Prendre soin des métiers du prendre soin
Les métiers du prendre soin souffrent d'un fort turnover. Pourtant, les facteurs d'engagement dans ces métiers très humains ne manquent pas. Alors, que se passe-t-il ?
Interview de Jean-Yves BONNEFOY
<< Nous utilisons les biotechnologies. Les réseaux européens et suisses que nous allons former apportent une première pierre à l’édifice d’un Eurobiocluster >>.
Lancée depuis quelques mois, le Cancéropôle Lyon Rhône-Alpes est l'une des concrétisations majeures de la politique de développement du Grand Lyon dans le domaine de la santé et des biotechnologies. Sa réalisation représente un véritable enjeu de santé publique. Rencontre avec le docteur Jean-Yves Bonnefoy, Directeur, en 2003, du Projet Cancéropôle Lyon Rhône-Alpes.
Vous êtes à la tête du Cancéropôle Lyon Rhône-Alpes, pourriez-vous nous présenter le projet ?
Le Cancéropôle Lyon Rhône-Alpes, est un réseau d'excellence dans le domaine de la lutte contre le cancer. Il repose sur quatre axes : formation,
recherche, clinique et industrielle. L'objectif est de favoriser l'industrialisation des innovations, afin d'en faire bénéficier le plus grand nombre de patients. Pour cela, le Cancéropôle est chargé de coordonner, d'organiser et de valoriser les travaux des 1700 acteurs hospitalo-universitaires et des 40 entreprises rhônalpines oeuvrant en oncologie. En outre, il se met au service de la communauté scientifique et médicale en jouant l'interface avec l'ensemble des partenaires institutionnels et industriels au niveau national et international.
Le Cancéropôle Lyon Rhône-Alpes est inscrit dans le Schéma de Développement Economique du Grand Lyon. Quelle est la part des collectivités territoriales dans le lancement de ce projet ?
Ce sont elles qui en ont pris l'initiative : fin 2001, le Grand Lyon, le Conseil Régional et la préfecture de région ont décidé de mettre en place le Cancéropôle Lyon Rhône-Alpes. Dès début 2003, une équipe a été mise en place. Actuellement, nous sommes en train de choisir la structure juridique la mieux adaptée à la mission et au fonctionnement du Cancéropôle. Le Cancéropôle Lyon Rhône-Alpes est d'ores et déjà administré par un comité de pilotage chargé d'entériner (ou non) les décisions.
Ce comité est constitué du président du Grand Lyon, de la présidente du Conseil Régional, du président du Conseil Général, du préfet de région et des responsables des 16 autres partenaires : les HCL, le CLB, le CEA, l'ENS, l'UCBL1, l'UJF, l'UJM, l'INSERM, le CNRS, le CIRC, les 3 CHU de la région Rhône-Alpes, l'ENVL, l'Etablissement Santé du Sang, l'INRIA et l'Institut Cancérologique de la Loire… Un comité scientifique, composé d'experts dans le domaine du cancer, évalue les choix scientifiques et médicaux du Cancéropôle Lyon Rhône-Alpes. Un Club Industriel, réunissant la quarantaine d'entreprises rhônalpines concernées par l'oncologie, va être un catalyseur de l'activité économique, d'abord au niveau régional, puis ensuite au niveau international.
Qui sont les porteurs du Cancéropôle Lyon Rhône-Alpes ?
Les collectivités territoriales, tout d'abord. Dans le cadre du Contrat d'Agglomération signé le 8 septembre 2003, elles se sont engagées à verser un total de 45 millions d'euros, soit 15 millions d'euros chacune. Ensuite, l'Etat, via les Ministères de la Recherche et de la Santé. En juin 2003, nous avons répondu à un appel d'offre national de prélabellisation des Canceropoles. Un mois plus tard, nous avons été prélabellisé, et sur 7 régions, nous avons obtenu la seconde place en terme de financement, après l'Ile de France. L'Etat nous a alloué 2.85 millions d'euros (pour trois exercices budgétaires) sur cet appel d'offre. Au total, l'Etat contribue à hauteur de 12,7 millions, dont une partie est destinée à l'acquisition d'une technologie RMN Haut Champ (Résonance Magnétique Nucléaire). Un nouvel appel d'offre ministériel est prévu début 2004. Le soutien est donc, pour l'instant, essentiellement public, mais nous avons la possibilité, au cas par cas et après validation de notre comité de pilotage, de recourir à des financements privés. En fait, nous avons conçu différents réseaux thématiques pour être en mesure de répondre à toutes les sources potentielles de financement : international, européen, national et régional, public et privé. Tous les financeurs n'ont pas les mêmes objectifs : les collectivités territoriales favorisent le développement économique, la recherche de transfert, la valorisation et le développement industriel ; l'Europe et l'Etat soutiennent plus la recherche académique fondamentale et la recherche clinique...
Concrètement, où êtes-vous localisé ?
Pour l'instant, nous sommes hébergés par l'ARTEB (Agence Régionale pour le Développement des Technologies Médicales et des Biotechnologies), dans le 7e arrondissement de Lyon. Notre équipe, appelée à grossir, va compter à terme une quinzaine de personnes. Nous allons nous implanter au Bâtiment Laennec du Bioparc Lyon de Rockefeller. C'est un
pôle santé stratégique, placé au cœur des Hôpitaux Louis Pradel et Edouard Herriot, entre le Centre Léon Bérard, le CIRC et les facs de médecine….
La mission du Cancéropôle Lyon Rhône-Alpes est de structurer l'activité oncologique des acteurs régionaux de santé. Comment comptez-vous procéder ?
