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Métiers du prendre soin et du lien : Pourquoi on candidate, on tient, on s’en va (synthèse des enquêtes)

Attractivité des métiers du prendre soin et du lien : Pourquoi on candidate on tient on s’en va (synthèse des échanges)

Étude

La Métropole de Lyon a souhaité engager une réflexion de fond sur les facteurs d’engagement dans les métiers du prendre soin : comment expliquer le manque d’attractivité de ces métiers ?

Comment expliquer la difficulté des employeurs à fidéliser leurs salariés ?

Quelles solutions peut-on apporter aux difficultés constatées ?

Certaines problématiques sont bien connues comme les problèmes d’image, de conditions de travail ou de rémunération (ce qui ne signifie pas pour autant que les réponses à leur apporter soient simples, univoques).

D’autres semblent moins balisées, à l’instar des conditions de la formation initiale à l’heure de Parcoursup, des pratiques managériales, ou encore des représentations et stéréotypes concernant l’âge, le genre ou l’ethnicité qui influencent à la fois les individus et les organisations dans leurs pratiques et dans leurs choix.

Alors, pourquoi on candidate, on tient, on s’en va ? Retrouvez la synthèse des enseignements des différentes enquêtes conduites sur ces questions par la direction de la prospective.
Date : 11/04/2024

Retrouvez l'étude complète, à télécharger ici :

 

Quels sont les facteurs d'engagement dans les métiers du prendre soin ?

 

Attractivité des métiers du prendre soin et du lien : Les facteurs d'engagement dans le métier

 

Certains facteurs peuvent être d’ordre « rationnel » et instrumental

 

La nécessité économique de travailler, mais aussi l’opportunité d’entrer dans un secteur qui recrute, alliée à la connaissance de personnes qui travaillent dans ce secteur et peuvent en favoriser l’accès expliquent de nombreuses entrées dans le métier. Des aides pour suivre une formation et obtenir un diplôme procurent reconnaissance et valorisation, par opposition souvent à un parcours scolaire qui a dû être interrompu rapidement. L’entrée dans ces métiers et un premier diplôme peuvent permettre ensuite l’accès à un autre métier du secteur via une formation supplémentaire. Alors, le métier initial constituerait un passage vers un autre métier souhaité. Mais d’une manière générale, les personnes portent un intérêt à ces métiers de la relation qui peuvent être, dans leur parcours, le prolongement d’autres métiers de contacts ou de relations.

 

L’intérêt pour ces métiers est « naturel » !

 

La réponse à la question « d’où vous vient cet attrait pour les métiers de l’aide à la personne ? » est stupéfiante tant les personnes interrogées répondent en cœur : « c’est naturel ! » comme une évidence. Il n’y aurait rien à comprendre là-dessous.

Cependant, en analysant le signifiant de ce mot, pour les personnes rencontrées, nous en avons ressorti une analyse riche, polysémique et reprenant des facteurs intimes, subjectifs et en lien avec l’histoire personnelle et sociale des personnes.

• Éprouver de l’intérêt – Tout d’abord, les personnes rencontrées éprouvent un réel intérêt pour ces métiers.

• Baigner dans une culture de solidarité – Ces métiers s’inscrivent dans le prolongement d’une culture de la solidarité, notamment pour des personnes issues d’Afrique sub-saharienne où aider l’autre est la norme. Cette norme refait-elle surface lorsqu’il s’agit de travailler ou alors les personnes ont-elles à cœur de participer à la survivance de cette solidarité ?

• S’inscrire dans un univers familier – Pour nombre de jeunes professionnelles, le secteur de l’aide à la personne regroupe des activités qu’elles ont déjà exercées de manière professionnelle ou familiale avant de commencer une formation. Ainsi exercer dans un secteur connu peut-il être rassurant pour les personnes ou alors aussi montrer une forme d’essentialisation des compétences avec une assignation à une place, plus particulièrement pour les femmes.

• Rendre ce qui a été reçu – Travailler dans ce secteur permettrait aussi de rendre ce qui a été reçu du côté de l’aide à un proche.

• Réparer ce qui n’a pu être fait – Nous avons perçu chez certaines personnes un très fort engagement en lien avec une histoire personnelle d’impossibilité d’aider un proche. Il s’agirait alors de réparer ce qui n’a pu être fait dans le passé et qui pèse sur la personne.

• Recréer des liens – De nombreux intervenants dans le secteur de l’aide à la personne sont issus de l’immigration. Cela signifie des parcours de rupture personnelle et familiale, peut-être aussi de la solitude. Ainsi, les liens créés avec les bénéficiaires et leurs familles peuvent-ils recréer des liens de type familiaux.

• Poursuivre une trajectoire – Entrer dans ces métiers peut constituer la poursuite d’une trajectoire d’aide à l’autre.

 

Des facteurs d’engagement d’ordre personnel et liés à des valeurs

 

Nous voyons que les facteurs d’engagement dans le métier sont multiples et appartiennent à des registres très différents : du plus instrumental, l’économique, au registre social « cultiver la solidarité » par exemple, en passant par le registre personnel avec « rendre » ou « réparer ».

