Vous êtes ici :

De l’intérêt des jardins et du jardinage pour l’habitat social et la santé psychique

Photographie d'une branche d'arbre sur laquelle est suspendu une maison pour oiseaux en bois

Texte de Béatrice CHARRE et Mireille LEMAHIEU

De nouvelles formes de jardins apparaissent dans nos villes, espaces intermédiaires entre jardins publics et jardins privés. Les jardins collectifs s’implantent sur du terrain public ou privé et sont gérés par et pour les habitants. Ils permettent l’accès à la pratique du jardinage pour le plus grand nombre.

Le jardin et le jardinage sont de formidables outils de développement social car ils concernent tous les publics : enfants, parents, grands-parents. Toutes origines et toutes cultures peuvent se retrouver dans la pratique du jardinage. Le jardin devient un espace de participation démocratique et permet la création de lien social intergénérationnel et interculturel. De plus, ces jardins collectifs deviennent des lieux pratiques d’éducation à l’environnement où l’on peut aborder concrètement la gestion des déchets, la gestion économe de l’eau, l’appropriation des lieux, le respect et l’embellissement des espaces extérieurs, ces thématiques intéressant particulièrement les bailleurs sociaux.
Date : 01/02/2009

De nouvelles formes de jardins se développent et présentent un grand intérêt pour l’habitat social 

De nouvelles formes de jardins apparaissent da ns nos villes, espaces intermédiaires entre  jardins publics et jardins privés. Les jardins collectifs s’im plantent sur du terrain public ou privé et sont gérés par et pour les habitants. Ils permettent l’accès à la pratique du jardinage pour le plus grand nombre. Le jardin et le jardinage sont de formidables outils de développement social car ils concernent tous les publics : enfants, parents, grands-parents. Toutes origines et toutes cultures peuvent se retrouver dans la pratique du jardinage. Le jardin devient un espace de participation démocratique et permet la création de lien social intergénérationnel et interculturel. De plus, ces jardins collectifs deviennent des lieux pratiques d’éducation à l’environnement où l’on peut aborder concrètement la gestion des déchets, la gestion économe de l’eau, l’appropriation des lieux, le respect et l’embellissement des espaces extérieurs, ces thématiques intéressant particulièrement les bailleurs sociaux. Les jardins collectifs se développent fortement sur le Grand Lyon. Ils sont définis dans une proposition de loi adoptée par le Sénat en 2003.

Ils se répartissent en 3 catégories :

•  Les jardins familiaux, ou autrefois appelés jardins ouvriers, existent pour leur part depuis plus de 100 ans. Ils existent une soixantaine de sites sur le Grand Lyon. «On entend par jardins familiaux les terrains divisés en parcelles, affectés par les collectivités territoriales ou par les associations de jardins familiaux à des particuliers, y pratiquant le jardinage pour leurs propres besoins et ceux de leur famille, à l’exclusion de tout usage commercialEn outre, dans un but pédagogique ou de formation au jardinage, certaines parcelles de jardins familiaux peuvent être affectées à des personnes morales par convention conclue entre celles-ci et les collectivités territoriales ou les associations de jardins familiaux.»  

•  Les jardins d’insertion existent depuis une trentaine d’années. Il existe une dizaine de site en région lyonnaise. «On entend par jardin d’insertion les jardins créés ou utilisés en vue de favoriser la réintégration des personnes en situation d’exclusion ou en difficulté sociale ou professionnelle. Ces jardins peuvent être, le cas échéant, divisés en parcelles affectées à ces personnes à titre temporaire». Les jardins d’insertion permettent la production de maraîchage soit pour l’alimentation familiale, les personnes viennent alors au jardin de manière bénévole et volontaire(on parle de «jardin d’insertion sociale»), soit pour être vendue à un réseau d’adhérents, les personnes viennent alors au jardin dans le cadre d’un contrat de travail adapté au public en réinsertion professionnelle (on parle de «jardin d’insertion par l’économie solidaire»).

•  Les jardins partagés existent  depuis une dizaine d’années. Il existe une soixantaine de  sites sur le Grand Lyon. «On entend par jardins partagés, les jardins créés ou animés collectivement, ayant pour objet de développer des liens sociaux de proximité par le biais d’activités  sociales, culturelles ou éducatives et étant accessibles au public». Ils prennent différentes formes. Le terme «jardin pédagogique» désigne un jardin qui a la vocation d’être support d’activités éducatives pour les enfants, le terme de « jardin de quartier » désigne un jardin cultivé et géré en commun par les membres d’une association de quartier, le terme «jardin nomade» ou «éphémère» signale le caractère temporaire de l’occupation du terrain. Le terme «jardin en pied d’immeubles» désigne des parcelles cultivées au bas des bâtiments de logements collectifs des bailleurs sociaux.

