d’avoir des friches en centre ville, nous avions également d’importants bouchons de circulation. Nous avons donc profité de la création du contournement de Saint-Chamond pour racheter des terrains agricoles qui se sont retrouvés en bordure d’autoroute. Cela nous a permis de créer la zone Stélytec que nous avons ensuite commercialisée..

 

Les nombreux stigmates de l’ère industrielle n’ont-ils pas été et ne sont-ils pas encore un frein à l’attractivité des parcs d’activités de la vallée du Gier ?

C’est évident. La vallée du Gier est loin d’être une bonne vitrine pour notre agglomération. Il faut des décennies pour casser une image négative. Il est vrai que dans l’inconscient collectif, la vallée du Gier et la région stéphanoise dans son ensemble est encore associée aux crassiers, aux cheminées qui polluent… bref, les gens de l’extérieur ont souvent une image dépassée de notre territoire. Ces 20 dernières années, de nombreux efforts ont été fait de Saint-Chamond à Rive-de-Gier pour redonner une image plus positive. Certes, il faut encore poursuivre ces efforts, requalifier les friches restantes et remodeler le paysage situé en bordure de l’autoroute A 47. Pour autant, même s’il est vrai que la vallée est encore assez noire, cela ne nous a pas empêché de remplir Stélytec. Aujourd’hui, cette zone d’activités représente tout de même 500 emplois. Et puis, nous avons un arrière pays magnifique. Les lyonnais commencent à s’en rendre compte. Ils sont de plus en plus nombreux à venir s’y installer. Le Gier à l’image de Saint-Chamond connaît un regain d’intérêt en matière immobilière. Idem pour les entreprises. Lyon est saturé, le foncier dans la région lyonnaise est horriblement cher. Résultat, aujourd’hui nous sommes extrêmement bien placé pour accueillir des transferts d’entreprises lyonnaises qui souhaitent se développer.

 

C’est l’une des pistes explorées pour la reconversion future du site Giat ?

Pour l’instant, le site Giat n’est pas encore disponible. Cela étant, nous avons effectivement des prospects. Nous savons que certaines entreprises de la région lyonnaise peuvent être intéressées. Je prêche pour que l’on mette en place des conditions financières intéressantes pour des entreprises qui viendraient s’installer sur le site, afin de compenser en partie les pertes d’emplois. Certes, on ne remplacera pas les 700 emplois perdus du jour au lendemain. Cela étant, le site est susceptible d’attirer des activités capables d’apporter un certain nombre de postes de travail.

 

Les 30 hectares laissés vacants par le démantèlement de Giat Industries seront entièrement dédiés à l’accueil d’entreprises ?

Nous avons lancé une étude d’aménagement du site qui comprend un volet économique et un volet urbanisme au sens large. Le site Giat devrait donc avoir une double vocation. Une partie devrait être conservée en qualité de zone économique et une autre partie sera vouée à un projet d’urbanisme comprenant entre autre du logement.   L’enclavement du site Giat à proximité du centre ville ne risque-t-il pas d’être un frein pour attirer les entreprises?
Il faudra effectivement régler cette question. Cela étant, avec des travaux de voiries adaptés, c’est un site qui reste relativement facile à désenclaver. Et puis l’implantation en 2004 d’une entreprise comme Idéstyle, qui est aujourd’hui l’un des plus importants bureaux d’études travaillant pour le secteur automobile français, peut servir d’appel pour d’autres entreprises. Il en va de même pour l’entreprise Clecim, spécialisée dans l’ingénierie industrielle à destination de la sidérurgie. Ces entreprises peuvent avoir un effet moteur en terme d’attractivité. C’est comme une rue dans laquelle on trouve plusieurs restaurants. La concurrence créée une émulation, la rue gagne en dynamisme et finalement chaque restaurant y trouve son compte.

 

Par le passé, les communes se faisaient concurrence en matière d’implantations économiques. L’intercommunalité a profondément changé la donne ?

C’est une évidence ! Le passage à la taxe professionnelle unique a en quelque sorte marquée la fin de la course à la recette fiscale et a permis d’éviter le phénomène néfaste de surenchère qui existait par le passé entre les communes. Aujourd’hui, ce qui compte c’est de trouver des recettes à l’intérieur de l’agglomération et non plus à l’échelle de telle ou telle commune. Cela nous permet de développer une offre globale plus intéressante, d’anticiper et de définir des zones sur un thème donné : l’artisanat, la grosse industrie, le tertiaire… Bref, l’intercommunalité et la taxe professionnelle unique permettent de mettre en musique une véritable stratégie de développement économique pour l’ensemble d’un territoire.

 

Selon vous quel sera le visage de la vallée du Gier dans les 10 ans à venir ?

Sur un plan démographique, les coteaux de la vallée vont être amenés à se peupler. A nous politiques de tout mettre en œuvre pour que ce processus qui est déjà engagé depuis plusieurs années ne se fasse pas au dépend des centres des grandes villes de la vallée. Pour cela, il va falloir proposer des logements confortables et des services à la population. C’est l’un des enjeux du Plan Local d’Habitat mis en place par Saint-Etienne Métropole. Si nous ne faisons pas d’importants efforts en matière d’urbanisme, nous ne parviendront pas à enrayer cet exode. Sur un plan économique, il est clair que la vallée du Gier ne retrouvera pas les emplois industriels qu’elle a perdu ces 30 dernières années. En revanche, j’ai l’intime conviction que la stratégie que nous mettons en place au niveau de l’agglomération, avec des thématiques porteuses comme le design, le textile médicale ou encore l’optique et la vision, nous permettra de développer d’autres types d’emplois. Des emplois, sans doute plus tournés vers le tertiaire, qui interviendront en amont de la production.