Les facteurs d’ordre personnel et politique montrent comment les personnes, malgré parfois une nécessité économique, suivent un chemin vers l’émancipation à travers le travail, se réapproprient leur trajectoire en exerçant un métier qui donne du sens à leur action et à leur vie et porte des valeurs politiques telles que la solidarité et l’action collective. Nous comprenons ici que la précarité économique et sociale de ces professionnelles n’en fait pas moins des sujets responsables d’elles mêmes, de leurs engagements et soucieuses du monde qui les entoure.

Chacune créée sa propre alchimie de facteurs d’engagement dans le métier. Loin de s’opposer, ceux-ci se complètent, se répondent et sont intriqués de manière profonde chez les individus sans être forcément conscientisés. Pourtant, ils peuvent être très puissants. Cela nous amène à considérer que l’engagement dans un métier relève de la complexité.

 

Enjeu – Au-delà de l’engagement, travailler à la soutenabilité des métiers

 

Lors de l’exercice de l’activité, les facteurs d’engagement rentrent en dialectique avec des facteurs de soutenabilité pour « tenir » face au réel. Ces métiers de l’aide à la personne sont des métiers difficiles, et « tenir » implique parfois des stratégies. C’est ce qui a par exemple été rencontré pendant l’enquête avec l’exemple du « mercenariat » (terme utilisé par un manageur). Il s’agit pour les professionnels concernés d’intervenir en vacations et non pas en CDI dans une institution fixe.

Nous faisons l’hypothèse que ce mode d’activité leur permet d’acquérir une distance qui rend tenable l’exercice du métier ; un exercice qui peut être mis en échec quand il n’est pas possible d’effectuer du « bon travail » et que les contraintes de temps et de moyens entrainent des conflits éthiques sur le « bien travailler » et le « prendre soin ».

En conclusion, loin d'être simple et de contours bien définis, l’engagement dans les métiers de l’aide à la personne relève d’une complexité et d’une épaisseur qu’il serait intéressant de déplier plus avant pour pouvoir proposer des politiques favorisant l’entrée mais aussi le maintien dans ces métiers, dont les professionnelles nous disent qu’ils sont humainement enrichissants et peuvent être porteurs de sens, à condition de pouvoir les exercer dans des conditions acceptables pour elles.

 

Attrait pour le métier, compétences : une affaire de femmes. Vraiment ?

 

Attractivité des métiers du prendre soin et du lien : Représentations de genre et pratiques professionnelles

 

Les hommes qui choisissent les métiers du care le font à rebours des représentations collectives

 

Ils se présentent peu aux formations ou au recrutement, parce qu’ils connaissent peu les possibilités offertes par ces métiers ou qu’ils ne pensent pas spontanément que ceux-ci les concernent. Ces freins s’ajoutent à ceux, plus généraux, qui pèsent sur les métiers du care : dévalorisation, pénibilité, faible rémunération, etc..

Ceux qui s'engagent dans la profession le font parfois par volonté, parfois au hasard d'une réorientation ou d'une opportunité.

 

Être un homme s’avère être un atout, au point que certains auteurs parlent d’un « escalator de verre » pour expliquer leurs progressions de carrière

 

Les hommes rencontrés qui sont en poste dans un métier du prendre soin témoignent le plus souvent d’un bon accueil (dans leur formation initiale, de la part de leurs collègues, et de la plupart des usagers). Trouver un emploi semble plus facile pour eux, prendre des responsabilités d’encadrement également. Si des freins sont parfois relevés (suspicion de pédophilie, de manque de virilité, de manque d’ambition, etc.), ils n’empêchent pas un effet plus prégnant de discrimination positive à leur endroit. Cela dépend toutefois des métiers, les moins qualifiés étant aussi les plus perçus comme étant naturellement dédiés aux femmes.

 

Les hommes reçoivent un bon accueil parce qu’ils amènent de la mixité dans les équipes

 

Pour nombre d’encadrants, avoir des hommes au sein d’une équipe permettrait à la fois de faciliter les relations entre professionnels et de flécher les hommes sur certaines missions, que ce soit pour répondre aux demandes de certains bénéficiaires ou parce qu'on présuppose qu’ils sauront mieux gérer certaines situations, notamment d’autorité et de conflit.

 

Les attendus sociaux de genre tendent à orienter les postures de chacun, les hommes se retrouvant appelés vers des fonctions d'autorité et des sujets censément masculins comme le sport ou la mécanique…

 

Des professionnels de sexe masculin disent avoir un lien facilité aux usagers masculins et parfois une « position d’autorité » qui est recherchée par la hiérarchie pour gérer des problématiques spécifiques, par exemple la relation avec les jeunes en recherche d’une figure paternelle.

Bien que l’intitulé des métiers soit le même pour les femmes et pour les hommes, leurs pratiques diffèrent donc parfois. Ainsi, la masculinisation des métiers ne semble pas reposer sur une vision de l’interchangeabilité des professionnels femmes ou hommes mais s’appuie au contraire sur leur complémentarité et sur des stéréotypes genrés.