Cette dernière forme rencontre un grand succès, notamment au pied des immeubles des quartiers HLM des années 60, où il y a beaucoup d’espace extérieurs peu valorisés par les habitants qui se résument souvent à des pelouses plus ou moins entretenues et où les bailleurs proposent à leurs locataires de construire leur potager. La création du jardin est l’occasion pour les habitants de se saisir de leur territoire, de créer un nouveau rapport au bailleur et à ses voisins. Le jardin devient un lieu de solidarité, d’échange, de pacification des rapports sociaux. Les conflits et les problèmes existants dans les immeubles continuent d’exister et peuvent se retrouver dans le jardin. Le jardin représente alors une micro-société où chacun y trouve suffisamment d’intérêt pour trouver les solutions aux conflits.

 

La pratique du jardinage et son rôle dans la santé psychique

La pratique du jardinage apporte du bien-être, permet d’améliorer son alimentation et a un réel impact sur la santé des jardiniers-habitants. Pour chacun d’entre nous, jardiner est à la fois apaisant et motivant. On se délasse, on oublie  ses soucis, on aborde son alimentation différemment. Bref, on renouvelle son rapport à la nature et à la vie. Il est donc important de rendre le jardin et le jardinage accessibles à tous... Et en particulier aux personnes en situation de handicap psychique qui peuvent avoir abandonné ce lien avec la terre. Pour cela, dans un premier temps, il faut prévoir l’accès au jardin avec des aménagements simples s’ils sont pensés en début de projet : larges allées, repères pour l’orientation, bacs surélevés pour jardiner assis ou debout. Dans un second temps, il faut prévoir l’accès à l’activité jardinage en proposant une découverte et un accompagnement adapté à chacun. Les plantes se moquent bien des handicaps ! Grâce au jardinage, on réapprend des gestes, on se motive sur un projet commun, on développe sa mémoire, son repérage, sa notion du temps, sa créativité artistique.

Du fait de leur handicap psychique, les personnes se comportent souvent comme si elles ne pouvaient plus mettre en œuvre leurs capacités face à un environnement qu’elles perçoivent alors comme intrusif à leur égard. La conscience de ses propres incapacités est à l’origine de souffrances psychiques. La pratique du jardinage permet de valoriser certaines capacités et d’en développer de nouvelles. Elle diminue la souffrance psychique. Les personnes handicapées psychiques ont beaucoup de mal à percevoir la réalité. Le jardin les inscrit dans une réalité temporelle et physique. Ces personnes sont souvent anxieuses voire angoissées et hypersensibles. Elles ont un fort sentiment d’insécurité. Le jardin clos est un lieu sécurisé qui rassure la personne. Ce sentiment de sécurité est renforcé par la présence  d’une réglementation claire dans le jardin. La proximité et souvent la solidarité des autres jardiniers redonnent confiance et motivent.

De manière générale, la fréquentation des  jardins et la pratique du jardinage sont des activités particulièrement adaptées et intéressantes pour des personnes vulnérables. Cela demande cependant toujours une présence et un accompagnement bénévoles ou professionnels pour que ces activités soient durables.

Plusieurs expériences existent sur le Grand Lyon sur des terrains appartenant aux bailleurs ou sur du terrain public au cœur d’un quartier. Dans le quartier des Brosses à Villeurbanne, la Ville a mis en place au cœur d’un ensemble de logements sociaux des jardins familiaux où des habitants du quartier qui n’ont pas de jardin privé ont pu avoir une parcelle à cultiver. Dans cet ensemble de jardins familiaux, une parcelle est réservée pour un jardinage collectif avec les écoles du quartier, le foyer ARALIS, la Maison sociale, la Maison de quartier, la Confédération syndicale des familles... Cette parcelle partagée est devenu un lieu de convivialité intergénérationnelle en extérieur qui n’existait pas auparavant. 

Dans le quartier du Golf à Oullins, le bailleur HMF a créé des jardins partagés en pied d’immeuble. Cette expérience a permis aux habitants de réinvestir les espaces extérieurs et de limiter pour le bailleur le sur-entretien que nécessitait le quartier. Les relations bailleur/locataires se sont aussi améliorées. Dans le quartier des Minguettes à Vénissieux, la Ville a créé un Jardin d’insertion social dont elle a confié la gestion à l’association le passe-jardins. Sur 3000 m² de terrains une douzaine de personnes en difficulté de vie viennent jardiner collectivement pour leur  alimentation familiale 3 demi-journées par semaine . Certaines de ces personnes souffrent d’un handicap psychique et ont été envoyé par des structures d’accompagnement. Elles retrouvent avec le jardin un bien être et une meilleure hygiène alimentaire. Le jardin s’ouvre aussi sur le quartier en accueillant des personnes retraitées qui étaient isolées, et les enfants de l’école voisine.