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Le big data : une nouvelle ressource pour l’économie ?

Illustration représentant un arbre dont les feuilles sont symbolisées par des applications traitant de données

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Le Conseil de développement s’est saisi de cette question avec l’éclairage de trois experts.

Retour sur la Conférence « Grands Témoins » du 23 mars 2016.

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Date : 22/04/2016

Tous acteurs et bénéficiaires de la révolution des données

Capter, stocker et analyser un maximum de petites données… tel est le principe du virage technologique appelé « big data ».  De quelles données s’agit-il ? Cela va des consommations électriques des foyers transmises par les compteurs Linky, aux places de parking vides identifiées par des capteurs, en passant par les géo-localisations liées à nos usages de nos téléphones portables… Si ces données contribuent à proposer des services plus réactifs et adaptés à nos besoins, les mesures de l’environnement et des activités humaines soulèvent de multiples enjeux de société auxquels Hervé Rivano nous invite à réfléchir. A qui appartient la donnée ? Jusqu’où aller dans la connaissance de la ville et de ses usages ? Comment réguler cette course aux données ? S’agit-il d’« outiller » des décisions politiques ? De donner plus de pouvoir aux citoyens ?

 

Le Big data fait muter l’économie vers des modèles collaboratifs

Après avoir expliqué l’émergence des modèles collaboratifs et le phénomène d’ubérisation, Elisabeth Grosdhomme Lulin en explique certains effets. En termes de croissance, les modèles collaboratifs permettent d’augmenter le taux d’utilisation des actifs (ex. louer sa chambre vacante grâce à AirBnB) et de diversifier l’offre (ex. proposer de services de transports à des tarifs attractifs comme Uber). L’économie numérique fait disparaître certains emplois, mais est aussi à l’origine d’emplois non-salariés. Dans le champ du service public, les citoyens deviennent pour partie producteurs de biens et services qu’ils utilisent et changent ainsi leur regard sur l’intérêt général.

Bien sûr, de telles évolutions ne sont pas sans risques, mais il est possible d’agir. La réglementation des modèles économiques collaboratifs, l’accompagnement des citoyens à ces mutations et l’évolution vers une administration collaborative sont trois leviers d’action pour la Métropole discutés par E. Grosdhomme Lulin.

 

Quand les plateformes numériques prennent le pouvoir

Le Big data a permis d’améliorer considérablement l’efficacité de l’intermédiation, c’est-à-dire la mise en relation des personnes avec des biens ou des services (ex. passagers et chauffeurs Uber). Et pour Stéphane Grumbach, cela est à l’origine de mutations profondes et irréversibles. Dans la sphère administrative et gouvernementale, la part de données détenue par l’administration sur son territoire et ses habitants diminue au profit des acteurs d’intermédiation (ex. Google). Cette évolution déplace bien évidemment le pouvoir et il semble toujours plus difficile de gouverner. Les plateformes numériques d’intermédiation disposent aussi de toujours plus d’intelligence car elles ont les moyens de recruter les meilleurs cerveaux. Enfin, alors que les capacités financières des autorités publiques ne cessent de diminuer, celles des plateformes augmentent.

Une régulation est-elle possible ? Les capacités des territoires à réguler les activités de ces plateformes sont limitées d’après S. Grumbach. Celles-ci opèrent sur les territoires bien souvent sans rencontrer de barrières, parce que nombre d’Etats défendent un principe d’ouverture a priori de l’Internet, que les citoyens adoptent rapidement et massivement leurs services, que les réponses juridiques n’existent pas encore, etc. En outre, l’Europe ne dispose d’aucune plateforme importante susceptible de rivaliser avec les grandes plateformes américaines… Alors, qui dit la loi aujourd’hui sur le territoire ? L’Etat bien sûr, mais aussi les plateformes qui détiennent un pouvoir croissant. Un défi de taille pour l’administration locale et nationale !

 

Retrouvez l'intégralité de la conférence en vidéo sur le site du Conseil de Développement.

 

Les « Grands Témoins »

Hervé Rivano est chargé de recherche à l’INRIA/INSA Lyon. Il dirige l’équipe UrbaNet (pour « Urban Networks ») qui travaille autour des problématiques d’étude et de développement de réseaux capillaires prenant en compte les spécificités de l’environnement urbain.

Elisabeth Grosdhomme Lulin est directeur général de Paradigmes et cætera, société d’études et de conseil qu’elle a fondée en 1998, consacrée à la prospective et à l’innovation. Elle est également administrateur de plusieurs entreprises cotées. Elle a signé de nombreux articles et textes, dont deux rapports pour l’Institut de l’Entreprise : Gouverner à l’ère des algorithmes : promesses et périls du service public « augmenté » (2015) et Service public 2.0 (2013).

Directeur de recherche à l’InriaStéphane Grumbach est responsable de l’équipe Dice (Données de l’Internet au Cœur de l’Economie), et directeur adjoint de l’IXXI (Institut Rhône-Alpin des Systèmes Complexes). Spécialiste de bases de données, il est l’auteur d’un grand nombre d’articles où notamment, il développe et analyse les effets de l’intermédiation algorithmique (Bulletin de la société informatique de France, novembre 2015).