 

Dans la relation des hommes aux usagers, la question de l’intime pose parfois des difficultés

 

Pour certains encadrants, les hommes sont plus difficiles à placer à domicile, notamment pour l’accompagnement des personnes âgées.

 

Les hommes rencontrés mettent souvent l’accent sur la professionnalité

 

Pour contourner les effets de genres selon lesquels les femmes seraient naturellement aptes à exercer les métiers du soin, les hommes interrogés soulignent qu’ils effectuent un véritable métier, requérant des compétences, et pour lequel ils ont été formés. Plus le métier nécessite un diplôme élevé, plus l'argument est mobilisé.

 

Enjeu – Une mixité bienvenue mais risquée

 

L’arrivée d’hommes dans des métiers féminisés est considérée par beaucoup comme un bienfait opérant de façon mécanique. Pourtant, elle pourrait être préjudiciable aux femmes en introduisant des inégalités de genre dans des métiers où elles en étaient jusque-là préservées – du fait de l’absence d’hommes. Si la mixité est un atout, celle-ci ne peut s’effectuer sans une stratégie RH réfléchie et doit éviter de s’appuyer sur les stéréotypes de genre et sur des « idéologies de la complémentarité ». Comment penser la progression d’une mixité professionnelle agissant comme un levier d’égalité femmes-hommes ?

Il semble important de mieux comprendre les mécanismes par lesquels les parcours professionnels des hommes et leur bonne intégration dans les équipes semblent facilités aujourd’hui. Ces mécanismes s’expriment-ils dans tous les métiers du care, y compris les moins qualifiés ? Valent-ils seulement parce qu’il existe un déséquilibre femmes-hommes important dans les effectifs ? Et par conséquent, sont-ils voués à disparaître au fur et à mesure que celui-ci se comblerait ?

 

Enjeu – L’accueil des hommes dans la profession

 

Des effets de culture et de génération pèsent parfois sur l’acceptation des professionnels masculins par les usagers.

Pour certains encadrants, cette inégale acceptation des hommes pose un problème qui doit conduire à un travail pédagogique auprès de ces bénéficiaires. Et cela doit amener à s’interroger sur la question de la place de l’usager dans le choix des personnes qui les accompagnent. Comment faire droit à leur demande sans produire de la discrimination ou conforter des stéréotypes ?

Par ailleurs, bien qu’ils soient généralement bien accueillis, les hommes doivent parfois mettre en place des stratégies de légitimation quand ils intègrent les métiers du care (affirmer leur masculinité, rassurer quant aux craintes de pédophilie, etc.). Un travail RH semble donc nécessaire à conduire à l’échelle de l’institution qui les embauche (quelles attentes vis-à-vis d’eux ? quels rôles ? etc.). Il s’agit non seulement de mieux les accompagner mais aussi de mieux dessiner la place qu’ils peuvent occuper dans l’organisation, avec leurs collègues femmes ou avec les usagers.

 

Enjeu – Valoriser la professionnalité


Différents enjeux sont identifiés pour la progression des hommes dans les métiers du care. D’abord un enjeu d’information sur les formations (qu’il s’agisse de formation initiale ou de reconversion), les opportunités d’emploi et de carrière, la diversité des métiers, etc.. Ensuite, un enjeu de déconstruction des stéréotypes de genre, en direction des professionnels eux-mêmes (pour favoriser l’indifférenciation des rôles de genre), mais aussi des usagers.

Mais surtout, et conformément à ce qui précède, la professionnalité apparaît comme un enjeu majeur. À rebours d’un discours naturalisant les compétences féminines comme étant par essence celles des métiers du care, un effort doit être conduit pour considérer ces métiers comme reposant sur un socle de compétences professionnelles à acquérir, tout en continuant de valoriser les compétences relationnelles nécessaires aux métiers du care comme des compétences professionnelles.

Une crainte du secteur, à laquelle il conviendra d’apporter des réponses, est que cette professionnalisation freine les possibilités d’embauche de certaines femmes peu formées, notamment étrangères, qui se présentent dans les métiers les plus en tension.

 

Les métiers du prendre soin, entre levier d'inclusion et assignation pour les femmes migrantes

 

Attractivité des métiers du prendre soin et du lien : Parcours migratoires et relations interculturelles dans les métiers de l'aide a domicile

 

Une division genrée et racisée du travail du care


Des politiques publiques contribuant à l’assignation des femmes migrantes (voire de leurs descendantes) au secteur de l’aide à la personne se sont déployées au cours des dernières décennies en lien avec les transformations profondes du marché du travail : développement des migrations féminines internationales vers l’Europe, glissement du travail du care du seul cadre familial vers une commercialisation partielle, forte croissance des besoins sur ce nouveau marché.

