Oui, salariés plus indépendants, et j’ajouterais des indépendants jeunes, des millenials, c’est-à-dire des jeunes qui sont constamment mobiles, en recherche de leur métier : ils font une chose et en font une autre, simultanément. Ces jeunes, avec leur smartphone — c’est un laboratoire et un bureau à lui tout seul — peuvent beaucoup apprendre dans l’entreprise sur la diversité des relations, des parcours. Et je pense que c’est dans cette diversité des parcours que se construiront peu à peu, même sur le plan territorial, les métiers du futur et la capacité de gestion de la complexité des entreprises et même des villes et territoires de demain.
Cela nous amène à la notion de précarité : on a une vision qui se focalise sur la stabilité des emplois comme norme, et qui postule que la mobilité est dangereuse, on a toujours dit cela. Mais ces millenials, ces freelancers, qui travaillent sans être dans un bureau, mobiles constamment, mobiles dans les idées, dans le travail, souffrent en fait actuellement surtout de la précarité des nouveaux entrants dans un champ professionnel. À l’avenir, leur statut d’électron libre, leur mobilité, leur diversité, leur volonté de non stabilisation, d’être constamment en recherche de quelque chose qui les motive, qui leur donne envie de continuer, les rendra indispensables dans l’écosystème numérique et les réseaux. C’est cela qui est en train de changer.
Il n’y a plus de travail fixe dans des endroits fixes, le travail devient mobile, le temps se modifie, le temps de travail est désynchronisé. Les deux mots-clés sont : désynchronisation et délocalisation. Qu’est-ce que le travail, s’il devient désynchronisé et délocalisé ? Alors que jusqu’à présent, on est payé pour être dans un bureau de telle heure à telle heure, là vous travaillez sans être à un endroit fixe. Comment contrôler ? Comment savoir qu’effectivement, les gens sont utiles à l’entreprise ou à la plateforme, comme l’on dit, ou à l’organisme qui les emploie ? Le nouvel enjeu, c’est la mobilité, la désynchronisation du temps, la délocalisation des lieux.