En montant des projets pluridisciplinaires et des réseaux de travail transversaux. L'idée est de favoriser un décloisonnement en faisant travailler ensemble des gens qui n'en ont pas assez l'habitude ! 7 axes prioritaires ont été dégagés : ils couvrent la recherche fondamentale, la recherche clinique et l'application industrielle. Dans les six mois à venir, des comités d'experts régionaux, rassemblant des représentants des différents corps de métier, sont invités à définir le contenu d'un ou deux réseaux par thématique, chaque réseau devant être représentatif des différents partenaires et des trois villes (Lyon, Grenoble, Saint Etienne).
Parlons de ces 7 axes prioritaires…
Il y a deux grands thèmes médico-scientifiques, l'épidémiologie moléculaire & la biothérapie, et cinq thèmes qui s'appuient sur autant de plateformes technologiques: la génomique fonctionnelle, la pharmaco génomique, l'imagerie, le centre de ressources biologiques, l'informatique et la bioinformatique. Avec l'épidémiologie moléculaire, on cible plus le diagnostic : on s'intéresse aux gènes des individus, marqueurs de l'apparition de la maladie, plus précis et prédictifs.
Avec le soutien de la Région et dans le cadre des " 4 moteurs pour l'Europe " (région Rhône-Alpes, Catalogne, Lombardie et Bade Wurtemberg), nous souhaitons monter un réseau de dimension européenne en épidémiologie moléculaire : Barcelone, Milan et Heidelberg sont très compétentes en la matière. Nous voudrions réaliser ensemble de grandes études prospectives sur les pathologies fréquentes des pays développés pour identifier des marqueurs génétiques de prédisposition aux cancers. Pour aider à la mise en place de ce travail, nous voulons dédier des locaux aux équipes de recherche des " 4 moteurs ", ce qui stimulerait, par ailleurs, l'implantation locale d'entreprises de sous-traitance en analyse à haut débit d'échantillons biologiques.
Avec votre second thème, la biothérapie, on rentre dans le champ des biotechnologies…
Oui. On traite le cancer à l'aide de produits biotechnologiques ou basés sur des produits biotechnologiques. On distingue trois grandes catégories de biothérapies : la thérapie cellulaire (par exemple, la greffe de moelle), la thérapie génétique (où l'on délivre
un gène codant pour une protéine particulière) et l'immunothérapie (qui sert à restaurer les fonctions immunitaires déficientes chez le patient atteint du cancer). Avec le soutien du Grand Lyon, nous comptons cette fois travailler avec la Suisse, notamment Genève et Lausanne, qui possèdent une grande compétence sur les essais cliniques des thérapies cellulaires et géniques. Notre objectif est, là, de soutenir la recherche clinique en facilitant les essais multicentriques, qui sont le pré requis indispensable à l'enregistrement d'un médicament. Habituellement, trouver plusieurs laboratoires pour valider un médicament n'est pas chose aisée. En structurant un réseau de laboratoires suisses et rhônalpins, nous garantissons aux entreprises à la fois un gain de temps et un label qualité. Cela contribue à augmenter l'attractivité de la région Rhône-Alpes. Dans le même esprit, nous programmons de créer un réseau d'unités de thérapie cellulaire entre Lyon, Grenoble et St Etienne. Ces unités, basées dans les hôpitaux et les centres anti-cancéreux, traitent les patients avec des produits cellulaires qui répondent à des normes réglementaires sévères : environnement, traçabilité, qualité, documentation… Nous souhaitons lancer une unité de production aux normes BPF (Bonnes Pratiques de Fabrication) qui aura pour effet de tirer vers le haut le niveau de compétences de ce réseau régional.
Et en ce qui concerne les cinq plateformes technologiques, quels sont les travaux envisagés ?
Pour la génomique fonctionnelle, il s'agit de déterminer la fonction des gènes et de parvenir à l'exploiter d'un point de vue industriel. Pour la pharmaco génomique, on classe chaque patient, sur la base de son profil génétique, en " répondeur " ou " non répondeur " à un traitement et également en terme de tolérance ou intolérance. En imagerie, on développe de nouveaux traceurs, détecteurs et logiciels d'analyse. Pour le centre de ressources biologiques, nous proposons de coordonner l'ensemble des tumorothèques disponibles et à venir en Rhône-Alpes. En informatique et bioinformatique, il s'agit de stockage, de gestion et d'analyse des données générées par les acteurs régionaux.
Le projet du Canceropole Lyon Rhône-Alpes est-il lié à celui du Biocluster ?
A proprement parler, pas directement, mais il y a des passerelles évidentes : nous utilisons les biotechnologies et les réseaux européens et suisse que nous allons former apportent une première pierre à l'édifice d'un Eurobiocluster. On est clairement dans la même finalité de développement économique : en valorisant les forces régionales existantes en cancérologie, le Cancéropôle Lyon Rhône-Alpes contribue à augmenter l'attractivité de la région Rhône-Alpes. Une fois que nous aurons un peu plus avancé dans nos réalisations, notre souhait est d'attirer de grosses entreprises internationales : en "pharma cancer", en Recherche et Développement, en marketing, en essai clinique… Pour la prospection, nous travaillons déjà main dans la main avec l'ADERLY et la DAEI du Grand Lyon.
Les métiers du prendre soin souffrent d'un fort turnover. Pourtant, les facteurs d'engagement dans ces métiers très humains ne manquent pas. Alors, que se passe-t-il ?
Interview de Nina Sahraoui
post-doctorante au sein de l’équipe « Genre, Travail, Mobilités » du Centre de recherches sociologiques et politiques de Paris
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