D’un côté, les politiques publiques migratoires organisent, depuis les années 1960, l’immigration de travail afin que celle-ci vienne répondre aux besoins de main d’œuvre, notamment dans le secteur de la santé et des services à la personne. De l’autre, les politiques de l’emploi et de l’insertion professionnelle priorisent aussi l’orientation des demandeurs d’emploi vers les métiers en tension, dont le secteur de l’aide à la personne, accessible avec peu, voire pas de qualifications. Cette orientation, voire cette assignation, se trouve décuplée pour les personnes en situation de migration lorsque les diplômes du pays d’origine ne sont pas reconnus, du fait que les dispositifs d’apprentissage du français sont fréquemment orientés sur les métiers de l’aide à la personne ou encore des fortes discriminations liées à l'origine sur le marché de l'emploi. Mais des facteurs d’émancipation interviennent également puisque les métiers du care, accessibles sans formation, peuvent constituer une voie de promotion sociale et de mobilité professionnelle via la formation.

 

Des parcours individuels, reflets d’imbrications complexes entre assignation, choix et opportunités

 

Bien souvent, les personnes rencontrées se disent à la fois poussées vers ces métiers par les réalités du marché du travail (manque de qualifications, discriminations à l’embauche, etc.) et mues par des facteurs d’engagement liés à leurs origines culturelles et à leurs parcours migratoire : représentations positives de la vieillesse, réseaux communautaires déjà impliqués dans ces métiers, etc. Mais, déjouant les représentations essentialisantes, nombre de facteurs d’engagement semblent partagés avec leurs collègues non racisées / non migrantes : percevoir la relation avec les personnes âgées comme enrichissante, être attaché à une vision moins individualiste de la société, avoir eu une proximité avec ces métiers par l’entourage familial ou social, etc.

 

La politique de formation, un puissant levier d’inclusion sociale et de fidélisation des salariés

 

L’absence de diplôme n’est pas un frein à l’embauche car les structures soutiennent fortement la qualification de leur personnel via la Validation des Acquis de l’Expérience (VAE), et depuis peu l’apprentissage. Les critères de recrutement des personnes migrantes ne se distinguent pas tellement des candidatures générales : motivation, vision du métier et éventuellement expérience personnelle précédente priment. Pour les personnes migrantes issues d’aires non francophones, l’obstacle premier est donc la maîtrise minimale du français. En la matière, l’offre de formation apparait comme insuffisante et peu de structures proposent d’associer formation linguistique et embauche.

Les personnes migrantes diplômées du secteur médical et paramédical dont les diplômes ne sont pas reconnus en France trouvent donc, au prix d’une déqualification, une voie vers des métiers du prendre soin permettant une évolution professionnelle (ex. aide à domicile, puis aide-soignant, puis infirmier). Les structures et les bénéficiaires, profitent ainsi de professionnels aux compétences et savoirs étendus.

La mobilité professionnelle semble réelle et la plupart des personnes rencontrées en ont bénéficié.

 

Des vécus de racisme au quotidien insuffisamment accompagnés par les structures

 

Si pour beaucoup, les discours font état d’une bonne entente entre les personnes interrogées et les bénéficiaires, certains témoignages font remonter de nombreuses expériences de racisme, pouvant aller du refus de soin à la violence verbale et psychologique. La gestion de ces incidents par les professionnelles est considérée comme faisant partie des compétences relationnelles nécessaires pour effectuer ces métiers, et leur prise en compte par l’environnement professionnel semble souvent faible. L’impact de ces violences en termes d’usure professionnelle est peu évoqué et travaillé. Différentes pistes d’action peuvent être envisagées par les structures encadrantes : faire exister des espaces au sein des organisations afin que ces questions puissent être abordées, en amont et en aval (analyse des pratiques, espaces d’élaboration collective…) ; clarifier les procédures de remontée des incidents et l’accompagnement des professionnelles victimes par la structure.

 

Enjeu – L’investissement dans la formation

 

Mener une politique volontariste de formation et d’évolution de carrière demande un investissement fort de l’employeur notamment auprès des personnes ayant été peu, voire pas scolarisées. Mais pour certaines structures, cela constitue un véritable levier de fidélisation des salariées. Le diplôme, par la technicité qu’il implique, atténue des discriminations possibles liées à l’origine et/ou au genre. Les initiatives de création de « parcours découverte » entre différents cadres d’emploi et volets de l’aide à la personne sont particulièrement intéressantes pour les personnes migrantes venant de pays dans lesquels ces métiers n’existent pas et qui les découvrent avec intérêt.

En revanche, le plurilinguisme n’est pas du tout perçu comme une ressource pour améliorer la qualité de l’offre de service auprès des bénéficiaires, alors que les études montrent que la qualité d’une relation de soin dépend aussi de la qualité des interactions langagières. L’offre de services d’aide à la personne ne pourrait-elle pas s’enrichir du plurilinguisme ?

 

Enjeu – D’un accompagnement social des personnes au coup par coup à une stratégie globale ?

