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Les pratiques sportives dans le projet d’aménagement des berges du Rhône

Interview de Annie TARDIVON

<< Lorsqu’on crée un projet d’aménagement toute la difficulté est là, dans l’articulation entre l’usage détourné et celui pour lequel l’espace est défini >>.

Entretien avec Annie Tardivon, architecte-paysagiste, In-situ, en charge de l’aménagement des Berges du Rhône.

Les berges du Rhône font depuis plusieurs années l’objet d’un projet d’aménagement. A l’horizon 2007, un ruban de 5 km de long formant l’un des plus vastes parcs urbains d’Europe, permettra un retour des habitants au fleuve. 

Promenades, détente, déplacements doux, sont bien sûr au cœur de ce projet. Mais qu’en est-il des pratiques sportives ?

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Date : 30/04/2005

Comment avez-vous intégré les pratiques sportives dans le projet d’aménagement des berges du Rhône ?
Nous avons consulté à la fois les riverains, les associations et les fédérations, pour tenir compte de ce que chacun avait à dire et à apporter, mais également pour anticiper les éventuelles nuisances et les conflits d’usage. L’aménagement des berges est constitué d’une grande grève. Il s’agit de larges plages soit minérales, soit plantées et dont l’organisation permet de compenser la différence de largeur des bas-ports. Certains de ces espaces sont dévolus à des activités sportives. En premier lieu, la réflexion a porté sur les modes de déplacement doux qui sont praticables sur l’ensemble du linéaire, soit 5 km, conformément à ce que souhaitaient les associations. Certes, modes doux et sports, ce n’est pas tout à fait la même chose. Mais, dès lors que l’on peut pratiquer le roller ou le vélo pour se déplacer, on peut aussi le faire pour se défouler ou pour le loisir. L’équipement existe, à chacun de se l’approprier selon ses besoins et ses envies.

De quels types d’aménagement s’agit-il ?
Nous avons travaillé avec les associations tant pour ce qui concerne les revêtements que les gabarits. Sur 5 km, les rubans de glisse sont faits d’un revêtement très lisse, tandis que le cheminement piéton est un béton plus rugueux, cela de manière à induire les usages séparés. Les gabarits de bande de glisse sont conçus pour accueillir différentes fonctions de glisse, notamment roller, qui demande de l’espace, et afin de tenir compte de l’affluence importante le week-end, tout en maintenant des espaces de détente, des jardins, etc. Globalement on a dissocié la glisse et les pieds. Le parcours piéton est situé le plus possible à proximité de l’eau, tandis que les deux rubans de glisse, un dans chaque sens, avec un fléchage, sont plus en retrait.

D’autres pratiques sportives seront-elles proposées ?
La longue prairie, à l’amont de la Guillotière, est une prairie ouverte qui peut accueillir des usages à caractères sportifs, comme le foot, ou autre, même si elle n’est pas spécifiquement conçue pour cela. Toujours en amont de la Guillotière, des grandes terrasses pouvant accueillir des boulistes font partie du projet. En aval du pont cette fois, des bols de skates en béton ont été implantés. Ils sont creusés dans le sol, et spécifiquement dédiés à cet usage. Cet équipement est par ailleurs complété par celui du pont Morand, qui existe déjà et qui sera maintenu. Entre le centre nautique et le pont de la Guillotière, le terrain de sport existant sera conservé mais réaménagé avec des équipements dédiés et notamment des filets par-ballons. Enfin, au niveau de l’Université des terrains de jeux et de sports seront proposés. Certains entrent clairement dans un parcours sportif, comme les agrès fixés au sol, d’autres relèvent plus du jeu ou du loisir. On a également prévu l’implantation de terrains de volley et de boules. Les terrains s’organisent dans la longueur, se succédant le long du fleuve.

Autrefois, il y avait des grimpeurs qui s’entraînaient au niveau de l’Hôpital Saint Luc. Avez-vous prévu de maintenir cette pratique ?
C’est une pratique dont on a effectivement envisagé le maintien. Mais cela n’a pas été possible. D’une part, cela demanderait une grande surface de sol souple, qui serait de surcroît régulièrement inondée par les crues fréquentes. Enfin, il y a, sur ce même emplacement assez réduit, l’accès aux bateaux de croisières et il était difficile de faire coïncider l’ensemble des contraintes.

La pratique n’était pas encadrée. Avez-vous aménagé l’espace de façon à la décourager ou le lieu demeure-t-il un espace de liberté qui pourra toujours être utilisé les grimpeurs ?
Lorsqu’on crée un projet d’aménagement toute la difficulté est là, dans l’articulation entre l’usage détourné et celui pour lequel l’espace est défini. Si nous avions proposé cette activité, nous aurions été contraints d’installer un terrain homologué et conforme aux normes de sécurité, ce qui était très lourd tant du point de vu de l’espace disponible qu’économiquement. L’activité continuera peut-être, puisque l’endroit ne disparaît pas, mais pas de manière institutionnalisée. Il y a, je crois, un projet de patinoire ? En amont du pont de la Guillotière, une série de terrasses est prévue. Elles descendront vers le fleuve. Un bras d’eau traverse l’une d’elle, il s’agit d’un bassin très long, d’une faible hauteur, alimenté par les eaux d’exhaures du parking. Selon les moments ou les besoins, cette pièce d’eau peut être asséchée pour accueillir des événements de quartier. Pour l’instant, on sait juste que l’endroit conviendrait pour une patinoire, mais il s’agira peut-être d’une patinoire « externe » du type de celle qui est installée sur la place Bellecour en hiver.

L’aménagement des berges est également un trait d’union avec l’eau. Quelles sont les pratiques sportives nautiques qui seront implantées ?
Entre le pont SNCF et la station Shell, toute une série de pratiques seront maintenues comme la pêche ou le ski nautique. Les jets ski ne devraient pas circuler à cet endroit, mais plus en aval. Nous avons interrogé les associations pour gérer les conflits d’usage et il semble que ski nautique et pêche soient compatibles, les horaires ne se chevauchant pas. Par ailleurs, plusieurs petits pontons seront installés, créant un lien entre les berges et le fleuve. Ils devraient permettre d’autres pratiques nautiques, comme, par exemple, le canoë. Enfin, les joutes sur l’eau continueront à être pratiquées. Et puis, même si elle est en dehors du périmètre concerné par l’aménagement des berges, la piscine du Rhône continuera d’accueillir les nageurs. Il faut encore souligner une dernière chose, c’est que les berges forment un espace public et, comme tel, il peut accueillir des manifestations sportives occasionnelles dans les limites de sa disposition en ruban. On peut ainsi imaginer des défilés ou des manifestations sportives nautiques même si les crues rendent difficile leur anticipation.