 

Face aux difficultés de recrutement, des structures développent une mission d’accompagnement social des personnes migrantes pour les aider à faire face à leurs difficultés administratives, bancaires, de logement..., mission qui peut aller jusqu’à faciliter la régularisation des personnes en situation d’illégalité et l’obtention d’un permis de travail.

Certaines structures envisagent de déployer une stratégie de recrutement adressée spécifiquement aux femmes et hommes migrants. Mais pour cela, il faut pouvoir développer des coopérations intégrant, outre les acteurs que sont les intermédiaires de l’emploi, ceux de la formation et les employeurs, les acteurs accueillant des personnes migrantes (foyer d’hébergement, association d’accompagnement…), ainsi que ceux du logement et de la mobilité. Malgré leur bonne volonté, les structures peinent à dégager le temps nécessaire au montage de ces actions, et à passer d’un impact ciblé et occasionnel à une stratégie plus rodée et à large impact.

 

Enjeu – Vers la constitution de plateformes locales ?

 

À la suite de ce qui vient d’être dit, une tendance montante au sein des institutions est de privilégier la création de plateformes d’emploi et d’insertion favorisant l’interconnaissance et l’interaction entre tous les acteurs d’un territoire. L’idée est celle du parcours « sans couture » alliant repérage des bénéficiaires, formation, mise à l’emploi et emploi.

Rares sont toutefois les plateformes permettant de cibler les personnes migrantes et leur problématiques spécifiques. Celles qui s’essayent au croisement des politiques d’immigration, d’insertion et de citoyenneté, à l’instar de l’expérimentation marseillaise « Lab Migration », sont intéressantes mais semblent omettre d’y associer une réflexion sur les logiques d’assignation pourtant indispensable au regard des enjeux de justice sociale, mais aussi de santé au travail et de maintien dans le secteur des individus.

 

Enjeu – Le casse-tête de la lutte contre le racisme

 

Que ce soit lors des remontées d’incidents racistes, ou des demandes de certains bénéficiaires en termes ethniques concernant la personne qui va intervenir chez eux, les équipes encadrantes rencontrent des discours face auxquels plusieurs stratégies sont mises en place. Beaucoup font des efforts de pédagogie et adoptent un positionnement proactif pour discuter avec les personnes qui ont ces comportements, afin de déconstruire les appréhensions et les préjugés. L’argument de la technicité et de la professionnalité est également mis en avant dans ces échanges, pour « faire accepter » les professionnelles.

Accéder aux demandes des bénéficiaires, une solution parfois choisie pour ne pas mettre la professionnelle dans une position difficile, peut s’avérer problématique parce que cela conduit à entériner des préjugés et pose des problèmes légaux (il peut alors s’agir de légitimer une discrimination). À l’inverse, soumettre la professionnelle aux violences est contraire à l’obligation de sécurité et de protection de la santé que l’employeur doit à son personnel. Cet aspect est peu évoqué par les structures. Accompagner le secteur sur la manière d’articuler ces tensions serait opportun.

 

Jeunes en formation : des idéaux à l'épreuve du réel

 

Attractivite des metiers du prendre soin et du lien Regards croises de jeunes en formation et de formateurs

 

L’entrée en formation : histoires de vie… et recrutements via Parcoursup


Les jeunes qui entrent en formation ont souvent une proximité avec ce secteur, que celle-ci soit personnelle (avoir rencontré/partagé le quotidien de personnes qui vivent des difficultés) ou professionnelle (avoir un proche qui exerce un métier du social). Certains étudiants ont déjà eu une première expérience dans le secteur social, l’encadrement ou l’animation. Le service civique est par exemple considéré comme très formateur. Ces expériences permettent aux étudiants d’éprouver et de confirmer leur intérêt, ou découragent ceux qui ne se sont pas engagés dans la bonne voie. Les encadrants saluent ces parcours qui favorisent la réussite des étudiants et leur intégration professionnelle.

Toutefois, ces dernières années, l’accès aux formations via Parcoursup conduirait les établissements de formation à recruter des candidats plus jeunes, moins renseignés sur la réalité des métiers et exigeant finalement plus d’accompagnement.

 

Des étudiants plus jeunes, moins matures et plus précaires

 

L’évolution du profil des étudiants ces dernières années vient complexifier, voire mettre en péril, leur formation et leur entrée dans le monde du travail. Les étudiants sont en effet plus nombreux à solliciter des aides financières, à rencontrer des difficultés de logement ou à développer des problèmes de santé, notamment psychique. Ils sont aussi en moyenne plus jeunes qu’auparavant à leur entrée en formation. Or, si un âge plus avancé ne présage pas la réussite, il va souvent de pair avec une première expérience professionnelle et une certaine maturité, deux éléments importants pour faire face à des formations et des métiers exigeants.

In fine, les étudiants d’aujourd’hui ont besoin de davantage d’accompagnement pour suivre leur formation théorique et pratique, un accompagnement que les écoles ont du mal à assurer en raison de baisses des dotations.

 

Une rencontre souvent difficile avec le métier : la formation pratique

 

Malgré l’accompagnement apporté par les écoles, trouver un stage ne va pas de soi. Les structures en difficulté réduisent l’accueil de stagiaires car elles ne peuvent assumer les gratifications devenues obligatoires. Certains jeunes sont réduits à renoncer à leur gratification pour obtenir le stage souhaité. Des professionnels en place refusent d’encadrer des stagiaires par manque de disponibilité ou parce qu’ils souhaitent quitter leur structure. Une fois en stage, des jeunes, sans doute accueillis dans des conditions peu optimales, sont ébranlés dans leurs représentations et dans leur posture de professionnels. La confrontation au manque de moyens, à des conflits avec les professionnels ou aux relations perturbantes avec les usagers vient mettre à l’épreuve leur motivation, peut les faire douter de leur choix d’orientation, ou semer en eux la certitude qu’ils n’exerceront pas longtemps le métier vers lequel ils se dirigent.

 

Les jeunes et les métiers du social : trouver la balance entre sens du travail et contraintes de vie

 

Dans les enquêtes sur le travail, il apparaît que le désir de préserver un équilibre entre vie privée et vie professionnelle est particulièrement important pour les jeunes générations. Les jeunes semblent avoir intégré l'instabilité du marché de l'emploi, le principe d'écouter ses aspirations (qui peuvent changer au cours de la vie), le fait qu'ils exerceront plusieurs métiers et au sein de plusieurs organisations au cours de leur carrière. Ces différents éléments peuvent expliquer une tension avec certaines fonctions du social et médico-social qui impliquent des horaires de travail en dehors de la journée et/ou de la semaine.

Quoi qu’il en soit, le travail social reste un secteur qui attire parce qu’il rassemble des métiers qui « ont du sens », malgré des niveaux de rémunérations assez peu motivants.

 

L’engagement, une idée en débat

 

Au sein des établissements de formation s’expriment des rapports au travail social très différents selon les étudiants. Certains se montrent très critiques à l’égard du système social dans son ensemble, qui produit des inégalités que les travailleurs sociaux ont ensuite pour mission de prendre en charge et de réguler ; d’autres, à l’inverse, se disent plutôt satisfaits de pouvoir accompagner des personnes à l’échelle individuelle, même si cela ne contribue pas à changer le système dans son ensemble.

Pour leur part, les responsables de formation semblent déplorer la moindre appétence des étudiants pour les questions de société, constat qui pourrait tenir surtout à un renouvellement générationnel des formes d’engagement et des thèmes de mobilisation. Étudiants et formateurs se retrouvent néanmoins sur le fait qu’être engagé dans son travail et avoir « un minimum de goût pour les autres » est indispensable aux métiers du social, même si ce que recouvre cette notion « d’engagement » semble finalement assez variable selon les sensibilités politiques de chacun.

 

Enjeu – Accompagner vers les différents terrains du réel

 

Une faible visibilité auprès des jeunes doublée d’une représentation biaisée ou idéalisée des métiers du social et du médicosocial ; des étudiants de plus en plus jeunes et moins matures ; des conditions d’accueil des stagiaires et des jeunes professionnels souvent dégradées du fait de conditions de travail elles aussi dégradées au sein des organisations… la confrontation au réel semble particulièrement brutale aujourd’hui pour les jeunes qui se destinent aux métiers du social et du médicosocial.

Cela dessine les contours d’une ambition dans laquelle toutes les parties prenantes doivent pouvoir trouver leur place : professionnels de l’orientation (informer sur les réalités des métiers) ; parents (accepter l’idée que les services civiques et autres expériences juvéniles ne sont pas du temps perdu mais aident à se connaitre, se construire, et réussir son orientation) ; écoles (être présentes sur les salons ; assurer un accompagnement individualisé des étudiants) ; employeurs (ouvrir des terrains de stages ; faire de l’accueil des stagiaires et des jeunes professionnels une priorité ; intervenir dans les cursus de formation pour parler des métiers et de leurs réalités).

 

Les écoles de travail social et médicosocial à la croisée des chemins

 

Attractivite des metiers du prendre soin et du lien : Les écoles en travail social à la croisée des chemins enquête dans l'agglomération lyonnaise

 

Les publics des écoles évoluent dans le sens d’une plus grande fragilité

 

Quatre tendances constituant autant de défis pour l’avenir se conjuguent pour transformer profondément les publics en formation au sein des écoles : une hausse des taux d’abandons liée au fait qu’une part croissante des étudiants intègrent directement les écoles après le bac dans le cadre d’une orientation via Parcoursup ; une hausse du nombre de diplômés qui n’exercent pas un métier de travailleur social après leurs diplômes ; une hausse des bac professionnels et technologiques dans le recrutement pour les formations post-bac qui oblige à un accompagnement renforcé des apprenants sur le plan scolaire ; une hausse des difficultés sociales des apprenants (difficultés de logement et problèmes financiers, santé psychique, etc.) liée à différents facteurs comme, d’une part, les emplois du temps surchargés (du fait des stages) qui rendent difficiles les jobs étudiants et, d’autre part, la jeunesse des apprenants qui, arrivant via Parcoursup n’intègrent pas forcément les écoles dans le cadre d’un premier choix et à l’issue d’une décision bien maturée.

 

Le paysage de la formation se transforme très vite en se diversifiant

 

Alors que le nombre élevé de diplômes d’État délivrés par les écoles constitue depuis longtemps un sujet en soi dans la mesure où il induit un grand nombre de métiers et de filières professionnelles étroites, pas forcément favorables aux mobilités professionnelles au cours de la carrière, la réforme de 2018 sur l’universitarisation des formations de niveau 6 vient encore complexifier la donne puisqu’elle oblige à des conventionnements entre écoles et universités pour l’obtention du grade de licence, sans délivrance du diplôme.

La diversification des formations et des diplômes au niveau bac+ 3, impliquant l’université, mais aussi au niveau infra-bac, impliquant le secondaire, renouvelle donc profondément le paysage des qualifications.

Comment les écoles se positionneront-elles demain dans cette concurrence avec les lycées professionnels et les universités ?

 

Un modèle économique en tension

 

L’économie générale des écoles enregistre une baisse des subventions régionales.

Alors qu’elles affrontent des concurrences nouvelles et doivent faire face à des dépenses inédites pour accompagner les étudiants de façon plus individualisée ou pour satisfaire à de nouvelles exigences de certification, les écoles s’efforcent de diversifier leurs ressources en investissant le marché du conseil, en développant des offres de formation en dehors de leur territoire traditionnel d’intervention, voire en créant des CFA.

Autant d’enjeux qui contribuent aussi à alimenter le mouvement des rachats et fusions d’écoles

 

Enjeu – Avenir des écoles : le marché tranchera ?

 

Les évolutions décrites ci-avant sont liées pour une bonne part à des décisions de l’État qui peuvent sembler dénuées de vision d’ensemble, ou qui plus précisément semblent ne pas être allées jusqu’au bout des logiques qui les ont motivées. Il s’ensuit que les scénarios d’avenir des écoles restent particulièrement ouverts : création de hautes écoles en travail social sur le modèle étranger (Belgique, Suisse, …) ; intégration des écoles à l’Université ; maintien des écoles dans leur fonctionnement actuel.

En attendant, les écoles expriment un fort besoin d’ancrage dans leurs territoires pour améliorer les conditions de logement ou de mobilité de leurs étudiants, trouver des terrains de stages, se faire connaître et mieux comprendre des familles au moment des choix d’orientation, etc.

 

Quand mal travailler rend malade

 

Attractivité des métiers du prendre soin et du lien : De la violence des situations de travail au travail institutionnel de la violence

 

Ce sont les professionnels les plus engagés qui tombent malades

 

Dès lors, les professionnels vont devoir résister pour tenir dans un environnement où la qualité du travail est empêchée. Sans perspective d’évolution de l’organisation du travail, les personnes vont s’épuiser et souffrir, physiquement et mentalement. La souffrance sera d’autant plus forte que les professionnels n’arriveront plus à maintenir une qualité de travail satisfaisante, voire participeront à sa dégradation, ce qu’ils pourront réprouver moralement. Ainsi, plus les personnes sont engagées à faire un travail de qualité, plus l’impact sur leur santé sera fort notamment en cas de conflit éthique.

 

L’organisation du travail : un levier pour maintenir la santé au travail

 

Il est impossible de supprimer les aléas du quotidien, l’écart entre le travail prescrit et le travail réel étant irréductible. Ainsi, l’enjeu en santé-travail, pour l’institution, consiste à donner les moyens aux professionnels de faire face aux éléments de variabilités pour les soutenir à maintenir un travail de qualité. Ces marges de manœuvre sont définies par l’organisation du travail qui permet à chaque professionnel de réaliser ses missions dans des conditions favorables à la santé.

Mais on ne travaille jamais seul, et les transformations de l’organisation du travail devront être discutées collectivement de manière à trouver des compromis satisfaisants pour tous, sans lesquels le collectif est mis à mal.

 

Enjeu – Des espaces de discussions pour définir des règles de travail

 

Pour qu’un collectif fonctionne, il ne peut faire l’impasse de discuter de ce que chacun fait et de comment il le fait. Parce que chaque personne est singulière, il est nécessaire de délibérer collectivement pour que s’élaborent des règles de travail partagées.

À l’heure où le secteur social rencontre des difficultés de recrutement, d’absentéisme, de turnover, conduisant à embaucher des intérimaires, des non-diplômés, perturbant le fonctionnement des équipes, l’enjeux du maintien en emploi des salariés consiste à organiser des temps de travail affectés à des espaces de discussions entre professionnels, permettant de construire des règles communes de fonctionnement structurantes, de proposer des aménagements techniques et organisationnels, indispensables à la construction d’une pratique éducative porteuse de sens pour tous.

 

Turnover - les solutions organisationnelles et managériales qui s'inventent

 

Attractivité des métiers du prendre soin et du lien : un turnover lourd de conséquences pour les structures. Quelles pistes de solutions ?

 

Des effets décalés de la crise du Covid

 

Les structures que nous avons interrogées ont indiqué que les difficultés liées à l’attractivité se sont aggravées depuis deux ans. Il y a eu de nombreuses démissions en 2021 et moins de candidatures depuis. L’ensemble des personnes interrogées pointent un « effet décalé » de la crise Covid, période qui a particulièrement usé les équipes en place.

À ce sous-effectif sectoriel et structurel, s’ajoute un contexte d’absentéisme parfois significatif, en lien avec la pénibilité du métier. Lorsque cela se combine à des implantations loin des transports en commun, ou dans des zones gentrifiées où le logement n’est plus abordable aux petits salaires, certaines structures peuvent même être en manque critique de candidatures et de personnel.

 

Recruter autrement, accueillir les nouveaux venus pour bien les intégrer

 

Face à cela, les structures cherchent à diversifier leurs sources de recrutement, en s’associant par exemple à des associations d’insertion ou en allant « chercher » des publics spécifiques (réfugiées, personnes « dys », etc.). La plupart des personnes interrogées expliquent ainsi consacrer une énergie importante au recrutement. Certaines ont cependant identifié des leviers qui pourraient sembler contre-intuitifs et qui, pourtant, semblent être efficaces. Plusieurs structures expliquent en effet apporter beaucoup plus de soin au recrutement qu’auparavant (explication dès l’amont des difficultés du métier, visite, etc.) et à l’intégration (tutorat, accompagnement) pour éviter les départs rapides.

Construire la procédure de recrutement sur les difficultés du métier, la pénibilité ou encore l’engagement nécessaire pourrait sembler une mauvaise idée (si on manque de candidature, on ne va pas en plus « dégouter » les personnes qui candidatent, non ?). Pourtant, il semble que cette démarche permette de faire de meilleurs recrutements et donc de mieux fidéliser les personnes. Investir du temps et des efforts dans les procédures d’intégration permettrait aussi de diminuer les départs après seulement quelques jours. Ce double levier (transparence et intégration) permettrait donc en réalité « d’optimiser » le faible nombre de candidatures et de préserver du temps et de l’énergie pour les équipes d’encadrement.

 

L’organisation du travail et le management comme problématique centrale

 

Toutefois, cette question ne fait pas disparaître celle, centrale, de la pénibilité du métier, qui est réelle et importante. C’est une des principales raisons de démission. La pénibilité physique peut être particulièrement marquée à domicile, car les établissements d’accueil ont la possibilité d’avoir du matériel « lourd » qui la diminue (rail, lève malade, etc.). Le recours massif à l’intérim en établissement pour compenser le manque de personnel permanent entraîne une difficulté accrue de par la nécessité d’accompagner et d’encadrer les intérimaires.

Les horaires et les trajets pour les structures d’aide à domicile sont aussi une usure à part entière. Dans les structures d’accueil de handicap mental, c’est les interactions avec les résidents qui sont la principale source de pénibilité, puisqu’on peut parler d’environnement de travail « violent » : a minima des cris et hurlements, parfois de la violence physique (coups, morsures, etc.).

Les entretiens indiquent que les structures disposent de leviers pour agir face à ces situations. Un de nos résultats surprenants est l’importance relative donnée à la question du management par rapport à celle de la rémunération. Changer l’organisation du travail pour plus « d’horizontalité » semble en effet permettre de retenir le personnel et, dans une certaine mesure, de diminuer la pénibilité.

Par « horizontalité » il faut entendre toutes les décisions d’organisation du travail permettant aux salariées d’agir sans avoir à dépendre, référer ou répondre à un niveau hiérarchique supérieur : équipes autonomes, processus sans validation préalable, indépendance dans l’organisation du temps et des activités réalisées, etc. Même des démarches moins engagées et moins engageantes d’amélioration de la « qualité » du lien managérial semblent avoir cet effet : par exemple mettre en place un management « bienveillant », ou simplement souple et compréhensif. Ainsi, il semblerait intéressant d’accompagner les structures et leur encadrement non pas uniquement sur des questions de recrutement ou de formation, et encore moins uniquement de rémunération, mais aussi d’organisation du travail et de pratiques managériales.

 

Rémunérations et autres enjeux

 

Bien entendu, la question des rémunérations mises en regard de la pénibilité perdure. Toutefois, il semble que sur cet angle les structures manquent de marges de manœuvre, même si un nombre significatif de celles de l’échantillon indiquent avoir malgré tout revalorisé certaines catégories de salariées et souvent dépassé les salaires minimaux associés aux différents métiers.

Notre rapport détaille l’ensemble de ces éléments ainsi que d’autres questions plus précises, comme les enjeux de formation du secteur. Il en ressort le panorama d’une situation tendue pour le secteur, difficile pour les structures, mais dans laquelle les organisations disposent malgré tout de leviers qu’elles mobilisent de leur mieux pour faire face au manque d’attractivité, réel et problématique, des métiers de la dépendance.